A Wissous (Essonne), l'été dernier , le maire Richard Trinquier ( Les Républicains) s'était illustré, à peine élu, par une offensive raciste virulente. Non content d'avoir tenté d'interdire "Wissous Plage" à des femmes portant un voile, l'élu avait ensuite diffusé sur des affiches le nom des courageuses qui avaient osé porter l'affaire en justice et gagné. Sur les murs Facebook des élus de la majorité municipale, les menaces et les insultes contre les habitants musulmans de la commune avaient atteint un niveau de violence extrêmement élevé, tandis que certains de ses habitantEs témoignaient aussi de prises à parti dans leur quotidien.
A l'époque, l'UMP avait "suspendu" Trinquier, et l'exclusion était promise par certains responsables. Mais à la finale, Trinquier s'est contenté d'enlever une délégation à une de ses adjointes; il est toujours aux Républicains. Rien d'étonnant dans un contexte de course à l'échalote raciste entre ce parti et le FN: les positions islamophobes de Trinquier sont désormais tout à fait celles de Nicolas Sarkozy. D'ailleurs, dès l'été dernier l'initiative démagogue de Trinquier avait inspiré immédiatement Nadine Morano, qui s'était empressée de livrer à la vindicte publique une femme musulmane croisée sur une plage et photographiée par ses soins.
C'est donc très logiquement, qu'en cette rentrée, Trinquier, qui bon gré mal gré a du renoncer à la discrimination à la plage, se venge à la cantine scolaire. A son tour, il annonce en effet la "suppression de menus de substitution", comme l'ont fait avant lui, d'autres maires Les Républicains , comme celui de Châlons sur Saône. Trinquier traduit d'ailleurs très bien l'objectif de ces mesures, en évoquant dans la presse uniquement "les enfants qui ne mangent pas de porc". La consommation de cochon comme obligation laïque est évidemment parfaitement ridicule, mais cela témoigne d'un dévoiement très courant de la notion de laïcité, qui devient une simple défense des pires lubies identitaires.
Traduites en actes concrets au quotidien, ces lubies identitaires n'ont pas comme seul effet la complication du quotidien pour les personnes discriminées: elles créent une inégalité profonde au sein de la population, faisant des gens concernés d'éternels étrangers de l'intérieur, surveillés, pointés du doigt, et humiliés en permanence. Des portions grandissantes de l'espace public sont désormais le lieu de la chasse et de l'exclusion dès le plus jeune âge : l'école, les sorties scolaires, les espaces de loisir, la cantine. Dans le même mouvement, les victimes de ce racisme ordinaire et local se voient imposer une stigmatisation et règlementation de tous leurs comportements les plus banals, de l'habillement jusqu'à la nourriture.
D'ailleurs à Wissous, Trinquier a fait un pas de plus dans la désignation raciste institutionnalisée de "l'ennemi intérieur"; en juillet dernier, il a créé une "commission extra-municipale des cultures et de la diversité." Dans la présentation de cette commission, il en évoque les cibles, en mélangeant volontairement et allègrement , origine, culture et religion. Dans le Parisien il évoque ainsi "des gens d'origine juive, musulmane et catholique", avant d'évoquer plus loin "l'étude de l'histoire de ces peuples afin de les aider à s'intégrer". De quels peuples s'agit-il dans son projet ? Les musulmans et les Roms, puisqu'il évoque immédiatement l'affaire de Wissous Plage, et les habitants Roms d'un bidonville de la commune. La création de la fameuse commission fait en effet suite à une autre initiative de Trinquier: en juin dernier, il a "accompagné" des "riverains " venus menacer les résidents du bidonville, et à a cette occasion, flirté avec la violence physique .
La religion, comme la misère du bidonville créent donc des "peuples" selon Trinquier , des "minorités " dont "il est hors de question qu'elles imposent à l'autre "leur point de vue".
Wissous est une petite commune de quelques milliers d'habitants: le racisme municipal de Trinquier y a crée en miniature ce dont l'extrême-droite et la droite extrême rêvent au niveau national, une discrimination banalisée, prise au travers de mesures de proximité, étayées par une propagande excluante et anxiogène de tous les instants.
Les laboratoires du racisme ne se cantonnent pas aux villes FN, et malheureusement, la création de ces petites féodalités discriminatoires n'est pour l'instant pas combattue de manière nationale. Certes certains ministres du gouvernement condamnent, par exemple, la suppression de menus de substitution. Mais il suffirait de rendre obligatoire l'alternative végétarienne pour stopper définitivement les initiatives locales. De même, la persécution contre les Roms ne risque pas de s'arrêter à droite si elle est pratiquée aussi à gauche, ce qui est le cas actuellement, comme vient de le montrer l'exemple de la Courneuve.
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