Pendaison d'intellectuels arméniens à Constantinople le 24 avril 1915, marquant le début du génocide qui fit plus d'un million de victimes.
24 avril 2020: commémoration à l'ombre de la pandémie.
Le génocide de 1915 est commémoré cette année de manière virtuelle, comme le génocide des Tutsi et la révolte du ghetto de Varsovie symbolisant la Shoah.
Mais comme le dit le Collectif VAN ( vigilance arménienne contre le négationnisme), partenaire de Memorial 98, " nul ne peut confiner la mémoire" .
105 ans après qu'il ait été commis, le génocide des Arméniens n'est toujours pas reconnu en Turquie.
Au contraire le négationnisme de l'État turc se déploie partout afin d'en empêcher la reconnaissance. Celle-ci progresse néanmoins bien que trop lentement
Le combat se poursuit pour la reconnaissance pleine et entière, contre le négationnisme. C'est ce qui est du aux victimes du génocide, aux rescapés et aux Arméniens qui, partout dans le monde, continuent de souffrir des conséquences de ce crime historique
Memorial 98
25 avril 2019
Au lendemain du 104e anniversaire du début du génocide, Erdogan escalade dans le négationnisme. Il déclare sur son compte Twitter: " Le transfert des bandes arméniennes et de leurs partisans, tueurs de musulmans, y compris des femmes et des enfants vers l’Est de l’Anatolie était la décision la plus raisonnable à prendre à l’époque". Le président turc ajoute une dimension religieuse au génocide en évoquant de prétendus "tueurs de musulmans"
Memorial 98
Les injures et menaces de mort que subit actuellement la députée française Sonia Krimi, suite à une confrontation publique avec le ministre des affaires étrangères de Turquie à propos du génocide arménien, donnent une idée de la violence du négationnisme de l’État turc. Les représentants du régime turc ont fortement attaqué le 12 avril dernier, lors d’une assemblée parlementaire de l'Otan se tenant dans leur pays, la décision d’Emmanuel Macron d’instaurer une commémoration annuelle du génocide arménien de 1915, chaque 24 avril. Ils ont saisi comme prétexte d’attaquer le rôle de la France lors de la guerre d’Algérie et du génocide des Tutsi.
Plutôt que de reconnaître même partiellement
les responsabilités de leurs autorités dans le génocide de 1915, comme le fait
avec beaucoup de limites Macron à propos du Rwanda ( voir ici) et de l’Algérie (il a décrit la colonisation
comme un crime contre l’humanité avant de reculer face à l’offensive des
nostalgiques de l’Algérie française) ils ont choisi l’escalade. Suite à la protestation de Mme Krimi, elle est maintenant menacée de mort et harcelée sur les réseaux sociaux, avec des
références racistes à son origine tunisienne.
Au plan international, la reconnaissance du génocide des Arméniens, 104 années après qu'il ait été commis, est encore entravée, malgré les avancées historiques en Allemagne, aux Pays-Bas et récemment en Italie.
De nombreux pays tergiversent et hésitent, en raison des pressions de l’État turc et de ses alliés dont le régime dictatorial d’Azerbaïdjan, particulièrement corrompu et corrupteur. C'est notamment le cas des autorités israéliennes dont la position revêt un aspect historique et symbolique crucial. Le combat y est engagé depuis des dizaines d'années et progresse très lentement, au gré des rapports de force et des relations avec la Turquie et l'Azerbaïdjan qui font pression.
En France où le
génocide a été reconnu dès 2001, le combat porte encore sur une loi de pénalisation de la négation du génocide des Arméniens
comme il en existe une pour la Shoah et maintenant pour le génocide au Rwanda. Une telle loi constitue un instrument utile contre les négationnistes, comme l'a montré la condamnation récente de Soral pour son négationnisme de la Shoah.
Cette loi, maintes fois promise, a été votée non sans difficultés, y compris dans les rangs d'une partie de la gauche, en décembre 2011 à l'Assemblée nationale et en janvier 2012 au Sénat. Elle a ensuite été censurée avant sa promulgation par le Conseil Constitutionnel en février 2012. Une nouvelle loi avait été promise par François Hollande, mais elle est fut repoussée aux calendes grecques. Elle doit faire face à l'opposition d'hommes politiques et d'historiens institutionnels et puissants, dont Pierre Nora et Robert Badinter. Eric Zemmour, qui veut réhabiliter Pétain, plaide régulièrement contre toute loi mémorielle et toute action contre les négationnistes
En 2016, le vote d’une loi dite Égalité et Citoyenneté permettant de poursuivre les négationnistes des génocides a pu faire croire qu ‘elle permettrait cette pénalisation de la négation du génocide arménien. Mais en réalité cela n’a pas été le cas, comme l’analysaient nos amis et partenaires du Collectif VAN (Vigilance arménienne contre le négationnisme)
Cette loi, maintes fois promise, a été votée non sans difficultés, y compris dans les rangs d'une partie de la gauche, en décembre 2011 à l'Assemblée nationale et en janvier 2012 au Sénat. Elle a ensuite été censurée avant sa promulgation par le Conseil Constitutionnel en février 2012. Une nouvelle loi avait été promise par François Hollande, mais elle est fut repoussée aux calendes grecques. Elle doit faire face à l'opposition d'hommes politiques et d'historiens institutionnels et puissants, dont Pierre Nora et Robert Badinter. Eric Zemmour, qui veut réhabiliter Pétain, plaide régulièrement contre toute loi mémorielle et toute action contre les négationnistes
En 2016, le vote d’une loi dite Égalité et Citoyenneté permettant de poursuivre les négationnistes des génocides a pu faire croire qu ‘elle permettrait cette pénalisation de la négation du génocide arménien. Mais en réalité cela n’a pas été le cas, comme l’analysaient nos amis et partenaires du Collectif VAN (Vigilance arménienne contre le négationnisme)
Succès
au Sénat français pour la pénalisation du génocide des Tutsi mais pas pour
celui des Arméniens.
Le Sénat s'est
prononcé en faveur du rétablissement de l'article 38 ter de la Loi
"Égalité et Citoyenneté" permettant de poursuivre les négationnistes
des génocides - dont le génocide arménien nous dit-on - et crimes contre
l'humanité tels que l'esclavage. Étonnamment, les commentateurs de ce vote se
sont focalisés sur le génocide arménien en laissant entendre qu'il s'agissait
d'une ouverture contre les négationnistes.
Ils oublient de
préciser que seuls seront poursuivis les négationnistes d'un crime jugé par une
juridiction française ou internationale. Or il est bien connu que le génocide
arménien n'a jamais été jugé par ce type de juridiction.
Pour les crimes qui
ne pourront pas entrer dans la case "jugement français ou
international", il faudra alors remplir une autre condition : "la
négation, la minoration ou la banalisation de ces crimes" devront être
accompagnées d'"une incitation à la violence ou à la haine".
Or, il est tout à
fait habituel de nier un génocide ou un crime contre l'humanité sans
proférer des "propos violents ou haineux". C'est même la
spécialisation des négationnistes les plus pervers qui se présentent avec le
masque de l'historien : ce sont les plus prolifiques, les plus influents et les
plus dangereux. Ceux-là resteront certainement hors du champ d'application de
la loi.
Seule (grande)
satisfaction : si le Conseil Constitutionnel n'invalide pas cet article avant
sa promulgation, la Loi Égalité et Citoyenneté (qui - en l'occurrence - ne
mérite pas son nom) donnera la possibilité de poursuivre les négationnistes du
génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, génocide qui a fait, pour sa part,
l'objet d'un jugement international.
A l’occasion de ce
104e anniversaire, nous renouvelons notre souhait de voir Missak Manouchian, symbole de la résistance
au nazisme, entrer au Panthéon.
La
signification en serait d'autant plus forte que Manouchian était un orphelin
du génocide arménien. Le lien entre les génocides du 20e siècle,
notamment celui des Arméniens et la Shoah, représente
une raison supplémentaire de procéder à cette reconnaissance du rôle des
résistants de l'Affiche rouge.
Cette décision représenterait un hommage mérité à tous les
résistants anti-nazis d'origine étrangère. Ceux-ci ont souvent été les
pionniers de la résistance aux nazis, notamment dans le cadre des FTP-MOI (
MOI pour "Main d’œuvre immigrée "). Ils ont été pourchassés et
assassinés par les nazis, notamment pour le groupe dit de l'Affiche Rouge
fusillés avec Manouchian le 21 février 1944 au Mont-Valérien.
Avril et les trois grands génocides du 20e siècle
Le mois d'avril au cours duquel est honorée la mémoire des victimes des
trois génocides majeurs du XXe siècle comporte plusieurs
"jours de sang":
Le
7 avril 1994 marque le début du
génocide des Tutsi du Rwanda. C'est à lui que revient chaque année le
triste privilège d'ouvrir les commémorations du mois d'avril, avant celui de
la Shoah, le 19 avril correspondant au début de la révolte du ghetto de Varsovie le 19
avril 1943, celui des Arméniens le 24 avril correspondant aux premières
arrestations des intellectuels arméniens à Constantinople/Istanbul en avril
1915.
Nous y associons le
premier génocide du XXe siècle commis en 1904 par l'Allemagne impériale
contre les peuples Herero et Nama en Afrique australe, les
actions génocidaires en Bosnie à Srebrenica, au Darfour, le génocide des Roms, les actions génocidaires
du régime khmer rouge au Cambodge et la récente tentative
d’extermination des Yézidis d’Irak par Daech, les actions
génocidaires contre les Rohingya en Birmanie ...
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Les différents génocides ont des liens profonds entre
eux car dans tous les cas les populations promises à l’extermination ont été
d’abord été discriminées, stigmatisées, accusées de tous les maux, puis
désignées comme ennemies, regroupées, marquées et « étiquetées » sous
différentes formes et enfin conduites à l’extermination ou massacrées sur
place. Le génocide est l’aboutissement de décennies, voire de siècles, de
discriminations.
Un autre point commun à ces génocides est
qu'ils font face à des entreprises de négation, dans le cadre d’une
solidarité avec ceux qui ont perpétré le génocide. Nous luttons contre ce
phénomène très organisé, mis en place par les génocidaires eux mêmes et qui
constitue avec l’impunité une incitation à de nouveaux massacres.
Le but des génocidaires, en tout temps et en tout
lieu, ne consiste pas seulement à assassiner les vivants, mais aussi à nier à
tout jamais leur existence.
C’est pour cette raison que les négationnismes sont
consubstantiels aux génocides. En niant, il ne s’agit pas seulement d’une
tentative faite par les assassins pour échapper aux conséquences de leurs
crimes. Au même titre que les massacres physiques de masse, la négation est au
service au service du but final : effacer de l’histoire et de l’humanité une
partie des hommes et des femmes qui la constituent.
Hitler lui-même trouvait un encouragement dans la manière dont le génocide arménien était nié:
« Mais qui se souvient encore du massacre des Arméniens ? » déclarait-il dans une allocution aux commandants en chef de l'armée allemande le 22 août 1939, quelques jours avant l'invasion de la Pologne.
« Mais qui se souvient encore du massacre des Arméniens ? » déclarait-il dans une allocution aux commandants en chef de l'armée allemande le 22 août 1939, quelques jours avant l'invasion de la Pologne.
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