Le Hirak a perdu de sa force en raison de l’irruption du Covid et de la répression constante, dont témoigne ces derniers jours la dissolution d'une des organisations démocratiques les plus actives le Rassemblement Actions Jeunesse ( RAJ).
La contestation populaire du Hirak, une fois obtenue la démission de Bouteflika, a accentué la crispation des généraux algériens et leur mainmise sur la façade civile du pouvoir.
Alors que les manifestants exigeaient une « nouvelle indépendance » et remettaient en cause l’histoire officielle de l’Algérie, Macron a préféré accorder son soutien sans réserve au nouveau président choisi par l’armée, Abdelmadjid Tebboune, pourtant élu dans un scrutin massivement boycotté par la population après un référendum qui le fut également. Récemment le gouvernement français a accumulé les mesures provocatrices. Il a d’abord limité les visas délivrés aux pays du Maghreb, sous prétexte de difficultés pour réaliser des expulsions vers ces pays.
Puis Macron a émis divers commentaires dont le pire est la mise en cause de l’existence d’une « nation algérienne » « Est-ce qu’il y avait une nation algérienne avant la colonisation française ? Ça, c’est la question. » Cette « analyse » fausse sur une nation, que seul le colonisateur français aurait fait émerger, fait à juste titre l’unanimité contre elle.
Macron a ainsi réussi le tour de force de coaliser contre lui, et à travers lui contre la France, l’ensemble des sensibilités algériennes. L’entêtement de son pari sur Tebboune, qu’il a cru compenser par sa mise en cause tardive d’un « système politico-militaire », a beaucoup pesé dans un tel fiasco. Mais le doute jeté par l’Élysée sur la profondeur historique de la nation algérienne est complètement contraire au travail d’apaisement des mémoires, prôné par le rapport de Benjamin Stora, remis au même Macron.
En France, soixante ans après la répression sanglante de 1961 contre les Algériens, qui a débuté bien avant le 17 octobre, n’est pas encore totalement reconnue et qualifiée malgré les reconnaissances partielles de Hollande et Macron lui-même. Celui-ci a évoqué des crimes contre l’humanité et a depuis fait marche arrière. C’est pourquoi nous réclamons avec un très large collectif d’associations, des mesures précises pour la reconnaissance du crime de 1961 et sa réparation (ci-dessous)
Nous rappelons particulièrement le rôle dans la répression joué par le préfet de police Maurice Papon, qui avait déjà contribué à la déportation des Juifs de Bordeaux. Papon a toujours bénéficié d'une clémence exceptionnelle puisqu'il a échappé à la justice de 1981 à 1997, malgré la révélation en 1981 de son rôle dans la déportation des Juifs de Bordeaux. De plus il n'a jamais été jugé pour les massacres d'octobre 1961 et de Charonne.
Il a été libéré de prison après sa condamnation de 1998 (10 ans de prison) sur la base d'une "expertise " de médecins complaisants mandatés par la justice. Ces experts l'ont déclaré "grabataire" et ont estimé que le « pronostic vital » du prisonnier était posé. Cette expertise a permis à Papon-le-grabataire de sortir seul et à pied de la prison, de rentrer sans encombre chez lui septembre 2002 puis et d’y vivre tranquillement jusqu’en Février 2007.
Son procès s'est terminé en Avril 1998, symboliquement au moment même au moment même où dans 5 régions la droite faisait alliance avec le Front National.
Un autre élément d’actualité est lié à la campagne menée par Eric Zemmour en vue de la présidentielle. Dans son désir de réhabiliter le régime de Pétain, il considère que le procès Papon est une « une justice politique. » Car « Les fonctionnaires de Vichy n’étaient pas coupables, ils devaient obéir à l’État. Sinon il n’y a plus d’autorité, plus d'obéissance, vous vous rendez compte ? » Dans son livre de campagne il explique même que le procès Papon, fut une "opération politicienne" qui, lancée entre les deux tours de la présidentielle de 1981, aurait fait basculer 200 000 "voix juives" vers Mitterrand) puis un "procès idéologique", symbolisant le triomphe du "cosmopolitisme" sur le "patriotisme" et du "sentimentalisme" sur la "raison d’État".
C’est une raison supplémentaire de manifester massivement le 17 octobre, afin d'obtenir la justice par la reconnaissance du crime d’État et sa réparation.
C'est bien au delà de ce que concède Emmanuel Macron, admettant « une vérité incontestable » lors de la commémoration des 60 ans du massacre.
MEMORIAL 98
Appel unitaire d’associations, d’organisations syndicales et politiques
Le 17 octobre 1961,
Des dizaines de milliers d’Algériens manifestaient pacifiquement à Paris contre le
couvre-feu discriminatoire qui leur avait été imposé par le gouvernement de l'époque dont le Premier ministre, Michel Debré, était hostile à l'indépendance de l'Algérie, et le Préfet de Police Maurice Papon sous ses ordres.
Ils défendaient leur droit à l’égalité, leur droit à l'indépendance et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
Ce jour-là, et les jours qui suivirent, des milliers de ces manifestants furent arrêtés, emprisonnés, torturés – notamment par la « force de police auxiliaire » – ou, pour nombre d’entre eux, refoulés en Algérie. Des centaines perdirent la vie, victimes d’une violence et d’une brutalité extrêmes des forces de police parisiennes.
60 ans après, la Vérité est partiellement en marche. Cependant, la France n’a toujours pas reconnu sa responsabilité dans les guerres coloniales qu’elle a menées – en particulier la Guerre d’Algérie – non plus que dans le cortège de drames et d’horreurs qu'elles ont entraînés, comme ce crime d’État que constitue le 17 octobre 1961.
Le 17 octobre 2012, le Président de la République (François Hollande) avait certes fait un premier pas important, en déclarant : « Le 17 octobre 1961, des Algériens qui manifestaient pour le droit à l'indépendance ont été tués lors d’une sanglante répression. La République reconnaît avec lucidité ces faits. Cinquante et un ans après cette tragédie, je rends hommage à la mémoire des victimes. » Mais le terme de crime n'est pas repris, et la responsabilité, sous entendue, n’est pas clairement définie. Nous demandons une parole claire aux autorités de la République, au moment où certains osent encore aujourd’hui continuer à parler des « bienfaits de la colonisation », à célébrer le putsch des généraux à Alger contre la République, à « honorer » les criminels de l'OAS.
Dans ce domaine, il est donc nécessaire que des mesures significatives soient prises :
➢ Que la lumière soit faite sur les soi-disant « retours vers leurs douars d’origine » des Algériens survivants du 17 octobre envoyés en fait dans des camps de la mort de l'Algérie coloniale.
➢ Que la création d’un lieu de mémoire voué à cet événement, demandée dans la résolution votée par le Sénat en octobre 2012 qui reconnaissait elle aussi ce massacre, soit rapidement mise en œuvre par les autorités de l’État, de la Ville de Paris et la Région Île-de-France. ➢ Pour être fidèles à leur mission scientifique, les historiens ont besoin de pouvoir accéder librement aux archives, échapper aux contrôles des pouvoirs ou des groupes de pression et travailler ensemble, avec leurs collègues algériens
➢ La vérité doit être dite sur l'organisation criminelle de l’OAS que certains au sein de la droite et extrême droite politique veulent réhabiliter. ➢ Faute d’une telle reconnaissance, le système de ce type de violence policière se reproduit.
Ce n’est qu’à ce prix que pourra disparaître la séquelle la plus grave de la Guerre d’Algérie, à savoir le racisme, l’islamophobie et les discriminations dont sont victimes aujourd’hui nombre de citoyennes et citoyens, ressortissants d’origine maghrébine ou des anciennes colonies, y compris sous la forme de violences policières récurrentes, parfois meurtrières. On ne construit pas la démocratie sur des mensonges et des occultations.
Après plus d’un demi-siècle, il est temps : ✓ Que le Président de la République, au nom de la France, confirme, par un geste fort, la reconnaissance et la condamnation de ce crime d’État. Comme il l'a fait en septembre 2018 pour l'assassinat de Maurice Audin, et en mars 2021 pour celui de maître Ali Boumendjel par l’armée française et pour l’existence d’un système de torture généralisé. Cette reconnaissance doit s’étendre aux milliers d’Algériens qui en ont été victimes (voir le site www.1000autres.org) ;
✓ Que l’État français reconnaisse sa responsabilité dans l'internement arbitraire, pendant la Guerre d’Algérie, d’Algériens dans des camps ;
✓ Que la liberté d’accès aux archives soit effective pour tous, historiens et citoyens ;
✓ Que la recherche historique sur ces questions soit encouragée, dans un cadre franco-algérien, international et indépendant.
✓ Qu’une loi de réparation soit mise en œuvre
Manifestation dimanche 17 octobre 2021 à 15 h, du cinéma REX au pont Saint-Michel à PARIS |
Articles et dossiers de Memorial 98 en lien avec le 17 Octobre, Papon, Zemmour
http://www.memorial98.org/article-17-octobre-1961-124786531.html
17 octobre 1961: un massacre colonial.
17 Octobre: la mémoire d'un massacre à Paris
17 Octobre 1961 : 50e anniversaire du massacre des Algériens.
http://info-antiraciste.blogspot.com/2020/11/algerie-un-referendum-boycotte-marque.html
Michel Slitinsky: hommage à un combattant
Zemmour:
http://info-antiraciste.blogspot.com/2021/10/3-octobre-1940-petain-heros-de-zemmour.html
http://info-antiraciste.blogspot.com/2020/01/zemmour-recidive-et-escalade-agissons.html
http://www.memorial98.org/article-zemmour-rehabilite-petain-pour-qui-pourquoi-124774288.html
http://www.memorial98.org/article-memoire-la-rafle-meconnue-du-20-aout-1941-82199443.html
http://www.memorial98.org/article-30-janvier-1933-le-desastre-114868033.html
http://info-antiraciste.blogspot.com/2020/10/il-ya-80-ans-petain-lancait-la.html
http://www.memorial98.org/article-antisemitisme-le-double-anniversaire-du-3-octobre-58213369.html
http://info-antiraciste.blogspot.com/2020/04/celine-en-vedette-propos-du-covid19-une.html
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