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lundi 15 mars 2021

Syrie 10 ans : l'extrême-droite au service exclusif des bourreaux


Cela fait dix ans déjà que la révolution syrienne, débutée dans la vague des printemps arabes, a ébranlé la dictature du clan Assad qui règne sur la Syrie depuis 1970, suite au coup d'état à l'époque de Hafez-El-Assad, père de Bachar.

Le 5 juin 2011, Memorial 98 a publié un premier texte contre le massacre de la population. Depuis notre engagement s'est poursuivi  et approfondi à travers de multiples manifestations et actions de solidarité ( voir ci-dessous nos textes et appels).

Alors que plusieurs partis de gauche ont très vite abandonné le camp du soutien à ce grand soulèvement démocratique allant parfois jusqu'à le dénoncer et le calomnier, l'extrême-droite et la droite radicale ont au contraire accentué leur dévotion politique au dictateur de Damas.

Les obsessions de l’extrême droite trouvent en Syrie un écho sur lequel Bachar Al-Assad sait parfaitement jouer: défense des régimes autoritaires et rejet de la démocratie, anti-islamisme (réduit à sa frange djihadiste), antisémitisme, défense de la chrétienté persécutée. Il n’est donc pas étonnant que la propagande du régime syrien ait trouvé un relais actif dans ces groupes extrémistes, eux-mêmes divers et fortement divisés, et dans des milieux soucieux de présenter une image publique plus modérée mais néanmoins sensibles à des thématiques sécuritaires et religieuses.

 

Des connivences anciennes avec les idéologies fascistes et l’antisémitisme

 

Les relations entre le régime syrien et l’extrême-droite datent de bien avant la révolution de 2011.

Le régime avait accueilli de nombreux nazis, dont un des pires criminels de guerre, Aloïs Brunner, adjoint d’Eichmann, responsable en France du camp de Drancy et organisateur de très nombreuses déportations dont celle des Juifs de Salonique qui aboutit à 98% de morts. Brunner arrive en Syrie vers 1954; plus tard, en 1971, il est embauché directement comme conseiller du gouvernement de Hafez El Assad (père de Bachar). Il aide le pouvoir syrien à mettre en place des techniques de torture dans les prisons.


 

Le général Moustapha Tlass, éternel ministre de la Défense syrien de 1972 à 2004, représente la continuité du régime syrien puisqu’il est confirmé par Bachar Al-Assad, arrivé au pouvoir en 2000, lors de la mort de son père.

Dès 1994, Frédéric Chatillon alors dirigeant du GUD, milice d’extrême-droite ultra-violente  (Groupe Union Droit)  se rapproche de Tlass. Il est reçu par le ministre en Octobre 1994 à Damas. Sur les murs de son appartement sont accrochés des dessins signés de Hitler; Chatillon repart avec dix exemplaires de Mein Kampf en arabe, repérés par la police à son retour en France.

Le régime d’Hafez Al-Assad (père de Bachar) finance dès lors les activités du GUD et voit en Chatillon une porte ouverte vers les mouvements extrémistes occidentaux. C’est aussi l’époque d’un tournant politique du GUD, qui relativise son combat anti-communiste et adopte une ligne ouvertement antisémite. Le général Tlass est connu pour ses positions négationnistes envers la Shoah et a fait éditer en arabe le faux antisémite «  Protocole des Sages de Sion ». Il a aussi publié une œuvre de son cru "La Mazah de Sion" qui reprend la prétendue thèse du crime rituel juif destiné à introduire le sang d'enfants dans le pain azyme. C’est pour cette raison qu’il devra abandonner son projet de soutenir une thèse à la Sorbonne. 

Chatillon fait profiter ses amis de ses contacts au sein du régime syrien et invite la fine fleur des milieux complotistes à se rendre à Damas. Il organise notamment en 2006 un voyage au Liban et en Syrie en compagnie d'Alain Soral et de Dieudonné, ainsi qu'un autre voyage de presse en août 2011, aux côtés de Thierry Meyssan, l'animateur complotiste du Réseau Voltaire. Ce dernier vit et agit d’ailleurs à Damas. Sans surprise, il s’attèlera rapidement  à dénoncer une tentative de déstabilisation menée par l’Otan, le Qatar et l’Arabie saoudite, pour assurer la « domination sioniste » de la région.

Chatillon mélange en permanence l’activisme politique et les affaires. Il fonde une nébuleuse de sociétés commerciales qu’il mettra ensuite au service du Front National puis du Rassemblement National.  Chatillon lui-même devient un proche conseiller de Marine Le Pen,  (comme le montre précisément le livre de Destal et Marine Turchi. « Marine est au courant de tout »

                                Chatillon dans une manifestation de soutien au régime Assad
 

Sa société principale, nommée Riwal, élargit ses activités, notamment avec sa filiale Riwal Syria, « spécialisée dans la promotion des sociétés privées et des institutions publiques syriennes en France ». L'agence crée notamment le site du ministère du tourisme syrien. En décembre 2009, Riwal Syria réalise ainsi une campagne pour le ministère syrien du tourisme, en faisant tourner à Paris  un car portant  le slogan « Syrie, une nouvelle aire ». 

En juin 2011, trois mois après le début de la révolte et  des manifestations contre Assad, Chatillon lance le site InfoSyrie, présenté comme « organe de réinformation » c’est à dire de propagande pro-régime. Il le fera durer pendant  un an, avant de poursuivre son activité sur Facebook. 

En mars 2016, Chatillon figure également dans la délégation française reçue par Bachar Al-Assad, qui mêle des députés Les Républicains (dont déjà Thierry Mariani qui rejoindra ensuite le RN)  et des figures d'extrême droite. 

Cet attrait de l’extrême droite pour le régime Assad n’est évidemment pas uniquement français.  En 2005, David Duke, ancien dirigeant du Klux Klux Klan, promoteur de théories racistes et négationnistes, antisémite enragé et futur soutien de Trump, était invité en grand pompe à Damas où il a prononcé un discours antisémite en s’attaquant aux “sionistes qui occupent New York et à l’État d’Israël“. Ce discours a été retransmis par la télévision syrienne. Il déclarait “En Amérique et partout dans le monde, il n’y a que les sionistes pour vouloir la guerre et non la paix”, dans un discours qui voulait illustrer la convergence entre son idéologie de la suprématie de la race blanche et une certaine rhétorique « antisioniste » dans le monde arabe. “Cela me fait mal de vous dire qu’une partie de mon pays (USA) est occupée par les sionistes, tout comme une partie de votre pays, le Golan, est occupée par les sionistes. Les sionistes occupent la plus grande partie des médias américains et contrôlent pour une large part le gouvernement américain“, ajoutait-t-il.

 

Contre les musulmans, l’axe « civilisationnel » Bachar-Poutine

 

Avec le début du soulèvement de la population syrienne contre le régime de Bachar en Mars 2011, le soutien de l’extrême droite internationale s’approfondit et change de dimension. 

Sa mouvance s’oppose à la vague des révolutions qui se développent à partir de  2011 dans les pays arabes. Pour ceux qui méprisent aussi violemment les populations arabes et musulmanes, seuls des dictateurs sont à même de “mater” les populations qui réclament la justice et la démocratie.

Depuis le début du conflit en Syrie, Bachar Al-Assad attire les courants d'extrême-droite en Occident, au point d'en être devenu l'un des symboles. On a ainsi trouvé ses portraits chez les responsables de l’émeute suprémaciste de Charlottesville en 2017, au côté de portraits de Hitler. 

La vision de l'extrême-droite occidentale du conflit syrien est qu'il y a un régime qui impose l'ordre et la stabilité face à des « indigènes ». Assad représente dans cet imaginaire collectif une figure centrale, il est devenu l'un de leurs modèles. Ils le défendent face aux protestations dues à la politique répressive du régime et à ses massacres, qui sont niés ou relativisés. 

Au sein de l’Union européenne, les exemples sont légion. “Poutine et Assad sont de notre côté”, déclare en novembre 2016 Paul Nuttal, alors leader de l’UKIP (Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni), le parti de la droite nationaliste et xénophobe de Nigel Farage.

 Il est loin d’être le seul : les néos-nazis d’Aube dorée en Grèce, les fascistes de  Forza Nuova et Casa Pound en Italie, mais aussi les ultra-nationalistes polonais, espagnols ou belges affichent tous leur soutien au régime Assad.

À la fin août 2019, le groupe néo-fasciste italien Casa Pound visitait ainsi en grande pompe la ville syrienne d’Alep, assiégée et bombardée par le régime et l’aviation russe, puis reconquise par eux en 2016. Le ministère du tourisme syrien a alors salué sur sa page Facebook cette « délégation italienne » en publiant une photo mettant en avant le drapeau de ce groupe. 

C’est avec beaucoup d’intelligence, voire de machiavélisme, que Damas a fait évoluer sa propagande au cours du conflit, pour séduire les pans de l’extrême droite occidentale. Ces dernières années d’autres groupes fascistes et d’extrême droite en Europe se sont rendus en Syrie pour exprimer leur soutien au régime de Damas, comme par exemple en juin 2013, Nick Griffin, le leader du British National Party (BNP), ou des fascistes polonais du groupe  Falanga . Ces derniers, venus en « mission de solidarité », ont d’ailleurs rencontré à l’époque le premier ministre et le ministre aux affaires étrangères syriennes.

L’European Solidarity Front regroupement d’organisations fascistes de toute l’Europe (National Rebirth of Poland, Casa Pound d’Italie, Black Lilly de Grèce, etc.) a organisé de nombreuses manifestations et conférences en faveur du régime syrien.  Ce Front s’affirme notamment « ouvert à tous ceux qui aiment la Syrie, et soutiennent la solidarité avec le président Assad, la nation syrienne et son armée ». Les fascistes grecs de Black Lilly ont également été accusés d’avoir envoyé des militants en Syrie pour combattre militairement  aux côtés des forces du régime syrien. 

Depuis le début du conflit syrien, au-delà de la propagande, c’est l’image elle-même du régime qui a permis de regrouper ces nouveaux partisans. Bachar est devenu pour eux un symbole à défendre, d’autant plus qu’ils le voient comme un homme assiégé par ceux dont ils estiment qu’ils sont leurs ennemis : les islamistes et les « mondialistes » 

Mais le régime ne se contente pas de l’appui des groupes de l’extrême-droite la plus radicale.

Il désire obtenir l’appui actif  des “grands” partis d’extrême-droite, dotés d’une représentation parlementaire, ainsi que des fractions de la droite dure pro-Poutine à la lisière de celle-ci. Le Front national  français joue un rôle important dans cette stratégie. “J’ai dit dès le début du conflit syrien, et j’étais la seule à l’époque, que contribuer à la chute de Bachar Al-Assad c’est permettre à l’EI [groupe État islamique, Daech] de gouverner la Syrie”,  déclarait Marine Le Pen, alors candidate à l’élection présidentielle, dans un entretien accordé en février 2017 au quotidien libanais L’Orient-Le Jour. Elle savait parfaitement à quoi s’en tenir, en raison de sa proximité avec Frédéric Chatillon, ami et organisateur de sa campagne et en même temps relais du régime syrien (voir ci-dessus) 

Une partie de la droite française n’a pas tardé à reprendre les arguments du FN, en les adaptant à sa propre posture politique. Contrainte de reconnaître les violations grossières des droits de l’homme par le régime syrien, elle a donc recours à la théorie du “moindre mal” puisqu’en face d’Assad on ne trouverait selon elle que les djihadistes de Daech. 

 Dans ce but l’opposition syrienne doit est ignorée ou stigmatisée comme djihadiste. La chute de la ville d’Alep en décembre 2016, suite à une offensive du régime et de ses alliés, a nourri les discours des pro-Bachar, applaudissant ainsi une “victoire” de Damas et de Moscou contre “les terroristes”. Quelques semaines plus tard, c’était au tour d’une délégation du mouvement d’extrême droite française du Rassemblement National (ex FN),  emmenée par Thierry Mariani, de se rendre en Syrie et de rencontrer Bachar Al-Assad. Le magazine français d’extrême droite Valeurs actuelles décrivait cette visite comme « Une manière, pour le parti de Marine Le Pen, d’exprimer son soutien envers le régime de Damas et de le féliciter pour sa lutte contre le terrorisme islamiste ».

 

L’homme clé de cette stratégie de soutien est Thierry Mariani. Cet ancien ministre de Sarkozy, de 2010 à 2012, s’est toujours situé dans l’aile la plus droitière de l’UMP puis de LR. Il a basculé officiellement vers le RN lors des élections européennes de 2018, ce qui lui a permis de devenir eurodéputé et de donner un nouvel élan à ses activités. 

 

                                Mariani avec Assad à Damas

 

Son regroupement au sein de l’UMP/LR, dénommé « la Droite Populaire », était déjà  ouvert aux positions racistes et xénophobes du FN. Il a lui-même présenté de nombreux projets législatifs durcissant le statut des immigrés. 

Mariani a aussi rapidement représenté la pointe du lobby de soutien à Poutine. Il a ainsi défendu l’annexion de la Crimée par la Russie en mars 2014 et y a  organisé en juillet 2015 un voyage de députés français afin d’affirmer cet appui. C’est cette même méthode des voyages qu’il utilise pour organiser un front de soutien au régime syrien.  Ces déplacements  constituent autant de pèlerinages qui sont destinés à marteler des éléments de propagande bien rodés : le régime Assad est stable, il a vaincu Daech et les djihadistes,  l’ordre règne à Damas. L’eurodéputée RN Virginie Jorion déclarait ainsi en septembre 2019, au retour d’une visite à Damas, sous la houlette de l’incontournable Mariani, qu’elle se sentait plus en sécurité à Damas qu’à Paris.

Mariani a été promu tête de liste RN pour les élections régionales de juin 2021 dans la région PACA. C'est un signe important car cette région C'est là que se sont présentés Jean-Marie Le Pen puis Marion Maréchal. C'est là que s'est nouée dès 1986 la première alliance électorale entre la droite de  Jean-Claude Gaudin et le FN de Jean Marie-Le Pen.   

 

Pour la défense de la chrétienté : une instrumentalisation mensongère.

 

L’arme cruciale utilisée par l’extrême-droite afin d’élargir l’acceptation du régime syrien s’appuie sur l’instrumentalisation de la défense des chrétiens d’Orient. Cette manipulation a été mise en place, dès 2011 par les services de propagande syriens eux-mêmes, autour notamment de la figure de la Mère Agnès-Mariam de la Croix. Celle-ci est chargée de porter la bonne parole du régime et de manipuler les journalistes étrangers.  Elle a été mise en cause dans la mort du journaliste français Gilles Jacquier, tué à Homs en janvier 2012. Celui-ci a sans doute payé de sa vie le fait d’avoir échappé au contrôle des services de renseignements. Ces derniers scrutaient attentivement le déroulement de sa visite, en coopération avec la religieuse qui avait joué les intermédiaires 

Cet axe de propagande, imaginé par le régime, s’est trouvé décuplé par la mise en place en France de l’organisation SOS Chrétiens d’Orient. Celle-ci  a réussi le tour de force  de réunir toutes les familles de l’extrême droite française autour d’une même cause, puisqu’on y trouve pêle-mêle,  des identitaires, des anciens de l’Œuvre Française, de nombreux cadres du RN et des catholiques intégristes

SOS Chrétiens d'Orient (SOS CO)  a été fondée en 2013 par Charles de Meyer et Benjamin Blanchard. Le premier est un ancien assistant du député d'extrême droite Jacques Bompard. Il est maintenant assistant parlementaire de l'eurodéputé RN Thierry Mariani dont on  a déjà noté le rôle central. Benjamin Blanchard est un ancien collaborateur de l’eurodéputée du Front national Marie-Christine Arnautu et également  animateur sur Radio Courtoisie.  Les deux fondateurs se seraient rencontrés lors d’une garde à vue en avril 2013, dans le cadre d'une action de la Manif pour tous.

Un businessman, nommé Olivier Demeocq, organise leur premier voyage en Syrie, grâce aux contacts de son ami Frédéric Chatillon, dont nous avons décrit ci-dessus l’implantation ancienne auprès de la dictature des Assad. Demeocq a depuis rompu avec eux, en critiquant la manipulation de leur prétendue action humanitaire. De 2014 à 2018, leurs collectes annuelles de dons passent de 1 à 8 millions d’euros 

Leur entreprise trouve un écho particulier chez les jeunes de la droite catholique radicale, déçus par l’échec de la Manif pour tous et l’adoption du mariage pour tous. Au moment où « la France leur paraît atteinte par le double mal du sécularisme libéral et de l’islam, les chrétiens d’Orient leurs offrent un témoignage de martyrs sous le joug de l’islamisme, un modèle de christianisme authentique pour le rétablissement de l’ordre moral en France ainsi qu’un récit donnant un sens providentiel à l’histoire nationale de la France », analyse le chercheur Alexis Artaud de La Ferrière, dans Les cahiers de l’EMAM.   

L'hebdomadaire chrétien La Vie affirme aussi que « les dirigeants et fondateurs [de SOS Chrétiens d'Orient] sont tous des jeunes issus de la droite catholique identitaire. L’association traditionnelle de l’Église chargée de défendre les chrétiens d’Orient (l’Oeuvre d’Orient) se prononce dans le même sens.  

SOS CO se revendique "apolitique". Mais elle  faisait partie des partenaires de la "Convention de la droite" organisée par l'ancienne députée frontiste Marion Maréchal en septembre 2019 et au cours de laquelle Eric Zemmour prononce un discours de guerre civile et religieuse.

L’essentiel des fonds importants de SOS Chrétiens d’Orient proviennent de particuliers et de paroisses catholiques. Mais deux députés et une sénatrice du parti Les Républicains lui ont néanmoins apporté 16 000 euros en 2016, en puisant dans les fonds de leur «  réserve parlementaire » avant que celle-ci ne soit supprimée. 

Le député Alain Marsaud (Les Républicains) a signé un chèque de 8000 suivi de Jean-Frédéric Poisson, l’ancien président du parti chrétien-démocrate de Christine Boutin avec 5 000 euros et enfin Joëlle Garriaud-Maylam qui représentait les Français de l’étranger et a versé 3 000 euros à l’ONG. Poisson, ancien candidat à la primaire de la droite en 2016, est un soutien de Assad et s’est rendu à Damas pour le rencontrer. Il est également connu pour ses propos antisémites.

 

Mediapart a révélé dans une enquête approfondie les liens matériels de SOS CO avec le régime syrien. Il s’agit notamment d’opérations de communication avec divers personnages de l’entourage d’Assad et avec des dignitaires chrétiens locaux, connus pour leurs turpitudes financières. 

Pire encore, SOS CO soutiendrait des milices armées qui combattent pour Bachar Al-Assad et ont commis des exactions dans la région de Hama. C’est d’autant plus choquant que l’association a été considérée pendant plusieurs années comme partenaire de la Défense nationale par le ministère français des armées. Les révélations qui se sont accumulées à son propos ont contraint le ministère à mettre fin à cette collaboration. 

 Au total, c’est avec beaucoup d’habileté que le régime syrien a fait évoluer sa propagande au cours du conflit, pour séduire les pans de l’extrême droite et de la droite radicale occidentales. Celles-ci ont joué leur rôle dans la défense d’un régime mis en cause pour ses atrocités mais qui a finalement réussi à échapper à de réelles sanctions, grâce à son alliance avec la Russie qui lui garantit un veto automatique face aux velléités de condamnation de l’ONU. 

 Ainsi depuis le début de la révolution syrienne, Damas est devenue un lieu de pèlerinage pour toutes les mouvances de l’extrême droite mondiale, et plus particulièrement européenne 

On pourrait résumer cet attrait en quatre points, selon le politologue  Ziad Majed : “Il s’agit d’abord d’une fascination pour la violence, pour cette puissance sans limite d’Assad qui s’abat contre des gens qui méritent d’être punis. La deuxième raison est qu’ils considèrent Assad comme ‘leur blanc’. C’est ‘le suprémaciste blanc syrien’ qui vient châtier des ‘indigènes’. Troisièmement, Assad est celui qui massacre des musulmans, ce qui, pour les racistes/islamophobes, est quelque chose de bien. Enfin, et surtout, il est l’allié de l’un des ‘prophètes de l’extrême droite : Vladimir Poutine’, analyse le chercheur. “Cette internationale nationaliste autoritaire est unie autour de la figure de Poutine, qui est hostile à ce qu’elle appelle le mondialisme et souvent unie par les questions d’identité”

 L’engagement massif de l’extrême-droite au côté du régime syrien représente un défi que le mouvement de solidarité affronte avec difficulté, en raison des confusions qui règnent au sujet de la Syrie dans le camp de la gauche.

 Le positionnement d’une partie de celle-ci témoigne d’une porosité manifeste à la propagande du régime et de son soutien russe. Une grille de lecture se réclamant d’un "anti-impérialisme" frappé de strabisme aboutit ainsi à privilégier l’axe Assad-Poutine-Iran face à un complot occidental qui serait déterminé par le pétrole et le gaz. On n’est guère éloigné de la géopolitique à la sauce complotiste. Jean-Luc Mélenchon va jusqu’à déclarer qu’il fait confiance à Poutine pour « régler le problème » des djihadistes, auxquels il assimile d’ailleurs les habitants de la Ghouta , bombardés par le gaz sarin du régime.

On aboutit ainsi à une confusion dont le seul bénéficiaire est un régime qui maîtrise parfaitement les différents registres lui permettant d’atténuer l’horreur de ses actes, voire de les justifier.

 

C'est pourquoi en ce dixième anniversaire, nous appelons plus que jamais à un grand mouvement de solidarité avec la population syrienne et son aspiration maintenue à la liberté et la justice

 

MEMORIAL 98 

Textes et articles de Memorial 98 sur la Syrie ( sélection) 

 


 


vendredi 20 juillet 2018

Israël: enfin le procès de Netanyahou.

24 mai: début du procès pénal de Netanyahou
 
le procès de Netanyahou pour corruption s'est enfin ouvert aujourd'hui, après ses nombreuses tentatives pour faire repousser ou même annuler cette échéance judiciaire.
Il s'agit accessoirement de cadeaux extravagants et répétés reçu de divers hommes d'affaires fortunés ( dossier 1000).
Le cœur du dossier concerne des relations de corruption avec les propriétaires des principaux organes de presse et sites d'information du pays ( dossiers 2000 et 4000).
Netanyahou vient de parvenir à former une majorité parlementaire de gouvernement, suite à la trahison en rase campagne de celui qui se présentait comme une alternative, le centriste Benny Gantz. Le gouvernement actuel est en principe concentré sur l'urgence de la crise du Covid et de ses conséquences.
Mais Natanayahou veut avant tout profiter de cet attelage baroque afin de mener à bien deux des projets qui lui tiennent à cœur: d'une part l'annexion des colonies en Cisjordanie grâce au soutien de Trump et d'autre part la remise en cause du rôle de la justice et de la Cour suprême, gardienne de principes démocratiques.

 
MEMORIAL 98

2 mars: troisième scrutin législatif en moins d'un an.

Ce jour, les Israéliens se rendent aux urnes pour la troisième fois en moins d'un an.. Après les élections d' avril et de septembre, le premier ministre sortant n'a pas pu constituer de coalition majoritaire.

Fin janvier, Netanyahou s’était lancé dans une tournée internationale afin de recueillir à nouveau le soutien publics de ses mentors Trump et Poutine (voir ci-dessous sur ce soutien constant). A Washington, il avait dévoilé aux côtés du président US le plan américain pour une « paix » israélo-palestinienne. Il s'agit en réalité d'un plan d'annexion de nombreux territoires palestiniens et de légitimation de l'exclusion de ceux-ci hors de Jérusalem. Mais malgré la mise en scène et les cris de victoires des dirigeants du Likoud, ce plan est encore loin de s'appliquer. . Le lendemain même, il s’était envolé pour Moscou, afin de rapatrier lui-même une Israélienne emprisonnée pour possession de quelques grammes de marijuana et "pardonnée" spectaculairement  par Vladimir Poutine. Ce soutien américano-russe et la faiblesse de l'opposition entraineront-ils le succès du dirigeant d'une droite raciste et antidémocratique, alors que son procès pour corruption débute dans deux semaines? 
C'est l'enjeu de ce scrutin. 

MEMORIAL 98

11 septembre 2019

A quelques jours des élections législatives du 17 septembre, Nétanayahou a recours à nouveau à ses attaques habituelles contre la minorité arabe. Il tente de faire passer une loi dite " des caméras" qui permettrait d'intimider encore plus fortement les électeurs arabes en les filmant dans les bureaux de vote. Il avait déjà fait procéder à une installation sauvage de ces caméras lors du précédent scrutin.  La commission électorale avait fait retirer ces caméras illégales mais l’intimidation avait fonctionné et avait fortement limité la participation dans ce secteur.
En même temps, le premier ministre sortant se fait aider par Poutine qui le recevra le 12 septembre, cinq jours avant le scrutin. Ce fut déjà le cas lors des précédentes élections ( voir ci-dessous). Du côté de Trump, allié principal de la droite israélienne, les choses sont moins simples. Le limogeage du "faucon" John Bolton et l'annonce de la volonté du président US de rencontrer les autorités iraniennes entre en contradiction temporaire avec la propagande de Nétanayahou.
Une défaite de ce dernier constituerait une excellente et  importante nouvelle.
Memorial 98 

Mise à jour du 30 mai 2019:
Malgré sa victoire lors des élections législatives du 9 avril, Nétanayahou subit un revers grave, en échouant à constituer une coalition majoritaire. Du coup il impose la dissolution du Parlement de nouvelles élections, afin de bloquer la possibilité qu'un autre dirigeant de son parti constitue cette coalition. Le motif immédiat de cet échec est le refus du très droitier Liebermann d'accepter des mesures discriminatoires favorables aux intégristes religieux en matière de service militaire.
Mais le contexte est tout aussi important: Nétanayahou est accusé de corruption dans plusieurs dossiers. Le procureur général Mandelblit a annoncé la préparation de sa mise en examen et un futur procès. Pour y échapper, le premier ministre sortant a tenté de faire passer de nouvelles règles garantissant son immunité et son impunité ainsi qu'une limitation du rôle de la Cour suprême (voir ci-dessous) C'est dans ce but qu'il a favorisé la constitution d'une liste d'extrême-droite comportant des fascistes avérés. Ceux-ci étaient censés lui fournir une majorité stable et la garantie d'échapper à un procès. Lors du scrutin du 9 avril, Nétanayahou s'est également livré à des manœuvres d'intimidation afin de dissuader les électeurs de la minorité arabe de se rendre aux urnes. Des activistes de son parti ont placé des caméras dans les bureaux de vote prétendument pour surveiller les fraudes. La commission électorale a fait retirer ces caméras illégales mais l’intimidation a fonctionné et a fortement limité la participation dans ce secteur.
Les différentes tentatives de Netanayahou s'effondrent au moins temporairement, ce qui constitue une bonne nouvelle. Il aura en effet plus de mal à échapper à la justice. Mais les problèmes de fond de la société israélienne demeurent, en premier lieu ceux liés à l'occupation prolongée des territoires palestiniens.

Memorial 98
Mise à jour du 9 avril 2019:
Le vote a débuté en Israël et va se polariser sur le maintien ou pas de
Nétanayahou et de son parti au pouvoir. Le premier ministre sortant, cerné par les dossiers de corruption qui le visent, a encore radicalisé ses positions ( voir ci-dessous) 
Il accueille et congratule les fascistes de son pays et vient de recevoir en grande pompe Bolsonaro.
Un de ses principaux arguments de campagne est sa proximité avec Trump, Poutine et d'autres de cet acabit. Ces derniers ont multiplié les gestes afin de le soutenir.



Le président US a décidé de reconnaître l'annexion par Israël du plateau du Golan, qui appartient légalement à la Syrie. Cette décision unilatérale est contraire à toutes les règles du droit international. Elle ouvre la voie à une annexion semblable de la Cisjordanie, au plus grand bénéfice des colons israéliens qui y sont installés.

Poutine a également contribué à la campagne de Nétanayahou en lui remettant en grande pompe le corps d'un soldat israélien, Zachary Baumel, disparu en 1982 lors d'un accrochage avec l'armée syrienne. La cérémonie s'est tenue à Moscou le 4 avril, soit cinq avant le scrutin, indiquant clairement le soutien du régime russe à Nétanayahou.

La réélection de Nétanayahou constituerait une catastrophe pour la société israélienne, les Palestiniens et pour l'avenir du Moyen-Orient ( voir ci-dessous) 

Memorial 98


 

12 mars 2019

Nétanayahou accentue sa propagande contre les "Arabes" citoyens israéliens en utilisant la loi sur l'Etat-nation qu'il a fait voter récemment ( voir ci-dessous). Il les désigne clairement comme citoyens de seconde zone , avec de graves allusions au fait qu'ils disposent "d'autres États"  dans les pays voisins.
Il répond ainsi aux très populaires artistes Rotem Selah et Gal Gadot qui ont affirmé contre lui que l’État d'Israël est l’État de tous ses citoyens, incluant évidemment la population arabe.
 Le premier ministre reprend la thématique de division et de haine qu'il avait déjà utilisé lors des précédentes élections en appelant au vote afin de contrer les "Arabes qui affluent vers les urnes". 
Le danger est grand de voir une coalition de droite, d'extrême-droite et d'intégristes religieux gagner le scrutin du 9 avril et reconduire une politique de discrimination permanente et de colonisation accrue.



 28 février 2019

A l'approche des élections législatives du 9 avril prochain, et alors qu'il est mis en examen pour corruption, Nétanayahou a franchi une étape supplémentaire vers l'extrême-droite, en se portant en appui du parti ouvertement raciste et fasciste "Otzmah Yehudit" .
Il a lui-même organisé la fusion électorale de ce parti, qui représente les héritiers du suprémaciste Meïr Kahane avec un autre parti de la droite radicale "Habaiyt Hayehudi" lui même affaibli par le départ de son fondateur Naftali Benett .

                 Les "chemises jaunes" des héritiers du fasciste Kahane

Sa démarche vise à assurer ainsi à ces deux partis de figurer dans le prochain parlement ( Knesseth), dont l'élection se fait à la proportionnelle intégrale mais avec une limite inférieure de 3,5% des suffrages qu'ils n'auraient pas atteint sans cette fusion. Il prévoit également d'attribuer des ministères à ce regroupement, s'il gagne les élections et forme le prochain gouvernement. 
Cette implication provoque un énorme scandale en Israël dans les communautés juives. Toutes les grandes institutions du judaïsme américain ont vivement protesté contre cette tentative d'intégrer des partis ouvertement racistes et suprémacistes dans une majorité parlementaire. 
Le parti de Kahane, dénommé Kach, avait été interdit de se présenter aux élections israéliennes à partir de 1988, en raison de son programme raciste, puis mis hors la loi en 1994 en Israël comme aux USA.



Memorial 98


Nétanayahou accueille en grande pompe l’ultra-réactionnaire Viktor Orban le jour où il fait lui-même voter une loi qui officialise les discriminations contre la minorité arabe d’Israël.
Viktor Orban a été précédé le 10 juin à Jérusalem par le chancelier autrichien, Sebastian Kurz, qui se trouve à la tête d’une coalition avec la formation d’extrême-droite Parti de la liberté d’Autriche (FPÖ). Or malgré les déclarations lénifiantes de Kurz, le parti FPÖ est truffé d’antisémites qui ne se gênent pas pour agir.
Un nouveau scandale vient d’ailleurs d’éclater à ce sujet : le gouvernement régional du Land de Basse-Autriche, qui entoure Vienne, veut établir des fichiers nominaux de Juifs autorisés à manger cacher. Idem pour le hallal. Cela provient de la volonté d’un ministre issu du Parti de la liberté (FPÖ, extrême droite) du Land de limiter considérablement les méthodes d’abattage religieuses.
Face au gouvernement antisémite du PiS polonais, Nétanyahou a fait preuve de la même complaisance.  Ainsi une loi « mémorielle »  adoptée par le Parlement à Varsovie fin janvier  a provoqué un scandale international. Le texte prévoyait jusqu’à trois ans de prison pour « l’attribution à la nation ou à l’Etat polonais, en dépit des faits, de crimes contre l’humanité » dans le contexte de la seconde guerre mondiale.
Ce délit a été finalement abandonné sous sa forme pénale, mais reste ouvert à des plaintes civiles issues des organisations nationalistes polonaises. Malgré cela,  Nétanyahou a accepté le 27 juin  une déclaration commune israélo-polonaise qui était marquée, selon le mémorial de la Shoah de Jérusalem, Yad Vashem, par « des erreurs graves et des tromperies ».  Elle représente les Polonais en héros ou en victimes, minimisant leur participation aux crimes contre les Juifs et renvoie dos à dos l’antisémitisme et un prétendu « anti-polonisme ». Le grand chercheur sur la Shoah, qui fait autorité en la matière, le Pr Yehouda Bauer, a vivement condamné cette déclaration qui représente selon lui une « trahison » des victimes de la Shoah en Pologne.
Georges Soros, un ennemi commun
Avant l’arrivée de Nétanyahou à Budapest  en juin 2017, Viktor Orban avait qualifié l’ancien dictateur hongrois Miklos Horthy  d’« homme d’Etat exceptionnel »
Celui qui a été « régent » dictatorial de la Hongrie de 1920 à 1944 a promulgué des lois anti-juives dès 1920 et c’est sous sa surveillance que plus d’un demi-million de Juifs hongrois ont été déportés et exterminés à Auschwitz  en quelques mois en 1944. 
La déportation des juifs de Hongrie débuta à la mi-mai 1944 alors que Horthy était toujours au pouvoir, après l'entrée des troupes allemandes dans le pays le 19 Mars.
La police hongroise procéda aux rafles et fit monter les Juifs dans les 145 trains qui les menèrent principalement à Auschwitz. Adolf Eichmann veillait sur place à l’exécution de la déportation.
Ils y furent immédiatement massacrés dans les chambres à gaz. En moins de deux mois 440 000 furent déportés. Horthy attendit le 7 juillet pour ordonner la fin des déportations, alors que la défait allemande s'approchait à grands pas et qu'il négociait avec les troupes soviétiques.
Il a souvent été comparé à un  Pétain hongrois
                                                Miklos Horthy et Hitler en 1938
Devant Nétanyahou, Orban avait assuré à l’époque que la Hongrie aurait une «  tolérance zéro envers l’antisémitisme ». Au même moment exactement, il  poursuivait une campagne d’affichage antisémite contre le milliardaire philanthrope George Soros, qui a consacré des fonds considérables depuis la chute du du Mur de Berlin en soutien aux sociétés civiles d’Europe orientale.
Viktor Orban a désigné ce dernier comme le suppôt caché de la cause des migrants, le bouc émissaire de sa politique nationaliste. Cela n’a nullement dérangé le premier ministre israélien. Bien au contraire : il partage l’aversion de son homologue, qui est aussi celle d’Etats autoritaires comme la Russie.
C’est en effet Orban qui a fait connaître vraiment la campagne contre Soros, reprise depuis par les  racistes du monde entier.
Cette  campagne mettait  en cause George Soros, philanthrope américain d’origine hongroise et juive, l’accusant de vouloir utiliser sa fortune et les ONG qu’il soutient pour « installer un million de migrants » en Hongrie et dans l’Union européenne. 
  
Soros est la cible de tous les fascistes, complotistes et antisémites à travers le monde, en raison de son appui matériel à des ONG de défense de la démocratie, de défense des migrants, des Roms et d’autres causes du même ordre.

Le pouvoir hongrois de Viktor Orban a été particulièrement violent à son égard, ainsi que l’indiquait le quotidien pro-gouvernemental hongrois « Magyar Idők », selon lequel George Soros serait à l’origine de tous les maux liés à l’Union européenne :  :«Il faut voir les choses en face : Le véritable président de la Commission européenne n'est autre que George Soros. Ce dernier a véritablement phagocyté l'Union européenne. Jean-Claude Juncker n’est qu’une marionnette de cette sombre figure qui tire les ficelles en coulisses. Les décisions prises par l’Union européenne et toutes les institutions doivent désormais plaire à ce vieillard infiniment malveillant, richissime et hargneux … »   
A l’initiative du gouvernement des affiches ont été collées un peu partout dans le pays avec la mention : « Ne laissez pas Soros rire et avoir le dernier mot »



                                       Les affiches anti-Soros

Certaines sont collées sur le sol des trams et des trains, pour que les passagers le piétinent. Les responsables du judaïsme hongrois constatent qu’il s’agit là d’une  campagne antisémite. Sur certaines photos on trouve des graffitis: « sale juif ». 
Andras Heisler,  président de la principale organisation juive de Hongrie, Mazsihisz, avait exigé le retrait immédiat  de ces affiches car « elles attisent l’antisémitisme ». A sa demande l’ambassadeur d’Israël, Yossi Amrani a publié dans un premier temps un communiqué validé par le ministère israélien des Affaires étrangères et  déclarant notamment  « . En ce moment, au-delà de la critique politique d’une certaine personne, la campagne évoque non seulement de tristes souvenirs mais aussi la haine et la peur. » la réponse d’Orban a été négative.
Contredisant la déclaration de l’ambassadeur Netanyahu a fait publier un nouveau communiqué annulant de fait  le texte: « Israël déplore toute expression d’antisémitisme dans un pays quel qu’il soit et soutient les communautés juives partout où elles confrontent la haine. C’était le seul but du communiqué publié par l’ambassadeur d’Israël en Hongrie. Ce texte n’était nullement destiné à délégitimer les critiques formulées à l’encontre de Georges Soros, qui continuellement sape le gouvernement démocratiquement élu d’Israël en finançant des organisations qui diffament l’état juif et cherchent à lui nier le droit de se défendre »
En effet Soros finance également des ONG de défense des droits de l’homme,  qui critiquent les conséquences de l’occupation israélienne des territoires palestiniens. Il y a donc complaisance coupable de Netanayahu à l'égard d'Orban, alors que  ce dernier favorise les campagnes antisémites et compte dans son entourage de nombreux négationnistes, dans un pays qui a vu sa population juive exterminée en quelques mois en 1944
Netanayahu est un récidiviste : il avait déjà commis des déclarations mensongères atténuant la responsabilité des nazis dans la Shoah etla reportant sur le Mufti de Jérusalem.
    
Puis en février dernier, Nétanyahou a prétendu que M. Soros finançait les campagnes de protestation contre l’expulsion d’Israël  des réfugiés d’Erythrée et du Soudan vers des « pays tiers » africains. Le milliardaire est devenu l’incarnation du « complot immigrationniste » y compris au de la droite en Israël. 

En campagne pour sa réélection en vue des législatives du 8 avril 2018 ,  Orban a  redoublé le 15 mars  dernier ses propos à caractère antisémite et complotiste. C’était à l’occasion de la fête nationale, marquant le 170anniversaire de la révolution d’indépendance hongroise (1848).
Devant plusieurs dizaines de milliers de personnes, il a repris à son compte les théories du complot : « Ce n’est pas contre nos partis d’opposition anémiés que nous devons lutter, mais contre un réseau international structuré en empire, a-t-il affirmé. Contre des médias entretenus par des groupes étrangers et des oligarques de l’intérieur (…), contre le réseau des ONG financées par les spéculateurs internationaux, englobé et incarné dans la personne de George Soros. »
Selon lui, ce milliardaire juif américain d’origine hongroise organiserait ce que l’extrême droite appelle le « grand remplacement » des populations européennes, avec l’aide de la Commission européenne (dirigée par un membre du PPE, Jean-Claude Juncker). « Si nous laissons faire, sur les deux décennies à venir, des dizaines de millions de migrants prendront la route de l’Europe à partir de l’Afrique et du Proche-Orient. La partie occidentale de l’Europe regarde tout cela les bras croisés (…). Les jeunes d’Europe occidentale connaîtront le jour où ils se retrouveront en minorité dans leur propre pays. »
Hors de l’UE, Orban cite notamment comme « camarades de combat » les Etats-Unis, qui ont « élu un président hostile à l’immigration »
Le ton a des relents antisémites des années 1930 : « Nous avons affaire à un adversaire qui est différent de nous. Il n’agit pas ouvertement, mais caché, il n’est pas droit, mais tortueux, il n’est pas honnête, mais sournois, il n’est pas national, mais international, il ne croit pas dans le travail, mais spécule avec l’argent, il n’a pas de patrie parce qu’il croit que le monde entier est à lui (…). Nous avons fini par renvoyer chez eux le sultan et ses janissaires, l’empereur Habsbourg et ses fidèles, les soviets et leurs camarades, et maintenant nous allons en faire autant avec l’Oncle George et son réseau. S’il te plaît, retourne en Amérique et occupe-toi plutôt du bonheur des Américains. »

En France, c’est «  Valeurs Actuelles » qui a relayé cette campagne  le 9 mai dernier, au lendemain de l’anniversaire de la capitulation nazie, en titrant sur le « complot de Soros contre la France » 



c’est par une diatribe anti-Soros que Matteo Salvini s’est défendu le 12 juin à la télévision, en pleine crise née de son refus d’accueillir l’Aquarius dans les ports italiens «« Ils financent les ONG, c’est une réalité ! Soros rêve d’une Europe pleine d’immigrés » L’argument est un joker qu’il n’hésite pas à jouer chaque fois que ses détracteurs tentent de le prendre par les sentiments. Derrière SOS Méditerranée ou les autres ONG qui viennent au secours des migrants se cacherait en réalité George Soros.  

Une loi discriminatoire 
Nétanyahou  se place dans ce courant et vient encore de le prouver en faisant adopter une loi fondamentale dite « Loi de l’État-nation » qui bafoue les droits de la minorité arabe. Celle-ci  compte 20% de la population dans les frontières de 1967, en dehors même des territoires occupés. L’un des point les plus graves concerne le statut de la langue arabe, qui est dégradé vis à vis de l’hébreu. Elle n’est plus comme auparavant  langue d’État , au même titre que l’hébreu, mais se voit promettre un vague « statut spécial ». Cette nouvelle Loi fondamentale  favorise exclusivement  « le développement des communautés juives », considérées comme « valeur nationale ». Elle affirme que l’État « agira pour encourager et promouvoir leur établissement et leur consolidation ».
La formulation initiale de cet article prévoyait la possibilité d’établir des communautés uniquement réservées aux Juifs. Elle avait provoqué de vives critiques de la part du procureur général et de nombreux autres juristes s’émouvant de l’institutionnalisation de la discrimination contre les Arabes. Le président de l’État  Réouven Rivlin, dans une démarche rare, avait même pris la plume pour alerter les députés en écrivant:
« Regardez la société israélienne et demandez-vous : au nom de la vision sioniste, sommes-nous prêts à soutenir la discrimination et l’exclusion d’hommes et de femmes sur la base de leur origine ethnique ? »
Le mot démocratie est absent de la Loi fondamentale. Mais c’est surtout l’inégalité entre citoyens qui est fustigée par ses critiques. Un seul député du Likoud, Benny Begin, fils de l’ancien premier ministre et dirigeant historique de la droite Menahem Begin a exprimé de vives réserves et s’est abstenu au moment du vote. « Un patriotisme qui n’est pas associé aux droits de l’homme dégénère en nationalisme », a-t-il averti.
La nouvelle loi adoptée rompt avec la déclaration d’indépendance d’Israël de 1948, sur « la fondation de l’État juif dans le pays d’Israël »,  et était bien plus ouverte dans ses formulations. Il y était notamment écrit ceci, au sujet de l’égalité des droits entre tous ses citoyens :
« L’État d’Israël sera ouvert à l’immigration des juifs de tous les pays où ils sont dispersés ; il développera le pays au bénéfice de tous ses habitants ; il sera fondé sur les principes de liberté, de justice et de paix enseignés par les prophètes d’Israël ; il assurera une complète égalité de droits sociaux et politiques à tous ses citoyens, sans distinction de croyance, de race ou de sexe ; il garantira la pleine liberté de conscience, de culte, d’éducation et de culture ; il assurera la sauvegarde et l’inviolabilité des Lieux saints et des sanctuaires de toutes les religions et respectera les principes de la Charte des Nations unies. »

La loi n’a été adoptée au Parlement que par 62 voix contre 55 mais elle va entraîner des conséquences graves en renforçant les discriminations et le nationalisme le plus agressif. La coalition d'extrême-droite qui gouverne Israël porte une responsabilité historique dans cette dérive.

AH 


Mise à jour du 18 mars 2019:

La Cour suprême d'Israël a décidé d'interdire la participation aux élections législatives de Mihaël Ben Ari, dirigeant du parti  d'extrême-droite "Otzmah Yehudit" ( voir-ci-dessous) et ancien député. La cour se prononce ainsi contre l'avis de la Commission électorale centrale, qui l'avait validé. Il est éliminé en raison de ses déclarations ouvertement racistes à l'égard des Arabes israéliens. 

C'est une décision positive bien que partielle, car son parti est lui-même autorisé à participer au scrutin.
Une autre décision positive de la Cour consiste à autoriser une liste de citoyens arabes incluant le parti Bala'd, souvent mis en cause par le pouvoir en place, ainsi que le candidat du parti communiste Cassif, également attaqué.
Ces choix montrent l’importance de la Cour suprême, gardienne de certains principes démocratiques. C'est d'ailleurs pour cette raison que toute la droite et l'extrême-droite cherchent à réduire voir à supprimer son pouvoir. 

MEMORIAL 98




Mise à jour du 31 aout 2018: 

Après Orban,Nétanyahou se prépare à accueillir en grande pompe le président philippin Dutertre, qui mène une politique d’assassinat d'usagers de drogues et qui bafoue quotidiennement les droits de l'homme dans son pays. 

 Ce démagogue avait revendiqué en 2016 sa proximité avec le nazisme en déclarant 
 « Hitler a exterminé trois millions de Juifs. Aujourd’hui, il y a trois millions de toxicomanes [aux Philippines]. Je serais heureux de les exterminer. Au moins, si l’Allemagne a eu Hitler, les Philippines m’auront, moi."
Face au scandale international, il avait du retirer son propos et s'excuser. Sa visite prévue au mémorial de la Shoah de Jérusalem ( Yad Vash'em) constitue une profanation et une une injure aux victimes du nazisme.  Sa venue provoque des protestations en Israël. Celles-ci vont certainement s'intensifier avec la dernière déclaration en date de Duterte justifiant le viol des femmes par leur beauté ( !) 

Memorial 98

Mise à jour du 8 aout 2018:
Un débat spécial a eu lieu le 8 aout  au Parlement israélien à propos de la loi raciste "État-Nation", sur décision de l'opposition et comme le permettent les règles de la Knesset. Netanayahou a boycotté ce débat. Des militants du parti de centre-gauche Camp sioniste ont déployé et brandi la déclaration d'indépendance d'Israël de 1948  qui stipule que l’État assurera une complète égalité de droits sociaux et politiques à tous ses citoyens, sans distinction de croyance, de race ou de sexe ..."  en contradiction avec le texte récemment adopté  ( voir ci-dessous l’analyse de cette loi discriminatoire). Le combat se poursuit



Memorial 98
Mise à jour du 4 aout 2018: 

Immense manifestation de protestation contre la loi raciste. Des dizaines de milliers de personnes, dont de nombreux Druzes, se sont rassemblés sur la place Rabin à Tel-Aviv.
 La revendication centrale était l'exigence d'égalité: en hébreu. "Shivion"  



Mise à jour du  28 juillet: mobilisations en série contre la loi raciste.

Après l'adoption précipitée de la dite « Loi de l’État-nation » qui bafoue notamment les droits de la minorité arabe, des protestations émergent dans différents secteurs: dans la population arabe druze particulièrement impliquée dans l'armée de métier et la police israéliennes et qui se sent renvoyée à un statut inférieur et dans de larges secteurs de la société civile. Du coup certains ministres membres de la coalition dont le ministre des Finances Kahlon reviennent sur leur soutien à ce texte. Un député arabe membre du parti travailliste, Zoheir Bahloul, vient de démissionner du parlement afin de protester. 
                                        Députés arabes déchirant le projet de loi

Ces derniers jours on assiste aussi à des mobilisations des LGBT victimes de discriminations dans l'accès à la GPA, légalisée pour les femmes souffrant de stérilité mais pas pour les gays en raison de l'opposition des religieux intégristes.. Soixante mille personnes ont manifesté dans ce cadre.
Cette accumulation de protestations n'en est sans doute qu'à son début ( voir ci-dessus l'analyse de la loi)



MEMORIAL 98