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lundi 25 janvier 2016

Radicalisation : les néo-nazis armés désormais présentés comme des victimes.

La banalisation du néo-nazi ordinaire vient de passer un nouveau cap ce week-end: le voici devenu dans les médias " riverain excédés" .

Gaël et David sont deux militants calaisiens de l'extrême-droite la plus fanatique et la plus assumée: sur le profil Facebook du père et du fils que des militants antifascistes ont trouvé en quelques clicks, les deux compères affichent leurs tatouages "runiques" et leurs drapeaux nazis ( photo du fils ci-jointe).Comme le dit benoîtement l'un des deux aux journalistes, "ils sont de toutes les manifs". Avec leur Kamarade Kevin Rèche, fondateur du groupe fasciste " Sauvons Calais", et lui même tatoué de symboles nazis.
Ce sont aussi des militants armés. Qui, samedi ont sorti leur fusil et visé ostensiblement des migrants et leurs soutiens qui manifestaient. S'ils n'étaient pas néo-nazis, on les eût facilement, en cette période d'état d'urgence, qualifiés de terroristes. Ils auraient sans nul doute passé les dernières quarante-huit heures en garde à vue et les mois suivants en prison.

En lieu et place, ils se répandent comme "victimes" dans les médias, qui font la publicité de leur page de soutien , relayée sur le site de Soral "Égalité et Réconciliation" et sur Fdesouche. Page, qui pour d'autres que des néo-nazis aurait sans doute valu une inculpation pour "apologie du terrorisme" à ses auteurs et aurait été fermée sur ordre du Ministère de l'Intérieur. On notera d'ailleurs que parmi les premiers et actifs soutiens des néo-nazis au fusil, l'on trouve Damien Rieu, de "Génération Identitaire", jamais condamné à ce jour pour l'attaque contre la mosquée de Poitiers, et dont les troupes ont attaqué un centre d'accueil des réfugiés l'automne dernier, en région parisienne.

Mais que les antiracistes s'estiment heureux, la police a tout de même confisqué l'arme.

Cela ne chagrinera pas la mouvance calaisienne néo-nazie outre mesure. Il suffit de compter le nombre d'opérations commando menées par des hommes cagoulés contre les migrants, ces ratonnades de nuit qui durent depuis des mois, sans que jamais on n'en retrouve les auteurs. Il suffit de regarder ces vidéos diffusées par des militants antiracistes, qui montrent les milices d'extrême-droite intervenir aux côtés de la police lors d'opérations répressives dans les bidonvilles où survivent des femmes, des hommes, des enfants traités comme des sous-hommes. Un fusil de plus ou de moins, ce n'est pas grand-chose pour cette mouvance là.

Surtout quand exhiber ce fusil aura permis de susciter la compassion médiatique, et donc une immense victoire politique: lorsque le néo-nazi devient voisin légitimement exaspéré, il sait que ses cibles peuvent trembler, car elles sont désormais laissées à sa vindicte, en toute impunité.

Et puis les armes, elles tournent, dans cette mouvance là, à peu près tranquillement. Quelques affaires émergent parfois, comme des exceptions qui confirment la règle de l'impunité. Ainsi, pour donner une caution de gauche à l'état d'urgence, le Ministère de l'Intérieur a-t-il fait bruyamment et administrativement Christophe Lavigne et son père, deux autres néo-nazis, qui avaient à leur domicile 200 Kilos de munitions. Mais ces munitions, Lavigne n'aurait jamais du pouvoir les collecter en paix, et si les services de renseignement ont besoin de l'état d'urgence pour les confisquer, c'est bien, qu'en temps ordinaire, rien n'est fait contre les terroristes d'extrême-droite: car Lavigne était parfaitement connu. Interpellé pour un projet d'attentat contre la mosquée de Vénissieux, la veille de passer à l'acte, il a obtenu une relaxe, bien qu'il ait été reconnu coupable de l'incendie de la mosquée de Libourne. Ce qui attestait de sa capacité d'aller jusqu'au bout de ses idées.

Quant à Claude Hermant, compagnon de route de Serge Ayoub, militant historique de l'extrême-droite extra-parlementaire, il aura manifestement pu trafiquer des armes en toute impunité pendant des années avant d'être enfin interpellé. Un de ses derniers marchés a consisté à procurer les armes qui ont servi à Amedi Coulibaly pour les attentats de l'Hypercacher et de Montrouge.

A Reims, c'est un trafic d'armes animé par des notables locaux et un ancien candidat du FN qui a été mis à jour

De même, juste après les attentats de novembre, Enis se faisait tirer dessus par trois individus, à la sortie d'un kebab à Cambrai, dont l'un se suicidera après son acte: des néo-nazis, encore, et une tentative d'assassinat qui n'a pas fait couler beaucoup d'encre.

Toutes ces affaires jusqu'ici étaient évoquées par les médias en mode "fait divers": jamais d'enquête fouillée sur les liens entre elle et leurs auteurs, jamais de détails sur la mouvance auquels il appartiennent et leur degré d'engagement. Jamais d'interrogations sociologiques, jamais de mise en cause de l'extrême-droite parlementaire et du FN. Pourtant, il ne faut pas chercher bien loin les amis des néo-nazis: un des assistants parlementaires de Marion Maréchal Le Pen a du reconnaître récemment avoir aidé l'un d'eux en fuite après des tabassages il y a quelques années. Imagine-t-on le scandale qu'aurait déclenché le soutien de n'importe quel député à un militant même peu actif de l'intégrisme musulman ?

Avec l'affaire de Calais, la banalisation vient de franchir un nouveau cap, puisque désormais des néo-nazis armés sont présentés comme des victimes.

Ce n'est pas autre chose qu'un encouragement à aller plus loin,très vite. D'ailleurs , les néo-nazis ne s'y trompent pas qui, dressent des listes de militants antifascistes à attaquer sur leurs forums. En toute quiétude une fois encore.

Ils ont bien raison: il y a quelques temps, Memorial 98 avait écrit au Délégué Interministériel au Racisme et à l'antisémitisme, pour lui signaler une page ouverte contre l'accueil des migrants à Sernent. Sur cette page, des commentaires négationnistes, des appels au meurtre et au tabassage cohabitaient avec la dénonciation nominative d'habitants du village soutenant le projet d'accueil des migrants. Parmi les néo-nazis qui s'exprimaient sur ce forum, ceux d'ADSAV, : ceux-là même qui avaient été autorisés à manifester en Bretagne le lendemain de la proclamation de l'état d'urgence , et avaient à cette occasion paisiblement ratonné dans les rues. Ils ont recommencé à Quimper ce week-end, s'attaquant en bande à des militants antiracistes. Ils auraient eu tort de se priver puisque personne ne les en empêche.

On pourrait conclure en disant que les politiques et les médias regretteront leur passivité le jour où il y aura des morts. Mais Clément Méric a été tué par des néo-nazis qui sont aujourd'hui en liberté dans l'attente d'un procès dont plus personne ne parle et des torrents de boue ont été déversés sur sa mémoire dès le lendemain de sa mort, où les chaînes d'info ont invité Serge Ayoub en direct pour déverser sa haine.

Finalement, il y aura bien eu un procès aujourd'hui à Calais: celui des migrants et de leurs soutiens arrêtés pour avoir symboliquement occupé un ferry.

Et sans doute la seule note d'espoir est-elle l'existence de ces militantEs extraordinaires, migrants des bidonvilles et leurs soutiens qui agissent sans trève depuis des années, malgré l'effroyable répression dont ils sont victimes, malgré les tonnes de boue que les médias et les politiques déversent à leur encontre.

"No border", disent-ils , et simplement le dire expose à tous les dangers dans un pays où les apprentis-terroristes néo-nazis agissent en toute liberté, tandis que le gouvernement frappe ceux qui les combattent et défendent des valeurs de gauche.

Contre le terrorisme d'extrême-droite, la voix antiraciste est bien seule, mais elle est là, en actes, à soutenir et à relayer.

mardi 16 juin 2015

Reims: notables néo-nazis, champagne et trafic d'armes à l'ombre du FN

Lors des dernières élections municipales de 2014 à Reims, Thierry Maillard, candidat d'extrême-droite et libraire, proposait dans son programme de multiplier par cinq les effectifs de la police municipale locale et même de créer une brigade équestre contre l'"insécurité galopante".

Un an plus tard, c'est lui qui est interpellé pour trafic d'armes avec cinq de ses kamarades. Les dits camarades ne sont pas de jeunes chômeurs mais des notables de la région, vignerons et commerçants.

Thierry Maillard est en effet une figure assez intéressante du fascisme ordinaire, qui rompt avec les clichés médiatiques sur les néo-nazis qui ne seraient que de "jeunes paumés marginalisés". Certes il a sa petite troupe de jeunes nervis avec lesquels il défile parfois dans les rues de Reims, avec des drapeaux à l'effigie de la croix celtique. Certes, c'est un proche de Serge Ayoub, comme lui pro-Poutine. 

Mais c'est aussi un homme très bien intégré dans le tissu de la bourgeoisie locale. A l'aune des révélations faites aujourd'hui sur le trafic d'armes, on relira avec intérêt un article de Libération daté de 2010, à une époque où le FN se préparait à élire Marine Le Pen comme présidente. Les médias présentaient alors cette élection comme une profonde mutation. Dans la brasserie où il est interrogé par le journal, Maillard est mis en scène avec toutes sortes de rémois respectables: négociants en vins, pimpants représentants de divers commerces de bouche, patrons de PME locales, la plupart se présentant comme d'ex-sarkozystes. Aux cantonales suivantes de 2011, porté par son réseau de la bourgeoisie locale, Maillard arrive en tête au 1er tour et fait 45% au second tour.

La presse le présente aujourd'hui comme "exclu" du FN pour avoir en 2011 toujours, pour avoir publié une affiche reprenant de la propagande visuelle des Jeunesses Hitlériennes. Mais la réalité est un peu plus complexe que cela.

En effet, à la suite de la polémique suscitée par cette affiche, Maillard a bien été exclu du Front National... mais pour quatre mois seulement, comme le rappelle un article de 2012 de la presse locale. Cette exclusion minimale éclaire la stratégie de prétendue dédiabolisation de l'époque: dans ces années là, à chaque fois qu'un membre du FN est mis en cause pour ses sympathies néo-nazies, Marine Le Pen condamne et gesticule devant les médias ravis, qui constatent que le FN "rompt avec ses vieux démons". En réalité les exclusions sont temporaires, mais suffisantes médiatiquement, puisque l'immédiateté de l'actualité l'emporte sur le suivi et les enquêtes de fond.

En réalité, Maillard a quitté le FN de son propre chef et dans des circonstances qui démontrent qu'il n'y a pas les vilains néo-nazis d'un côté et le respectable FN de l'autre. En effet, c'est avant les législatives de 2012, que Maillard et ses amis officialisent la rupture. Ils estiment alors  que les investitures locales sont tronquées, et qu'il est suicidaire pour le FN de présenter Pascal Erre, dont le fils a fait les gros titres de la presse locale.....pour ses tatouages à la gloire du national-socialisme. Ce sont donc des affrontements de pouvoir qui opposent Maillard, longtemps membre de l'Oeuvre Française et la famille Erre et son rejeton néo-nazi, pas des questions de fond. 

 C'est à la suite de cet affrontement que Maillard, n'ayant pas obtenu l'investiture aux législatives, quitte le FN de son propre chef pour monter son propre groupe "Reims fait Front". 

Il n'en reste pas moins un représentant assez typique de l'extrême-droite française avec son réseau de commerçants et de chefs d'entreprise, et sa violence assumée. Au fil des dépêches de presse locales, on entend parler de Maillard lorsqu'il met son poing dans la figure d'un élu PS en le traitant de "sale PD", ou lorsqu'il comparaît pour outrage après avoir traité une fonctionnaire de la sous-préfecture de "grosse pute". 

Après l'interpellation et l'incarcération dans le Nord de Claude Hermant, ancien membre du DPS ( le service d'ordre du FN) et probable indicateur de police, les arrestations de Maillard et de ses amis , de nouveau pour trafic d'armes dessinent  l'ombre inquiétante d'une active mouvance néo-nazie. Celle-ci, loin de la marginalité souvent mise en avant est plutôt bien intégrée, non seulement dans la sphère de l'extrême-droite parlementaire, mais également dans la société.

Car Thierry Maillard n'était pas un marginal conspué et ostracisé, mais un homme qui il y a à peine cinq ans a manqué de 5% la victoire à une élection locale, en tant que  candidat d'un parti (le FN) désormais intégré dans le jeu démocratique.

MEMORIAL 98

samedi 16 mai 2015

Néo-nazisme: la radicalisation terroriste se confirme partout en Europe

 











Actualisation du 17 juin 2016 :

L'assassin présumé de la députée britannique Jo Cox , Thomas Mair , était un soutien de longue date de la National Alliance, principale organisation néo-nazie aux Etats-Unis, selon le très sérieux  Southern Poverty Law Center (SPLC), institut américain dédié à la surveillance des mouvements extrémistes  aux USA.
Le SPLC a publié sur son site deux factures au nom de Thomas Mair datant de 2003, pour l’achat de plusieurs publications de la NA, dont un manuel destiné à la confection d’armes artisanales (chimie des poudres et explosifs, manuel des munitions improvisées, etc). 

Mair était aussi l'un des premiers abonnés à S. A. Patriot, revue sud-africaine d'un mouvement suprématiste blanc,  pro-apartheid ouvertement opposé aux «sociétés multiculturelles» et à «l'expansion de l'Islam»

D’autres cas de violences homicides néo-nazies ont eu lieu récemment en Grande-Bretagne et ont rencontré un très faible écho médiatique, comme dans le cas du docteur Sarandev Bhambra attaqué à la machette en janvier 2014. 

Memorial 98 

 En France, un silence troublé seulement par quelques dépêches de presse assez lapidaires  entoure les suites des arrestations menées en Picardie, à Ham, contre un  groupe néo-nazi, le White Wolf Klan. Treize nouvelles mises en examen pour violences volontaires entre les membres même du groupe viennent d'être annoncées, mais on ne sait toujours pas qui était visé par la tentative d'homicide volontaire pour laquelle ils ont été interpellés initialement.
Aucun lien n'est fait dans la presse entre cette affaire et celle du réseau  du néo-nazi Claude Hermant, arrêté il y a quelques semaines et qui  a décidé de parler. L'ancien membre du DPS (service d'ordre du Front National) prétend être un informateur policier. Il déclare avoir, dans ce cadre, informé ses référents du trafic d'armes qu'il menait depuis longtemps et qui pourrait avoir notamment avoir alimenté le réseau du tueur antisémite Amedy Coulibaly (Hyper Cacher de Vincennes). Si les dires de cet ancien barbouze sont à prendre avec précaution, ils décrivent cependant une situation assez semblable à celle qui a conduit la NSU, groupe néo-nazi allemand à pouvoir commettre une dizaine d'assassinats au moins, sans être inquiété, alors qu'il s'agissait de militants identifiés dès la fin des années 90 comme potentiellement violents.

En Allemagne d'ailleurs, d'autres groupes similaires sont actifs sur le territoire.
Le 6 mai 2015, plusieurs membres d'une organisation terroriste néo-nazie ont été interpellés dans ce pays. La police indique qu'ils projetaient des attentats contre des lieux de cultes musulmans et des centres accueillant des réfugiés. Ces attentats  auraient sans doute été meurtriers, au vu du matériel explosif puissant retrouvé aux domiciles des présumés terroristes.

Au Royaume Uni, se tient en ce moment le procès d'un suprémaciste blanc, soupçonné d'avoir voulu assassiner plusieurs membres de la famille royale. Il revendique son admiration pour le norvégien Andreas Breivik et avait développé une obsession raciale mortifère contre les bruns aux yeux noirs, selon lui signes du métissage conduisant la race blanche au déclin.

Le terrorisme d'extrême-droite est une réalité bien vivante en Europe: mais sans même se pencher sur l'hypothèse malheureusement crédible de certaines complaisances policières envers cette mouvance, on doit constater une très grande indifférence sociale à ce phénomène.

Celle-ci est a été relevée récemment par l'étude d'une entreprise privée de sécurité suisse qui met en lumière des éléments parlants sur le terrorisme néo-nazi en Allemagne: contrairement à d'autres formes de terrorisme, la violence d'extrême-droite n'est pas l'objet de beaucoup de recherches scientifiques d'ampleur. Les faits existants ne sont donc que rarement reliés entre eux alors même que des facteurs communs relient les agissements des activistes violents de cette mouvance.

Cette étude met notamment en relief plusieurs points communs.

Les groupes terroristes néo-nazis sont le plus souvent de petite taille , quelques individus pouvant commettre un nombre importants de crimes. Très souvent, ces groupes, voire individus ne revendiquent pas leurs actes, parce qu'ils estiment que le choix des cibles, dans l'immense majorité, des immigrés, des Juifs ou des militants de gauche parlent d'elles même, et que l'acte en lui même suffit à générer l'effet recherché, à savoir la terreur dans le groupe social visé.

Dans l'immense majorité des cas, également, le laps de temps entre la constitution du groupe et le passage à l'acte violent est très court, moins d'un an. Ce dernier élément suppose donc d'une part un conditionnement préalable très fort des individus concernés et correspond effectivement à l'ambiance des mouvances néo-nazies dans laquelle des jeunes gens vont se socialiser: l'univers  néo-nazi actuel offre en effet tout le panel d'une culture de mort et d'apologie de la terreur apte à radicaliser extrêmement rapidement les nouveaux adeptes. On notera également qu'un passage à l'acte aussi rapide après la constitution d'un groupe destiné à commettre des actes très violents suppose aussi l'accès à des connaissances et à des moyens matériels pour pouvoir agir. Si les groupes sont de petite taille, voire même parfois composés d'un seul individu, cela ne signifie donc nullement qu'ils correspondent au mythe des Loups Solitaires propagés par les médias: en effet, se procurer des armes et l'ensemble de la logistique permettant d'agir implique des inter-actions avec un milieu beaucoup plus large. 

Malheureusement, en France, pour le moment, l'analyse sociale, médiatique, scientifique, politique reste bien en deçà de ce qui pourrait permettre de comprendre et de combattre un phénomène dont tout montre, pourtant, qu'il est en plein développement. A commencer par l'explosion des actions de " basse intensité" commises par de très jeunes gens, notamment ce qu'on peut appeler les opérations "croix gammées": il ne se passe pas un mois, sans que dans les journaux locaux soient relatées la découverte dans de petites villes ou villages d'inscriptions néo-nazies recouvrant les murs . Ainsi, ce 15 mai, à Proyart, c'est le parvis de l’Église qui est maculé à la craie de croix gammées et de slogans xénophobes. Si les journaux sont prompts à se moquer de sigles souvent mal dessinés, de fautes d'orthographe dans les mots inscrits et si ces éléments indiquent souvent la très grande jeunesse des auteurs, cela rend la chose encore plus inquiétante. Ce "fait maison" maladroit des jeunes néo-nazis indique une volonté d'action autonome forte, malgré l'absence de moyens,  sans utiliser par exemple des affiches de groupes militants existants.

Cette volonté d'action s'exprime aussi dans les profanations de cimetières Juifs ou musulmans, le stade d'au dessus du passage à l'acte. Là aussi, le néo-nazi, généralement un peu plus âgé, se saisit finalement de ce qui est à sa portée immédiate pour exprimer concrètement sa haine, le stade suivant étant l'agression de personnes physiques. 

Si ces passages à l'acte peuvent paraître dérisoires et au fond très anecdotiques, des affaires comme celle de Ham montrent bien que leurs auteurs sont pourtant ceux qu'on va retrouver ensuite dans des groupes armés et prêts à passer à l'action: Jérémy Mourain, le principal animateur du White Wolf Klan a par exemple été condamné plusieurs fois pour des faits de ce genre.

Aussi, l'hypothèse selon laquelle ces actes seraient aussi des rituels de passage, des épreuves initiatiques permettant de "gagner la confiance" des militants plus vieux et plus expérimentés, ceux qui ont des armes, des réseaux et des potentiels matériels plus vastes, mériterait-elle d'être creusée. 

Malheureusement, dans le cas du néo-nazisme, il n'existe pas d'espaces d'études et de combat contre la radicalisation: pas de numéro à appeler si l'on trouve des portraits de Hitler sur le téléphone de son fils de 14 ans, pas d'étude des signes inquiétants chez l'adolescent, pas de structures de "déradicalisation". 

En réalité face aux jeunes militants néo-nazis, l'intervention étatique se divise en deux catégories , généralement selon la classe sociale de l'intéressé: les jeunes issus des classes populaires se faisant attraper suite à un acte violent passent en comparution immédiate et prennent des peines modérées mais incluant souvent quand même un passage par la case prison. Cela a été le cas par exemple, pour les jeunes gens qui ont tenté d'incendier récemment une mosquée à Mâcon. Quant à ceux qui sont issus de classes favorisées ou élèves de prestigieuses écoles militaires, la justice les  oriente généralement vers des procédures longues, pendant lesquelles les avocats de la défense auront largement le temps de créer les conditions d'un acquittement ou d'une peine symbolique. C'est par exemple, le cas des cadets  du lycée de l'Armée de l'air qui avaient aussi projeté un attentat contre une mosquée.

Le néo-nazisme violent dérange  : c'est un phénomène qui ne correspond pas au discours dominant sur ce que sont les tares de nos sociétés. Les discours violents contre l'immigration ou les musulmans, le repli nationaliste exacerbé sont tenues par des forces désormais intégrées au jeu politique et en pleine expansion, et s'intéresser au phénomène néo-nazi, c'est aussi regarder en face une des traductions concrètes de ces discours banalisés. 

Mais ce qu'on ne regarde pas continue à exister et à se développer.

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