lundi 26 août 2019

Yann Moix: une obsession antisémite qui vient de loin.


2 septembre 2019
Mensonges et complaisances: l'entreprise de sauvetage médiatique de Moix se poursuit.
Les éléments de langage sont calés et la séquence de communication bien rodée. Les conseillers en communications de crise et son éditeur Grasset ont travaillé frénétiquement. 
Du coup Moix et son réseau de soutien veulent en rester à la soirée du samedi 31 août sur ONPC.
 Ce soir là, grâce à la complaisance de Laurent Ruquier   et de Frantz-Olivier Giesbert, islamophobe de service, Moix a pu dérouler sans encombre son plaidoyer. Celui-ci tient en quelques éléments de langage que nous avons déjà relevés, mais qui sont maintenant systématisés: 
1) concernant sa revue Ushoahia , reconnaître uniquement des dessins, rebaptisés "BD" afin d'accentuer un aspect infantile. A l'inverse ne pas mentionner ses textes de l'époque.
2) jeter le trouble et le confusion sur ses rapports et collaborations avec des antisémites enragés, notamment sur les dates. Ainsi Moix dit qu'il a rompu avec Marc-Edouard Nabe en 2007 par un SMS injurieux. Mais c'est en 2007 également qu'il écrit une préface à une anthologie antisémite de Blanrue ( voir ci-dessous) 
3) prétendre qu'il était soumis à un chantage de ses amis négationnistes et antisémites qui connaissaient son passé et le "tenaient" . Il aurait donc été contraint de collaborer avec eux. De même la révélation de ses "dessins" antisémites de 1990 viendrait de ces milieux. Or c'est faux, car ses acolytes ne disposaient pas des exemplaires d' Ushoahia même s'ils en connaissaient l'existence. Ainsi le dénommé Nabe en fait mention dans un livre de 2017 Les Porcs ( ci-dessous) mais sans reproduire la revue, car elle n'est pas en sa possession

 4) Se vanter de sa qualité de "défenseur inconditionnel d'Israël" et du soutien indéfectible de Bernard-Henri Lévy. En réalité Moix ne défend pas l'existence d'Israël mais la politique de la droite extrême qui y est actuellement au pouvoir.
Il a ainsi déclaré sur ONPC qu'il avait publiquement approuvé la décision de Trump de déclarer Jérusalem capitale exclusive d'Israël et donc d'y transférer l'ambassade américaine. Cette décision, contraire à toutes les règles de droit international à propos de territoires occupés, constitue un cadeau de Trump, auteur lui même de nombreuses déclarations antisémites, à son ami Netanyahou

Après la pantalonnade de l'émission ONPC, Bernard-Henri Lévy a immédiatement publié sa déclaration de soutien, qui reprend les éléments de langage distillés par Moix 
On comprend dès lors que Moix et ses soutiens veuillent en rester là. C'est pourquoi ce dernier proclame que, ô sacrifice, il cesse la promotion de son livre 
Mais, malgré ces manœuvres et manipulations, la discussion et l'enquête publique doivent se poursuivre. Il faut aller au bout des mensonges et dissimulations. La lutte contre l'antisémitisme est une cause trop cruciale pour qu'elle puisse être soumise aux accommodements avec la vérité, l'"âpre vérité"
   
MEMORIAL 98   
  

Mise à jour du 31 août
Sur le plateau de l'émission ONPC diffusée ce jour Moix continue à louvoyer, à mentir et à minimiser ses amitiés et collaborations avec des antisémites enragés tels Nabe et Blanrue. Il "oublie " qu'il a préfacé l'anthologie antisémite de ce dernier (ci-dessous) en 2007 .

Sa ligne de défense est claire: d'une part reconnaître les faits les plus anciens  qu'il ne peut plus nier comme les dessins de la revue Ushoahia  qu'il choisit de renommer "bande dessinée" afin d'atténuer leur caractère d'extrême-violence.  et jeter la confusion sur le reste de ses activités beaucoup plus récentes.
 Sa tâche est facilitée par la complaisance de Laurent Ruquier qui l'avait choisi pour animer son émission et qui a par ailleurs invité dans son émission certains des copains de Moix dont Nabe. Ruquier plaide l'ignorance mais Moix ne peut pas y prétendre car il connaissait parfaitement  les positions de ses amis négationnistes et travaillait avec eux. 
Il faut maintenant que toute la vérité soit faite sur ce groupe de militants antisémites qui déversent depuis des années leur propagande nauséabonde. Notons ainsi que Soral condamné deux fois à un an de prison ferme pour ses publications négationnistes est toujours en liberté grâce à l'intervention du procureur de Paris.
Le privilège en matière de racisme et d'antisémitisme dont semblent jouir des "personnalités" et des écrivains (  tel Houellebecq récemment décoré de la Légion d'honneur par Macron mais également Zemmour  et également ...Hergé  ) ,  doit évidemment cesser.

Memorial 98 


Mise à jour du 29 août
Erreur de jeunesse comme le prétend Moix à propos de ses dessins et écrits négationnistes? Cette version est à nouveau démentie par une enquête du Monde qui montre qu'il a maintenu des amitiés très proches et des collaborations avec des auteurs antisémites enragés et revendiqués comme Nabe et Blanrue au moins jusqu'en 2013. Il avait alors 45 ans. C'est ce que nous montrions dès 2017 ( voir ci-dessous)

MEMORIAL 98

Yann Moix a ouvert une boite de Pandore en se présentant dans son livre Orléans comme la victime de ses parents violents. A cette occasion des pans entiers de son passé resurgissent.
C’est la cas de ses dessins et écrits ouvertement négationnistes et antisémites publiés dans une revue nommée Ushoahia ( délicate contraction de Shoah et Ushaia, ponctuée d'une étoile juive)  révélés par l’Express qui y a eu accès.
Selon sa tactique de défense habituelle, dans sa réponse à l’Express, Moix louvoie afin de se dédouaner. Il prétend d'abord qu’il a « seulement » réalisé des dessins (ci-dessous deux d’entre eux)  mais pas de textes. Or c’est bien son écriture qui figure sur ces textes ignobles. Ce mode de défense s'effondre face aux nouvelles révélations de l'Express qui prouvent qu'il est bien l'auteur des textes incriminés, contrairement à ce qu'il a d'abord prétendu. Moix est enfin de contrer de reconnaître dans Libération qu'il a lui-même écrit ces horreurs. Il se présente à nouveau en victime en déclarant: " Aujourd'hui, alors que ces dessins, ces textes sont ressortis, je me sens libre. Libéré de cette épée de Damoclès..." 

                                         Dessin de Moix à la Une de Ushoahia

Textes et dessins de Moix violemment négationnistes et antisémites dans la revue


Loin de se limiter à la période de cette revue des années 1990, comme le prétend Moix, sa proximité avec l’extrême-droite antisémite s’est prolongée pendant de longues années. C’est ce que Memorial 98 avait montré dès février 2017 (voir ici) 

En effet Yann Moix est un homme qui, tout au long de sa carrière, a très souvent croisé des membres des sphères antisémites et négationnistes les plus radicales, mais selon lui toujours malencontreusement, toujours "par hasard", toujours à l'insu de son plein gré .
                                Moix et Frédéric Chatillon

Ainsi en avril 2016, les sites d'extrême-droite antisémite s'amusent beaucoup en rediffusant un selfie de Frédéric Châtillon avec un Yann Moix souriant. Frédéric Châtillon est un des pivots qui relie le Front National, Marine Le Pen, et les mouvances soraliennes, dieudonnistes, et néo-nazies.
Ex- dirigeant du GUD, entrepreneur florissant, pro-Assad, violemment antisémite, Châtillon est  au cœur des enquêtes judiciaires qui secouent le FN. Il a joué un rôle central lors de la campagne présidentielle de Marine Le Pen en 2017.
                                          Frédéric Chatillon avec Dieudonné et Faurisson 

Que fait Yann Moix avec Frédéric Châtillon ? Rien, il l'a croisé « par hasard » à Rome et le fasciste a voulu faire un selfie avec lui. Yann Moix affirmait sur son compte Facebook avoir été piégé car il ne connaissait pas Châtillon.

Une explication plausible ? Pour d'autres oui, pour Yann Moix, elle pourrait sonner faux. 
                                        Soral, Nabe et Moix

En effet, ce n'est pas la première rencontre « accidentelle » de Yann Moix avec l'extrême-droite la plus assumée. Une autre au moins a été médiatisée : celle de sa signature en 2010, sur une pétition en faveur de Vincent Reynouard, néo-nazi et négationniste. La pétition fut initiée par Paul Eric Blanrue, figure des milieux d'extrême-droite et du royalisme depuis des dizaines d'années, hagiographe du négationniste Faurisson. L'immense majorité des signataires était issue des milieux fascistes les plus durs. Yann Moix qui s'affichait plus jeune avec Soral et l'écrivain antisémite Marc-Edouard Nabe avait certainement  déjà croisé une partie d'entre eux.

Là encore, Yann Moix affirmait s'être fait piéger. Il recourait pour l'occasion à une justification parfaitement ignoble : Paul Eric Blanrue lui aurait promis la signature de Robert Badinter, et finalement ce fut Robert Faurisson. Yann Moix s'appuie sur le fait que Badinter a toujours été contre la loi pénalisant le négationnisme pour expliquer sa « méprise ».

Or, qui peut penser que Robert Badinter aurait signé avec les négationnistes et les néo-nazis qui le poursuivent de leur haine depuis des années ? Moins de trois ans avant cette pétition, en 2007, Faurisson a ainsi osé traduire Badinter en justice devant le tribunal pour « diffamation ». Pendant l'audience Badinter se retourne vers Faurisson et lui dit "Pour moi, jusqu'à la fin de mes jours, jusqu'à mon dernier souffle, je me battrai contre vous et vos semblables. Vous serez toujours des faussaires de l'histoire" .

Yann Moix qui prétend se battre contre l'antisémitisme de toutes ses forces, peut-il ignorer ces choses là ?  A part les journalistes de Droites Extrêmes, personne ne posa la question.

Personne et surtout pas Laurent Ruquier qui embaucha Yann Moix pour «  On n'est pas couchés » en 2015. Or juste avant le lancement de l'émission, Paul Eric Blanrue sortait sur son blog un exposé de sa longue relation avec Moix. Encore une fois, celui-ci prétendait n'avoir jamais entendu Blanrue parler d'antisémitisme... chose tout à fait extraordinaire à propos d'un homme qui a fait de l'antisémitisme sa profession. Yann Moix prétendait avoir rompu avec Blanrue après l'affaire de la pétition.  Mais Blanrue a publié des mails  que lui a adressé Moix, postérieurs de plusieurs années à la pétition de soutien à Reynouard.

A retracer tous ces "malheureux hasards" des rencontres entre Yann Moix et l'extrême-droite la plus dure, évidemment ses propos admiratifs sur la dictature de Corée du Nord et son envolée contre les « racailles » sont moins étonnantes.

Une question demeure : parmi mille chroniqueurs possibles, mille écrivains de talent, pourquoi Laurent Ruquier et d'autres ont-ils choisi Yann Moix, qui est pour le moins dans un rapport ambigu avec les fascistes assumés ? L’autocritique de Ruquier sur la promotion qu’il  a offert pendant  des années à Zemmour apparaît comme une parade hypocrite.  En duo avec ce dernier Ruquier avait d’ailleurs aussi choisi Eric Naulleau qui a publié un livre de dialogues avec Soral.


La question ne se pose pas que pour Yann Moix, mais pour l'ensemble des intervenants qu'on voit partout et qui suscitent ces moments de « gêne » lorsqu'ils dévoilent le fond réel de leur pensée, et qui sont pourtant maintenus à l'antenne, à commencer par Eric Zemmour.

Yann Moix se prétend passionné par le judaïsme et dit avoir appris l'hébreu et le Talmud. Mais il semble surtout fasciné par les pires propos et militants antisémites, tout en dissimulant ces contacts nombreux et répétés.

Toute la vérité doit maintenant être faite sur le parcours politique de Yann Moix et la complaisance dont il a bénéficié tout au long de sa carrière médiatique, de la part de ceux qui étaient pourtant informés de ses dérives constantes.

3 janvier 2020: les copains Moix et Matzneff

Yann Moix et le pédocriminel Gabriel Matzneff sont amis et se soutiennent mutuellement.

Le 30 août dernier, Matzneff publiait un article de soutien à Moix dans Le Point qui accueille souvent sa prose. Dans ce texte il banalise et minimise l'antisémitisme reproché à Moix et conseille à son cher "Yann" de le suivre dans la provocation pédocriminelle. 

De son côté Moix avait publié en 2013 dans Le Figaro un texte d'adoration à " Gaby le Magnifique

Memorial 98


 

13 septembre 2019
Malgré le soutien réaffirmé de Laurent Ruquier dans différents médias les mensonges de Moix s'effondrent les uns après les autres. Ainsi ses graves accusations contre son frère, qu'il a accusé de liens maintenus avec l'extrême-droite dont il serait la "taupe" contraignent l'animateur complaisant de ONPC à lire à l'antenne un droit de réponse de ce frère diffamé. 

Memorial 98  

Voir d'autres textes et dossiers de Memorial 98:












 


vendredi 9 août 2019

Hong-Kong: alerte à la répression sanglante par la dictature chinoise.



Des policiers chinois lors de manœuvres menaçantes


Face aux menaces croissantes venant de Pékin, plusieurs associations et ONG, dont Memorial 98, alertent et interpellent les gouvernements français et européens






Déclaration commune du 8 août 2019
« A Hong Kong, il est du devoir de la communauté internationale de peser pour éviter une répression sanglante »

Depuis plus de deux mois la population de Hong Kong réclame en masse dans la rue que le pouvoir mis en place par Pékin respecte les accords concernant la cession à la Chine de l’ancienne colonie britannique et des Nouveaux Territoires. Depuis ce mardi 6 août 2019, elle se voit menacée d’une intervention armée qui, au regard de toutes les situations semblables, récentes ou passées, risque forcément d’être meurtrière.

Devant la menace d’une répression sanglante, nous demandons au gouvernement français ainsi qu’aux autres gouvernements européens d’affirmer avec force et au plus vite leur vive réprobation d’une solution militaro-policière violente et d’exiger le respect par la Chine du droit au suffrage universel énoncé dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme.

Le Bureau pékinois des affaires de Hong Kong et Macao a adressé lors d’une conférence de presse tenue le 6 août dernier un avertissement à ce qu’il qualifie de « tout petit groupe de criminels violents et sans scrupules et les forces répugnantes qui se cachent derrière eux » : « À jouer avec le feu, vous allez vous brûler à coup sûr. Ce n’est qu’une question de temps, le châtiment viendra. » a-t-il déclaré.

Les protestataires de Hong Kong ont voulu d’abord rejeter le danger immédiat d’un projet de loi d’extradition vers la Chine qui aurait rendu tout récalcitrant justiciable d’un appareil judiciaire chinois qui ignore le respect de la Constitution, la séparation des pouvoirs, l’indépendance des juges et le libre exercice de leur profession par les avocats saisis de dossiers « sensibles ». Sans oublier les condamnations à la peine capitale qui pourraient être prononcées.

Mais par-delà cette crainte immédiate, il y a le désir de fonder sur le suffrage universel la vie politique du territoire, pour que l’exécutif et le Conseil législatif émanent de la population dans son ensemble et non de corps électoraux restreints et désignés de telle manière que Pékin en aura toujours le contrôle. Le suffrage universel, promis dans la loi fondamentale qui organise le territoire, est toujours reporté et refusé. Ce refus est évidemment prévisible, de la part d’un pouvoir qui depuis soixante-dix ans refuse le suffrage universel à son milliard de ressortissants : l’on voit mal pourquoi il courrait le danger de l’accorder à Hong Kong.

La Chine ne veut pas s’embarrasser des libertés de Hong Kong et se donne le droit d’y faire la loi s’il en est besoin. « La Chine ne sera pas faible avec ceux qui enfreignent la loi, menace Pékin. Ne sous-estimez jamais la ferme détermination et la puissance immense du gouvernement central ».

A l’heure où se durcit la menace d’une intervention armée, il est du devoir de la communauté internationale de peser pour éviter une répression sanglante.

Signataires :

  • ACAT France – Action des Chrétiens contre la torture
  • ECPM – Ensemble contre la peine de mort
  • Ligue des droits de l’Homme
  • Memorial 98
  • Solidarité Chine



 
Autres publications de Memorial 98 sur la Chine:




 http://www.memorial98.org/2018/06/justice-pour-les-morts-de-tienanmen-victimes-de-la-dictature.html


samedi 27 juillet 2019

Pierre Péan: vie et mort d'un négationniste


La mort de Pierre Péan, journaliste et écrivain, donne lieu à une véritable avalanche d'éloges. Il est présenté comme un modèle de rigueur et d’indépendance. On le désigne même comme celui qui aurait découvert et publié les turpitudes de Mitterrand à l’époque de Vichy, alors que celles-ci étaient connues depuis fort longtemps.
La mort de Péan a également servi aux adversaires de Mediapart et des enquêtes journalistiques en général à le présenter comme l’anti-modèle de ce travail d’investigation. Péan avait depuis longtemps emboîté le pas à la haine de Mitterrand et de ses amis et obligés à l'encontre d'Edwy Plenel, fondateur de ce média.

Or Péan a porté le drapeau du négationnisme sur le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, au cours duquel un million de personnes ont été massacrées en quelques semaines. Il a défendu la politique des autorités françaises de l’époque qui ont permis et couvert ce génocide et notamment celle de Mitterrand alors président de la République. Il a inventé un « complot » des victimes Tutsi qui aurait été responsable du déclenchement du génocide. Ses thèses alimentent encore largement la propagande négationniste en la matière.
Notons que Péan ne s’est jamais rendu au Rwanda.
Cette fureur négationniste concernant un génocide en Afrique, continent dont il se présentait comme un spécialiste, est parfaitement en phase avec les discours du pouvoir et de la haute hiérarchie militaire française. Elle soulève évidemment de graves interrogations sur l’ensemble de l’œuvre de Péan. 

   
Ses écrits ont donné lieu à un procès en 2008. A la suite de la publication de son ouvrage « Noires fureurs, Blancs menteurs » Péan ainsi que son éditeur Claude Durand (Fayard) étaient poursuivis par Ibuka, association de rescapés du génocide des Tutsi du Rwanda et SOS Racisme pour diffamation raciale et provocation à la discrimination raciale. 
Quatre pages dans le premier chapitre, expliquaient, entre autres, que «  le Rwanda est aussi le pays des mille leurres tant la culture du mensonge et de la dissimulation domine toutes les autres chez les Tutsis et, dans une moindre part, par imprégnation, chez les Hutus ». D'autres passages reprennent ce propos, étayé par des citations d'anciens colons allemands ou belges et l'accentuent même. Parmi les défenseurs de Péan, Hubert Védrine et Bernard Debré , ministre de la coopération de Balladur au moment du génocide. Ce dernier maintient une ligne négationniste, notamment dans deux livres qui diffusent cette propagande.

Pendant trois jours de procès, les 24, 25, 26 septembre 2008, on a souvent débattu de l'«ubwenge», concept rwandais qui, selon les défenseurs de Pierre Péan, s'apparente au mensonge systématique mais « pas de façon négative comme chez nous, en France », ou selon ceux de la partie civile, à de l'intelligence.
 Face à cette querelle d'africanistes, la procureure de la République, Anne de Fontette a, au terme des débats, remis certains points sur les i. : «  Les témoins sont venus dans un drôle de mouvement intellectuel nous dire que le mensonge, au Rwanda, serait une qualité. Pour ma part, je note que le terme a été utilisé en français, sans précision sur les diverses traductions que pouvait revêtir le mot en kinyarwanda, au Rwanda. Or, le terme est ici utilisé à la française, où il n'a pas une connotation positive. » La représentante du ministère public s'est également étonnée du choix de certains auteurs des citations choisies par Pierre Péan, comme Paul Dresse, proche de l'extrême droite et dont le « langage colonial de l'époque », comme le souligne l'auteur, n'hésite pas à qualifier les Tutsis «  de race des plus menteuses sous le soleil ». Et Anne de Fontette de conclure que les deux délits étaient bel et bien constitués.

A l’occasion récente du 25e anniversaire du génocide, les mises en cause à propos de l’implication de dirigeants français de l’époque ont été actualisées. L’attention s’est portée sur Hubert Védrine, ancien ministre des Affaires étrangères et surtout à l’époque secrétaire général de l’Élysée. Or ce même Védrine a comparu afin de défendre Péan en 2008 lors du procès de ce dernier. La boucle est bouclée dans ce petit monde qui gravitait autour de Mitterrand.  
Le déroulement de ce procès démontre les ressorts et arguments des négationnistes, si proches de ceux qu’on retrouve dans des cas semblables (lire ici le compte rendu qu'en fit Memorial 98 sous la plume de Souâd Belhaddad)
   

Au moment du génocide, Mitterrand était président et Balladur chef d’un gouvernement de cohabitation, suite aux élections de 1993. Védrine jouait un rôle capital et bénéficiait de l’entière confiance du président.    

Mitterrand et Védrine étaient particulièrement complaisants à l’égard des chefs Hutu, considérés comme favorables à la France car francophones, alors que les dirigeants Tutsi, qui avaient dû se réfugier en Ouganda, étaient considérés comme favorables au monde anglophone. Péan,  souverainiste  et nationaliste très proche de Chevènement, partageait cette vision « géopolitique » anti-Tutsi.
Les habitants et les pouvoirs publics de notre pays ont un devoir particulier en ce qui concerne le Rwanda.
En effet, une partie du combat est aujourd'hui celui de la pleine reconnaissance par l’État français de ses responsabilités.
Cet État qui prétend parler en notre nom, persiste aujourd'hui à garder un silence complice sur l’implication de l’armée française dans le génocide des Tutsi.
Or le pouvoir Hutu extrémiste a reçu de manière continue et appuyée le soutien des autorités françaises tant au plan politique, militaire que financier, avant, pendant et après le génocide. Toute la vérité doit être faite au sujet de cette implication : tous les documents doivent être rendus publics. C’est pourquoi nous soutenons et partageons pleinement le combat de nos amis et partenaires de Ibuka, du CPCR et de Survie afin que la vérité se fasse jour et que les coupables éventuels soient jugés.

On notera que Védrine est toujours présent sur la scène politique et médiatique. Il s’est manifesté en organisant très récemment l'offensive rageuse des fidèles de Mitterrand à propos du génocide des Tutsi. Ces derniers ont adressé une lettre à Olivier Faure, dirigeant du Parti socialiste afin de mettre en cause Raphaël Glucksmann, tête de la liste commune PS-Place Publique pour les élections européennes de mai 2019. A leurs yeux, il a péché en osant rappeler le rôle de l'ancien président et de son entourage dans l'aide apportée par les autorités françaises aux génocidaires .

Parmi les signataires de ce texte, Hubert Védrine, principal suspect dans ces décisions mais également Roland Dumas, ancien ministre des Affaires étrangères de Mitterrand. Or Dumas est depuis fort longtemps passé du côté des dictateurs en Afrique, fait appel à des thèmes antisémites et assistait au meeting-spectacle de Dieudonné au Zénith de Paris dès 2006, en compagnie de ses amis de la famille Le Pen.

Cette lettre de menaces a montré quel point les amis de Mitterrand sont soucieux d'empêcher que la vérité se fasse jour à propos de ce génocide et des responsabilités françaises.

C'est ce que nous avions également rappelé lors d'une allocution de Memorial 98 le soir du 7 avril, dans le cadre de la veillée organisée comme chaque année par l'association Ibuka-France en mémoire des victimes du génocide. 
Nous y appelions à la vigilance face aux nombreuses tentatives pour bloquer un accès complet aux archives, voir ici la vidéo de cette intervention: https://www.youtube.com/watch?v=MaYgH39DV4Y

Péan soutient Mitterrand sur la (non) responsabilité de Vichy et Pétain dans la déportation des Juifs de France.

Contrairement à la légende qui entoure son livre sur Mitterrand intitulé « Une jeunesse française » Péan ne voulait pas compromettre le président de l’époque, comme il l'a lui-même indiqué à de nombreuses reprises. Il cherchait au contraire à maitriser avec lui le flot de révélations qui se faisait jour. Il a d’ailleurs souvent manifesté son agacement face à l’interprétation trop négative qui aurait été faite de sa publication et insisté sur la cordialité et le caractère affectueux maintenu de ses relations avec Mitterrand après la parution du livre.


La clé se trouve dans son livre  Dernières volontés, derniers combats, dernières souffrances (de Mitterrand publié en 2002). L'essentiel de cet ouvrage est consacré aux rapports de Mitterrand et de la place de Vichy et Pétain dans la déportation des Juifs de France.  L’antisémitisme y affleure dans de nombreuses pages.
Péan fait comme si Mitterrand avait été victime d'un complot animé par Serge Klarsfeld, ayant des prolongements jusqu'en Israël, et qui visait à "remettre la Shoah au centre de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale". Selon Mitterrand, approuvé par Péan, Klarsfeld voulait " mettre la République à genoux" 
Il y justifie qu'un président de la République ait pu organiser un véritable mur du silence autour de son passé avec décoration par la francisque de Pétain, de son amitié maintenue avec René Bousquet, et avec la même impudence,  ait pu rompre ce silence en banalisant Vichy.
                    Bousquet avec des hauts officiers SS et ci-dessous dans                           l'intimité de Mitterrand à Latché en 1974 





En effet Mitterrand a maintenu durant ses deux septennats la fiction d'une non responsabilité des autorités françaises dans la déportation des Juifs de France. Il faisait même fleurir très régulièrement la tombe de Pétain.   
Ainsi chaque 11 novembre, de 1987 à 1992, François Mitterrand alors président de la République, a fait déposer une gerbe de fleurs présidentielle sur la tombe du Maréchal Pétain, à l’île d’Yeu, au prétexte du rôle de ce dernier lors la première guerre mondiale
Les associations de résistants et de victimes du nazisme avaient beau protester unanimement, rien n'y faisait. En 1992 le scandale fut plus important, car une large campagne publique se déroulait contre ce geste de révérence à l'égard du chef de la collaboration. 
Du coup, le préfet de la Vendée, chargé par la présidence de la République de fleurir la tombe  le 11 novembre, dut attendre cette année-là 17 h 15 pour se rendre en hélicoptère sur l'île d'Yeu, lieu de sépulture de Pétain. Il craignait  d'être confronté aux manifestants présents sur place. C'était juste après que Serge Klarsfeld et la quarantaine de personnes l'accompagnant eurent pris le dernier bateau régulier de retour de l'île. Ils étaient venus «s'assurer qu'une gerbe ne sera plus déposée sur la tombe de Pétain par le président de la République». Au bout du compte, la gerbe du préfet côtoyait celles déposées dans les heures précédentes par Jean-Marie Le Pen et par "l'Association nationale Pétain Verdun" (ANPV, émanation des nostalgiques de Vichy). 
Devant l’ampleur du scandale, Mitterrand fut contraint de suspendre l'hommage à Pétain à partir de 1993, c'est à dire à la toute fin de son deuxième septennat.





Lionel Jospin, qui a succédé à François Mitterrand à la tête du Parti socialiste, avait pris d'emblée du recul à l'égard de ce dernier lorsqu'il fut le candidat de la gauche à l'élection présidentielle de 1995.  Il fit état d'un « droit d'inventaire » par rapport aux positions de Mitterrand à l'égard du régime de Vichy, et notamment aux liens d'amitié qui l'unissaient à René Bousquet, ancien dirigeant de la police du régime pétainiste, organisateur notamment de la rafle du Vel’d’Hiv’. Cette rupture avec le passé mitterrandien lui valut d'ailleurs des haines féroces de la part des proches de l'ancien président et un soutien de ce dernier à  la candidature de Chirac. Ses fidèles Pierre Bergé et Roger Hanin se chargèrent des attaques violentes à l'encontre du candidat socialiste. par une ironie de l’Histoire, c’est ce même Chirac qui prit le parti de rompre avec l’hypocrisie et de reconnaître enfin en juillet 1995 que « "...Ces heures noires souillent à jamais notre histoire et sont une injure à notre passé et à nos traditions. Oui, la folie criminelle de l'occupant a été, chacun le sait, secondée par des Français, secondée par l'État français. La France, patrie des Lumières, patrie des Droits de l'homme, terre d'accueil, terre d'asile, la France, ce jour-là, accomplissait l'irréparable..."


A droite, c'est Sarkozy qui lança, dès sa campagne électorale de 2007, une offensive d'ampleur contre la "repentance" et contre la reconnaissance de la participation des autorités françaises à la Shoah
Sarkozy a même boycotté la cérémonie du 8 mai 2007, pour ne pas se retrouver à côté de Chirac qui avait reconnu les responsabilités françaises dans la déportation des Juifs. Son successeur Laurent Wauquiez  a poursuivi dans la même voie par un accueil en grande pompe de Eric Zemmour qui travaille à réhabiliter Pétain et son régime. 
Plus récemment, Emmanuel Macron a voulu rendre hommage à Pétain, lors du centenaire de la fin de la 1e guerre mondiale. Il a repris l’argumentation bien connue sur le « grand soldat » qui aurait ensuite fait « des choix funestes ». Face au scandale, il a du renoncer à cet hommage.


Au total, Pierre Péan, prétendument rigoureux et indépendant, a de manière croissante dans son œuvre, épousé les méandres des froids intérêts de pouvoirs en place. Il a sacrifié toute retenue à la défense d'une propagande négationniste à propos du génocide de Tutsi au Rwanda et de l’implication de Mitterrand dans le déroulement de ce terrible massacre. Cette dérive avait débuté bien avant, notamment par sa complaisance à l’égard des ambiguïtés de Mitterrand face à Pétain et Vichy.

Albert Herszkowicz 
MEMORIAL 98 

De nombreux liens et références figurent dans ce texte. Ils donnent une image plus complète des problèmes traités. On pourra aussi consulter les articles suivants concernant d'autres proches de Mitterrand qui le suivirent dans ses méandres et mensonges concernant la Shoah ou le génocide des Tutsi : Jean d'Ormesson ainsi que Jean-Luc Mélenchon