Ghetto de Varsovie: 18 et 19 avril, hommage aux insurgés-es qui défièrent les nazis
Nous vous appelons à participer à l'hommage organisé par le
Réseau d'Actions contre l'Antisémitisme et tous les Racismes (RAAR) et
de nombreuses associations et personnalités dont Memorial 98, le 18 et
19 avril: le dimanche 18 à 14 h sur la place de l'Hôtel de Ville de Paris.
Ce rassemblement est déclaré et autorisé par la Préfecture et se
déroulera dans le strict respect des précautions sanitaires
Il est suivi le 19 avril à 19h 30 d'une conférence en ligne/Webinaire avec l'historienne Audrey Kichelewski, co-directrice de la Revue d'Histoire de la Shoah.
Venez
nombreux-ses honorer la mémoire des insurgé-es et réaffirmer notre
détermination à lutter contre l'antisémitisme et tous les racismes(précisions ci-dessous)
Memorial 98
Le 19 avril, date du début du soulèvement du ghetto de Varsovie en 1943, symbolise l'extermination des Juifs d'Europe par les nazis.
La révolte d'avril 1943 se produisit dans les conditions terribles d'un ghetto déjà en partie vidé de ses habitants. En effet, depuis le 23 juillet 1942,
jour après jour, cinq à six mille personnes étaient emmenées par les
nazis, du ghetto vers la "Umschlagplatz" ou "place du transbordement"
puis déportées vers le camp d'extermination de Treblinka.
Le début du ghetto
L'enfermement dans le ghetto.
Le
ghetto de Varsovie a été instauré le 12 octobre 1940, date qui
correspondait cette année-là à la grande fête juive de Yom Kippour. Les nazis, dans leur rage antisémite,
utilisaient souvent les dates des fêtes religieuses juives afin de
procéder à des persécutions particulières ou de marquer leur
"connaissance" du judaïsme.
Les
nazis annoncèrent à la population juive qu'elle devait déménager dans
ce "quartier juif" exigu qui fut ceint de barbelés. Le 16 novembre, on
y transfère de force les Juifs, soit un tiers de la population de la
ville, qui doivent se concentrer sur sur 2,4 % de sa superficie : 450
000 personnes sont alors coupées du reste du monde.
L"Aktion" comme l’appelaient les nazis, de déportation vers la mort, débuta le 22 juillet 1942.
Cette date correspondait au jour de Tish'a Beav, qui commémore par le
deuil et le jeûne la destruction du Temple juif de Jérusalem par l'armée
romaine en l'an 70 de notre ère.
Chaque
22 juillet à Varsovie, une marche démarre du monument de
l'"Umschlagplatz", lieu d'où partaient les convois de déportés puis
parcourt l'ancien espace du ghetto, dont il ne subsiste strictement
rien.
La déportation des Juifs de Varsovie s’inscrivait dans le cadre de la plus vaste "Aktion Reinhardt", organisée par les nazis en Pologne occupée; celle-ci inclut la construction des camps d'extermination de Belzec (mars 1942), Sobibor (mai 1942) et Treblinka (juillet 1942).
Ce
dernier camp joue un rôle particulier dans l'extermination des Juifs de
Varsovie. 280 000 Juifs déportés de la capitale polonaise y seront
assassinés.
L'Aktion
de Varsovie prit fin temporairement le 21 septembre suivant, à nouveau
durant le jour de la plus importante fête juive, Yom Kippour.
Après
cette grande déportation, le ghetto de Varsovie est réduit à un camp de
travail où 36 000 Juifs survivent officiellement et où 20 à 25 000
clandestins se cachent. Son sursis tenait d’une part à la pénurie de
main-d’œuvre gratuite dont l'administration nazie voulait disposer, et
d'autre part à la nécessité d’une pause afin de recenser et d’expédier
vers le Reich les biens volés dans le ghetto.
Quelques
jours après le début de la déportation de juillet, la résistance juive
s’unifia dans un « Bloc antifasciste » et se dote d’une branche armée,
l’Organisation juive de combat (OJC), fondée le 28 juillet 1942. Cette
démarche déboucha plusieurs mois plus tard sur le soulèvement du ghetto
Les premières opérations de l'OJC furent dirigées contre les responsables de la "police juive" et autres collaborateurs.
En janvier 1943, une seconde Aktion visant
à liquider le reste du ghetto fut interrompue par les nazis eux-mêmes
au bout de quatre jours, face à la résistance et au fait que la
population se cache dans un réseau souterrain creusé durant des mois.
Le
19 avril 1943, correspondant cette année là au début de la fête juive
de Pessah, les unités SS chargées de liquider le ghetto sont repoussées
par les combattants. Ceux-ci ne disposent que de quelques revolvers et
grenades. Quand le millier de soldats allemands pénètrent en force dans
le ghetto, les résistants les attendent barricadés dans leurs bunkers
et leurs caves. Au nombre de 1000 environ, ils sont regroupés
principalement dans l'Organisation des Combattants Juifs, (OJC, ZOB en polonais) commandée par le jeune Mordehaï Anilewicz, membre de l’organisation de jeunesse Hachomer Hatzaïr. Dès
l’invasion de la Pologne par les nazis, Anilewicz avait rejoint avec
des membres de son groupe l’est de la Pologne, pour aider à retarder
l'avance allemande. Après l'invasion de ces régions orientales de la
Pologne par les armées de Staline, à la suite du pacte
germano-soviétique, les Soviétiques l'arrêtent et l'emprisonnent. Il est
libéré peu de temps après, et retourne alors à Varsovie
Face
à l'insurrection, le commandant allemand est relevé de ses fonctions,
le général SS Jürgen Stroop lui succède. Il est lui-même est pris de
court par la rébellion des "sous-hommes" ainsi que les nazis
qualifiaient les Juifs. Dès lors, les troupes SS vont incendier
systématiquement les immeubles et propulser du gaz dans les souterrains
afin d'en déloger les résistants.
Ces
derniers vont tenir pendant un mois, malgré leur très faible niveau
d'armement et de nourriture. Plus de deux mille SS, soutenus par de
l‘artillerie et des blindés, incendient le ghetto, maison après maison.
Les Juifs sont asphyxiés, carbonisés, enterrés vivants dans les abris où
ils sont retranchés.
Six
mille Juifs présents dans le ghetto trouvent la mort dans les combats
ou se suicident. Sept mille sont fusillés sur place. Les autres sont
déportés. Une poignée de miraculés échappe à la mort en s'enfuyant par
les égouts.
Le 16 mai 1943, Stroop fait dynamiter la grande synagogue du ghetto.
Il annonce à Himmler : « Il n’existe plus de quartier juif à Varsovie. »
Cette
photo célèbre provient du rapport adressé par le général SS Stroop à
Himmler après l'écrasement de la révolte. Elle a donc été prise et
diffusée dans le cadre de la propagande nazie.
Elle porte la mention " forcés hors de leurs caves"
Le testament de Mordehaï Anilewicz
La rébellion se termine à la mi-mai. Mordehaï Anilewicz se suicide le 8 mai avec une partie de la direction de l'OJC ; il a 24 ans. Le 23 avril 1943, il avait écrit dans une dernière lettre :
«Les
Allemands ont fui par deux fois du ghetto. L'une de nos compagnies a
résisté 40 minutes et une autre s'est battue pendant plus de six
heures... Nos pertes en vies humaines sont faibles et ceci est également
une réussite...
Grâce à notre radio, nous avons entendu une merveilleuse émission
relatant notre lutte. Le fait que l'on parle de nous hors du ghetto nous
donne du courage.
Soyez en paix, mes amis de l'extérieur ! Peut-être serons-nous témoins
d'un miracle et nous reverrons-nous un jour. J'en doute ! J'en doute
fort !
Le
rêve de ma vie s'est réalisé. L'auto-défense du ghetto est une réalité.
La résistance juive armée et la vengeance se matérialisent. Je suis
témoin du merveilleux combat des héros juifs...»
Quelques jours plus tard, le 12 mai, Szmuel Zygielbojm, représentant du mouvement ouvrier juif Bund dans le gouvernement polonais en exil à Londres, se suicide dans cette ville.
Il
proteste ainsi contre l’inaction des gouvernements alliés, dûment
avertis de la situation en Europe de l'Est et notamment en Pologne. Lui-même avait alerté publiquement sur l'extermination en cours.
Il laissa une lettre dont voici des extraits :
« Derrière
les murs du ghetto se déroule à présent le dernier acte d’une tragédie
sans précédent dans l’Histoire. La responsabilité du forfait consistant à
exterminer la totalité de la population juive de Pologne retombe au
premier chef sur les exécutants; mais, indirectement, elle rejaillit
également sur l’humanité tout entière. Les nations et les gouvernements
alliés n’ont entrepris jusqu’ici aucune action concrète pour arrêter le
massacre. En acceptant d’assister passivement à l’extermination de
millions d’êtres humains sans défense - les enfants, les femmes et les
hommes martyrisés - ces pays sont devenus les complices des
criminels.[...]. Mes camarades du ghetto de Varsovie ont succombé,
l’arme au poing, dans un dernier élan héroïque. Il ne m’a pas été donné
de mourir comme eux, ni avec eux. Mais ma vie leur appartient et
j’appartiens à leur tombe commune. Par ma mort, je désire exprimer ma
protestation la plus profonde contre la passivité avec laquelle le monde
observe et permet l’extermination du peuple juif.
Je
suis conscient de la valeur infime d’une vie humaine, surtout au moment
présent. Mais comme je n’ai pas réussi à le réaliser de mon vivant,
peut-être ma mort pourra-t-elle contribuer à arracher à l’indifférence
ceux qui peuvent et doivent agir pour sauver de l’extermination — ne
fût-ce qu’en ce moment ultime — cette poignée de juifs polonais qui
survivent encore. Ma vie appartient au peuple juif de Pologne et c’est
pourquoi je lui en fais don… »
(Londres, mai 1943)
Nos
pensées vont vers les victimes de cette extermination et vers ceux qui
au cœur des ténèbres, entamèrent la préparation de leurs actes héroïques
qui apparurent au grand jour dans les mois qui suivirent.
En
Pologne même, l’antisémitisme et le racisme sont fortement stimulés par
le pouvoir de droite radicale du PiS. Celui-ci a franchi une nouvelle
étape dans sa tentative visant à réécrire l’histoire du pays.
Il a promulgué en février 2018 une loi sur la "mémoire". Sous prétexte
de mise en cause du terme "camp de la mort polonais", le texte menace de
prison quiconque évoque la collaboration de Polonais avec le nazisme, voire le massacre des Juifs de Jedwabne, perpétré par leurs voisins polonais.
Les protestations se sont multipliées dans le monde entier mais à ce
jour le pouvoir maintient l’arme révisionniste de cette loi. Le premier
ministre israélien Netnayahou s’est en revanche compromis dans un accord avec le gouvernement polonais, contre l’avis des responsables du mémorial de Yad Vashem.
Des propagandistes de la haine déversent des flots de propos complotistes et racistes, grâce à la complaisance des grandes plates-formes et
à l'indulgence de juges qui les protègent en reculant devant
l’application des lois limitant le négationnisme, comme dans le cas de Soral et Dieudonné
L'extrême-droite parrainée et soutenue par Trump avant sa défaite et Poutine, pèse lourdement dans de nombreux pays d’Europe.
Nous en appelons plus que jamais au combat contre les idéologies et actes racistes et antisémites, quels que soient leur prétextes, ainsi que pour la mémoire des génocides et crimes contre l'humanité
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