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mardi 6 décembre 2016

6 décembre: en mémoire de Malik Oussekine et Abdel Benyahia






Ni oubli, ni pardon: en ce jour anniversaire de sa mort nous pensons à Malik Oussekine (ci-dessus), tué par les "pelotons voltigeurs" de la police parisienne dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986, en pleine mobilisation étudiante contre les lois Devaquet. 

Memorial 98 salue sa mémoire, se souvient de la responsabilité directe de Pasqua et Pandraud, ministres de l'Intérieur et de la Police de l'époque, ainsi que de celle de Chirac, chef du gouvernement.
Les pelotons voltigeurs ont été mis en service par Pandraud. Ce sont des policiers montés à deux sur une moto tout-terrain ; l’un conduit, l’autre est armé d’une matraque. Ils ont comme mission de « nettoyer » les rues après les manifestations en pourchassant les  prétendus « casseurs ». 
À Paris, à la suite d’une manifestation pacifique arrivée à la Sorbonne, au Quartier latin, les “voltigeurs” prennent en chasse les jeunes qu’ils croisent. 
Malik Oussekine, un étudiant marocain de 22 ans, sort d'un club de jazz en plein Quartier Latin. Il est minuit. Des “voltigeurs” le remarquent et se lancent à sa poursuite. Malik Oussekine se met à courir. Un témoin qui rentrait chez lui, Paul Bayzelon, fonctionnaire au ministère des Finances, habitant l’immeuble, au 20 rue Monsieur le Prince (6earrondissement), a déclaré :
« Je rentrais chez moi. Au moment de refermer la porte après avoir composé le code, je vois le visage affolé d’un jeune homme. Je le fais passer et je veux refermer la porte. Deux policiers s’engouffrent dans le hall, se précipitent sur le type réfugié au fond et le frappent avec une violence incroyable. Il est tombé, ils ont continué à frapper à coups de matraque et de pieds dans le ventre et dans le dos. La victime se contentait de crier : “je n’ai rien fait, je n’ai rien fait” ».
Paul Bayzelon a dit avoir voulu s’interposer mais s’être fait lui aussi matraquer jusqu’au moment où il a sorti sa carte de fonctionnaire. Puis les policiers sont partis, laissant Malik Oussékine sur le carreau.
Peu après le Samu arrive sur place. Ils apportent les premiers soins à Malik Oussekine et le transportent à l’hôpital Cochin où il meurt des suites des coups portés par la police.  
Ce corps de police fut dissous à la suite de cette affaire. Le ministre Devaquet démissionna, sa réforme fut retirée ainsi que le projet gouvernemental raciste qui s'attaquait au droit du sol (voir ici)  

On se souvient aussi comment le Front National a, un an plus tard, commenté sa mort : « Des Français comme les Oussekine, on peut s’en passer […]. On se souvient de la mort du petit casseur gauchiste nommé Malik Oussekine. Malgré son état de santé lamentable, il n’avait pas hésité à attaquer en pleine nuit les forces de police chargées du maintien de l’ordre » (extrait du journal du Front national du Var , 20 janvier 1988).

Quant aux assassins de Malik Oussekine, les policiers voltigeurs Schmitt et Garcia, ils ne seront inculpés que de "coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner". Aux assises, en 1990, ils s’en tireront avec cinq ans de prison avec sursis pour le premier, deux ans pour le second.

Nous nous souvenons également de Abdel Benyahia tué dans la même nuit  du 5 au 6 décembre 1986 à Pantin à l'âge de 20 ans, par un inspecteur de police qui n’était pas en service. Dans les manifestations qui suivirent, les noms de Malik Oussekine et d'Abdel Benyahia étaient associés,   même si aujourd'hui, malheureusement, la mémoire du second se perd. 
Ainsi  lorsque Malik Oussekine est enterré à Paris, une manifestation à la mémoire des deux victimes, Malik Oussekine et d'Abdel Benyahia réunit plusieurs centaines de milliers de personnes.



Au lendemain de la mort d'Abdel Benyahia, pendant 48 heures, c’est le blackout total dans tous les services.
 La famille n’est avertie que le 8 décembre de l’endroit où a été transporté le corps. 
 Le policier Savrey est n'est inculpé que d' "d’homicide involontaire" et laissé en liberté sous contrôle judiciaire. Il avait 1, 83 grammes/litre d'alcool dans le sang. Maître Forster avocat de la famille Benyahia déclara alors : "C’est sur réquisition du ministère que le juge d’instruction n’a pas délivré de mandat de dépôt à l’encontre du policier". 
A la Cité des 4000 (La Courneuve) où habitait la famille Benyahia, se constitua le Comité justice pour Abdel qui s’acharna à réclamer la vérité. Six mois après le meurtre, le crime fut requalifié "d’homicide volontaire" et Savrey est incarcéré. Le procès aux assises eut lieu en novembre 1988. Des policiers déclarent alors  à la barre : "Vous savez bien que dans la police tout le monde boit ; un autre fonctionnaire aurait eu le même geste. On peut imaginer alcoolémie ou pas, qu’on aurait abouti au même résultat".  Le  réquisitoire demandait  8 ans  de réclusion. Verdict du jury : 7 ans de réclusion.

En cet anniversaire on se souvient aussi de la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré le 27 octobre 2015 ( voir ici) avec le scandale de l'impunité policière et plus près de nous de la mort d'Adama Traoré, victime des violences des gendarmes,  mort le 19 juillet 2016 à la gendarmerie de Persan après son interpellation. Sa famille et ses amis sont harcelés depuis.

Nous n'oublions pas et réclamons la justice, la vérité ainsi que la fin de l'impunité.

MEMORIAL 98



vendredi 11 septembre 2015

Devedjian révèle les dessous du racisme de la droite française




Les propos de Devedjian sont fascinants (et fascisants) en ce qu'ils révèlent des pensées de dirigeants de la droite française, comme  il y a quelques semaines lorsque Sarkozy évoquait la "fuite d'eau" que représenterait l'afflux de réfugiés  et lors des fameuses déclarations de son acolyte Brice Hortefeux.

Ils sont d'autant plus choquant que sa famille a fui le génocide des Arméniens et s'est réfugiée en France.
Le député des Hauts-de-Seine (Les Républicains, LR)  président du conseil général du 92, ancien ministre de Sarkozy et Chirac, ancien secrétaire général de l'UMP, a lancé cette "blague" à propos des Allemands qui accueillent les réfugiés syriens: 




                       « Ils nous ont pris nos juifs, ils nous rendent des arabes. »

Cet humour, déjà abject de la part de n'importe qui, revêt une résonance particulière dans le cas de Devedjian.  
Celui-ci est un ancien militant de choc (condamné pour violences)  du groupe fasciste et antisémite Occident, dans lequel il combattait pour l"Algérie française" avec ses acolytes Gérard Longuet, Alain Madelin et d'autres.
Sa préoccupation pour les Juifs est donc plus que sujette à caution. 
C'est aussi un récidiviste en terme de propos nauséabonds orientés politiquement; en 2007 il avait traité de "salope" une élue lyonnaise du Modem, Mme Comparini  qui avait combattu contre l'alliance de la droite  et du FN lors des régionales de 1998


 Mais au delà de sa personnalité de voyou,  que dit Devedjian dans ces quelques mots? 

Pour lui ce sont les "Allemands" et non les nazis qui sont responsables de la Shoah. Cela lui  permet au passage d'évacuer la collaboration, Pétain et la participation des autorités françaises à l'extermination, puisque c'est uniquement une responsabilité d'Allemands qui "nous ont pris nos Juifs" .

Il rejoint ainsi Sarkozy, qui, acharné à combattre la "repentance " française et désireux déjà de flatter l'électorat  du FN  avait, lors de sa campagne de 2007, rejeté la mention  de la participation du régime de Vichy à la déportation des Juifs de France. Pour le chef de la droite, la "repentance" devait être réservée aux Allemands coupables de "folie" due à «… la redoutable absence de l’idée de Dieu… »  Sarkozy avait même boycotté, quelques jours après son élection en 2007, la cérémonie du 8 mai qui marque la fin de la 2e guerre mondiale et la défaite du nazisme. En effet il ne voulait pas apparaître aux côtés de Chirac qui avait reconnu,  le 16 juillet 1995, la responsabilité des autorités françaises en déclarant lors de la commémoration de la rafle du Vel' d'Hiv: "... Oui, la folie criminelle de l'occupant a été, chacun le sait, secondée par des Français, secondée par l'État français. La France, patrie des Lumières, patrie des Droits de l'homme, terre d'accueil, terre d'asile, la France, ce jour-là, accomplissait l'irréparable..." 

Devedjian attaque les "Allemands" actuels et leurs leaders de droite, qui à la différence de la droite française, ont  décidé d'accueillir des centaines de milliers de réfugiés. 
C'est donc louche à ses yeux et à ceux de Sarkozy, Hortefeux et autres. L'idéologue de la droite radicale française, le pétainiste Eric Zemmour (qui a d'ailleurs  fait ses premières armes dans le 92 auprès de Pasqua, tout comme Devedjian), va encore plus loin en mettant en cause Angela Merkel en tant que femme qui représente "l'incarnation d'un continent de mamans qui ne supportent pas la photo d'un enfant mort" et constate avec rage que " l'Europe est égalitaire et fraternelle... sous la férule teutonne"
Les déclarations de Jean-Luc Mélenchon sont d'ailleurs également scandaleuses puisqu'il met en cause Merkel l"opportuniste" en déclarant : "... Et la voici qui prend sa mine sucrée et dit: maintenant nous allons accueillir du monde. Cela tombe d'autant mieux qu'il leur manque du monde".

Les explications à la limite du complotisme répandues un peu partout prétendent doctement que "les Allemands" accueillent des réfugiés surtout  parce qu'ils  auraient besoin de main-d’œuvre (voire même d"esclaves")  et de population en raison d' une démographie chancelante. Mais pourquoi dans ce cas les patrons allemands n'acceptent-ils pas plutôt les centaines de milliers de personnes européennes, notamment issus des Balkans, qui ne demandent qu'à venir travailler en Allemagne ?

Pour les tenants de la théorie du complot , ceux à "qui on ne la fait pas" il ne vient pas à l'idée que la coalition droite-SPD au pouvoir réagit ainsi pour répondre avant tout à l’opinion publique allemande, marquée en effet par la mémoire du nazisme et de ses conséquences et qui est très favorable à l’accueil des réfugiés. Les médias manifestent leur surprise face à la mobilisation en cours en Allemagne et en Autriche. Pourtant tout le monde a pu voir les scènes d'accueil dans les gares de Francfort et Munich et encore avant les banderoles de soutien aux réfugiés dans les stades de foot. Mais cela ne correspond décidément pas à l'image des "Allemands" et surtout cela met en lumière la grande frilosité des pouvoirs publics français. Du coup les médias omettent de rappeler les grandes chaines humaines qui avaient mobilisé des centaines de milliers de personnes en Allemagne à peine réunifiée contre les crimes racistes des années 90. Ils méconnaissent le travail quotidien d’associations de défense des réfugiés comme Pro-Asyl.

Enfin Devedjian attaque évidemment l'arrivée d'"Arabes". Rien d'étonnant de sa part et on se trouve ici au cœur de la ligne des Républicains. Mais il fait ainsi un signe direct et d'actualité à l'islamophobie galopante, au  Front National, à Robert Ménard maire de Béziers, aux maires "Les Républicains" qui ne veulent que des "chrétiens". Il  se place dans la continuité absolue de Sarkozy, qui ne cesse de radicaliser son propos, après avoir comparé les réfugiés à une fuite d'eau et appelé à défendre les Églises de France contre les musulmans. 
Devedjian se pique de théoriser l'avenir de la droite française; ainsi lors de la campagne de Sarkozy en 2007 il regrettait la situation où" la droite est sortie honteuse de la (2eme) guerre"  et  se réjouissait de la " "la droitisation de la société (qui) permet aujourd'hui ce réajustement idéologique qui anticipe la victoire politique".

Avec ses déclarations si révélatrices, il replonge dans cette xénophobie d'une droite qui a comme seuls programmes la lutte contre l'"envahissement" et le cri sinistre " à bas les Arabes".  
MEMORIAL 98