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vendredi 16 juillet 2021

Shoah, étoile jaune, Rafle du Vel' d'Hiv, Mont Valérien, apartheid: l'outrage des complotistes


Mise à jour du 13 décembre 2021

Mont Valérien: profanation ignoble par des antipass/vax du lieu où les nazis ont fusillé plus de 1000 résistants, dont ceux de l'Affiche rouge et de nombreux Juifs otages. Les profanateurs utilisent les caractères de la SS ( ci dessous) dans leur inscription de cinquante mètres de long et c'est ce qu'ils sont eux-mêmes

 



 

 

Un contexte particulier 


 

La commémoration de la rafle du Vel' d'Hiv' du 16 et 17 juillet 1942 se déroule cette année dans un contexte nauséabond.

En effet la pandémie actuelle du Covid donne déjà lieu à une déferlante de propagande antisémite et complotiste sous la forme la plus violente.

Dans la dernière période, cela a pris la forme de l'assimilation de la vaccination et du pass sanitaire à la Shoah et à l'Apartheid .

Des étoiles jaunes sont brandies par les opposants organisés à la vaccination. On condamne un "pass nazitaire" et compare ce pass à l'inscription sinistre du portail d'Auschwitz (ci-dessous)




                                
                               Colère de Joseph Szwarc, 94 ans, rescapé de la rafle du Vel 'd'Hiv,  qui a porté l'étoile jaune, contre les comparaisons répandues ces jours-ci

                                   Vague de comparaisons nauséabondes

L'eurodéputée EELV Michèle Rivasi évoque l'Apartheid. C'est une multi-récidiviste en matière de complotisme anti-vaccins. Elle a plusieurs fois coopéré avec le médecin ultra-réactionnaire Henri Joyeux, opposant enragé au droit à l'IVG et pourfendeur des vaccins.

Les partisans de Florian Philippot, auto-proclamé chef de l'opposition à toute précaution face au Covid, sont au premier rang de cette manipulation qui revient à minimiser et banaliser le génocide des Juifs ou l'apartheid. 

Ainsi le 15 mai dernier, les partisans de Philippot se rassemblaient à Orléans, arborant des étoiles jaunes et une banderole "Liberté" (voir ci-dessous)

 



Le chef des " Patriotes" organise d'ailleurs une manifestation de "liberté" le samedi 17 juillet, à la date du deuxième jour de la rafle de 1942. 


 

 

On ne peut qu'être choqué et horrifié par l'appel de Fançois Ruffin, député LFI, coutumier des propos confusionnistes à se joindre "aux manifestations" de ce type. Il avait déjà congratulé le négationniste antisémite Étienne Chouard 

Le Figaro peut ainsi titrer "Ruffin, Philippot, Dupont-Aignan et Asselineau appellent à manifester contre le passe sanitaire " 

Or durant la campagne présidentielle de 2017, ce même Philippot, alors numéro deux du FN et porte-parole omniprésent de Marine Le Pen, avait délibérément lancé une polémique contre la reconnaissance historique le 16 juillet 1995 par Chirac de la responsabilité des autorités françaises dans cette rafle et dans la déportation des Juifs de France. 

Par un grossier tour de passe-passe, il évitait de condamner Pétain et le régime de Vichy, afin selon lui de préserver " la fierté de la France" Il déclarait ainsi:   "On peut être fier de l'histoire de France", a commencé le soutien de la candidate ( Philippot), en dénonçant la repentance de certains dirigeants. Une journaliste lui demande alors s'il pense que le discours de Jacques Chirac en était. "J'ai toujours été dans la position traditionnelle de la France à savoir que la France était à Londres. Je reste fidèle à cette histoire", a répondu Florian Philippot.

"Le responsabilité de l’État français dans la Collaboration n'est pas un fait historique?", le relance alors un journaliste. "La responsabilité de Français oui. De L’état français, non. Je mets la France et la République à Londres", conclut le conseiller de Marine Le Pen.

Marine Le Pen avait ensuite emboité le pas, en déclarant à deux semaines du premier tour de la présidentielle  : « Je pense que la France n’est pas responsable du Vél’ d’Hiv’ ». Il s’agissait manifestement d'un choix stratégique, car elle redoublait ainsi le propos de Philippot
Dans l’émission « Le Grand Jury RTL-LeFigaro-LCI » du 9 avril, le journaliste Olivier Mazerolle l’avait interrogée sur son programme prônant « la promotion du roman national et le refus de repentance ». Il lui avait demandé si Jacques Chirac avait eu tort de prononcer son discours de 1995 sur le Vél’ d’Hiv, dans lequel il avait reconnu la responsabilité de la France.  « Je pense que la France n’est pas responsable du Vél d’Hiv' », a-t-elle répondu, se plaçant ainsi en opposition à cette reconnaissance. 

La justification de la chef frontiste se dévoila ensuite, lorsqu’elle poursuivit dans une argumentation manifestement reprise  des propos de Philippot:  « …  La France a été malmenée dans les esprits depuis des années. En réalité, on a appris à nos enfants qu’ils avaient toutes les raisons de la critiquer. De n’en voir que peut-être que les aspects historiques les plus sombres. Je veux qu’ils soient à nouveau fiers d’être Français. »
La diatribe de la chef frontiste avait fait ressurgir en pleine lumière non seulement la continuité antisémite du FN mais également l’histoire originelle de ce parti, dont nombre de fondateurs étaient issus de la collaboration avec les nazis.

Nous condamnons également la reprise par Jean-Luc Mélenchon d'une argumentation proche de celle de ces duettistesRéagissant aux propos de Marine Le Pen, il avait estimé dans un premier temps que ce qu'elle avait dit "déclench[ait] des polémiques absolument inutiles. L'Histoire de France a fait que les présidents successifs ont fait évolué la question et le regard que l'on portait dessus." "Pourquoi rallume-t-elle cette querelle? Pour blesser?", se demandait-il alors . "Le président Chirac a dit une fois une chose ( discours de 1995 ). Tâchons de nous tenir à une continuité dans notre regard sur l'histoire."  « Sur cette affaire, il devient très difficile de dire que personne n'y est pour rien, alors que c'est la police française qui a organisé la rafle (...) Ça blesse, ça crée une polémique inutile.» "La République française n'est pas coupable mais la France l'est", notait-il." Donc une réaction certes modérée à l'égard de la cheffe frontiste, mais clairement dans l'esprit du discours de Chirac en 1995. 

Mais quelques semaines plus tard, à l'occasion de la commémoration du 75e anniversaire de la même rafle, le chef de la LFI disait exactement l'inverse et se retrouvait ainsi aux côtés du FN ainsi que de Sarkozy, pourfendeur de la repentance française  y compris à l'égard de la Shoah. 

Mélenchon écrivait alors : "Après cela, déclarer que la France est responsable de la rafle du Vel d’Hiv’ est là encore un franchissement de seuil d’une intensité maximale.  Mais dire que la France, en tant que peuple, en tant que nation est responsable de ce crime c’est admettre une définition essentialiste de notre pays totalement inacceptable..." . Jamais, à aucun moment, les Français n’ont fait le choix du meurtre et du crime antisémite ! Ceux qui ne sont pas juifs ne sont pas tous, globalement et en tant que Français, coupables du crime qui a été commis à ce moment-là ! Tout au contraire, par sa résistance, ses combats contre l’envahisseur et par le rétablissement de la République dès que celui-ci a été chassé du territoire, le peuple français a prouvé de quel côté il était réellement. Il n’est pas au pouvoir de Monsieur Macron d’assigner tous les Français à une identité de bourreau qui n’est pas la leur ! Non, non, Vichy ce n’est pas la France !"

Mélenchon  choisissait au passage de déformer les propos de Macron. Ce dernier n'avait fait qu'actualiser le discours de Chirac en 1995, en y introduisant une référence évidente à Marine Le Pen et en rappelant de la IIIe République était déjà ravagée par le racisme et l'antisémitisme, notamment lors des émeutes fascistes de 1934 et lors de l'accession au pouvoir du Front Populaire et de Léon Blum

Macron mettait en valeur le rôle des résistants les plus précoces, en les opposant à ceux qui collaboraient avec les nazis. Il était bien loin d’"assigner tous (!) les Français à une identité de bourreau " comme Jean-Luc Mélenchon ( JLM) faisaitt semblant de le croire. Au passage, ce dernier semblait impliquer que contrairement aux Français, d'autres populations auraient "fait le choix du meurtre et du crime antisémite". Il s'agit d'une allusion assez limpide à l'Allemagne et au prétendu vote majoritaire pour les nazis en 1933.

En se positionnant ainsi, le chef de la LFI   se plaçait, une fois de plus, dans le sillage de celui qu'il présente comme son inspirateur et modèle politique, c'est à dire François Mitterrand. Il reprenait d'ailleurs quasiment mot pour mot les termes que ce dernier utilisait afin de minimiser les responsabilités françaises dans la responsabilité des autorités françaises, au prix d'arguties juridiques de mauvaise foi.  

Car Mitterrand n'a pas du tout été "mutique" à propos  de la rafle du Vel d'Hiv' et plus généralement  à propos de la persécution des Juifs sous Vichy , contrairement à ce que Macron a choisi de  dire diplomatiquement lors de son discours . Au contraire, il a maintes fois marqué son inclinaison pour l'ambiguïté,  le mensonge, et la dissimulation en la matière. 

On connait notamment son amitié et sa complicité maintenues pendant de très longues années avec René Bousquet, chef suprême de la police de Vichy et signataire des accords dits "Bousquet-Oberg" ( général SS, chef supérieur de la SS et de la police en zone occupée) établissant la déportation des Juifs et la place centrale de la police française dans ce processus. Bousquet est l'organisateur de la rafle du Vel' d'Hiv' ainsi que de celle de Marseille en 1943 .

Le sachant parfaitement, Mitterrand agira afin de retarder le procès qui doit enfin s'ouvrir contre son ami Bousquet au milieu des années 1980. C'est ce qu'établissent les juristes de la mission de la FIDH qui font savoir que « il y a une décision politique au plus haut niveau de ne pas faire avancer l’affaire Bousquet ». Après une nouvelle plainte pour crimes contre l'Humanité déposée contre lui en 1989, Bousquet comme beaucoup d'autre bourreaux ne sera jamais jugé, car il est assassiné en 1991.

Mais il y a un autre fait: chaque 11 novembre, de 1987 à 1992, Mitterrand alors président de la République, a fait déposer une gerbe de fleurs présidentielle sur la tombe du Maréchal Pétain, à l’île d’Yeu, au prétexte du rôle de ce dernier lors la première guerre mondiale

Les associations de résistants et de victimes du nazisme avaient beau protester unanimement, rien n'y faisait. En 1992 le scandale fut plus important, car une large campagne publique se déroulait contre ce geste de révérence à l'égard du chef de la collaboration.

Du coup, le préfet de la Vendée, chargé par la présidence de la République de fleurir la tombe au nom du chef de l’État le 11 novembre, dut attendre cette année-là 17 h 15 pour se rendre en hélicoptère sur l'île d'Yeu, lieu de sépulture de Pétain. Il craignait  d'être confronté aux manifestants présents sur place. C'était juste après que Serge Klarsfeld et la quarantaine de personnes l'accompagnant eurent pris le dernier bateau régulier de retour de l'île. Ils étaient venus «s'assurer qu'une gerbe ne sera plus déposée sur la tombe de Pétain par le président de la République». Au bout du compte, la gerbe du préfet côtoyait celles déposées dans les heures précédentes par Jean-Marie Le Pen et par "l'Association nationale Pétain Verdun" (ANPV, émanation des nostalgiques de Vichy). 

Devant l’ampleur du scandale, Mitterrand fut contraint de suspendre l'hommage à Pétain à partir de 1993, c'est à dire à la toute fin de son deuxième septennat .

Or, c'est Pétain qui a promulgué le statut discriminatoire des Juifs dès 1940 et l'a même personnellement aggravé par des annotations. C'est lui qui a instauré la collaboration avec Hitler et l'Allemagne nazie.

On comprend dès lors que Mélenchon, disciple revendiqué de Mitterrand, préfère semer le confusion sur les responsabilités des uns et des autres dans la déportation des Juifs de France, afin de protéger la mémoire de son mentor.

 Une deuxième vague antisémite

La campagne actuelle consistant à salir la mémoire des victimes de la Shoah et de l' Apartheid  vient à la suite d'une première vague déjà très violente. 

Soral, toujours en liberté malgré ses condamnations à des peines de prison ferme,   était évidemment  au premier plan avec sa vidéo nommée Couillonavirus Communauté organisée qui tient la France. Il y stigmatisait 

"le gang qui a en charge la médecine d’État : Buzyn, Lévy, Bauer, Hirsch, Jacob, Guedj, Salomon… C’est la liste de Schindler. » il éructe que les Juifs « veulent faire du pognon sur le dos des Français, affaiblir le peuple français par le nombre de morts » .

Cette propagande se focalise notamment sur la diabolisation d’Agnès Buzyn et de son mari Yves Lévy, ancien directeur de l’Inserm.
Elle prend notamment pour prétexte d’une part le rôle de l’ancienne ministre de la Santé dans les débuts de l’épidémie et d’autre la présence d’Yves Lévy lors de l’accréditation d’un laboratoire de recherche de haute sécurité financé par la France à Wuhan, le 23 février 2017. 

Selon ces théories, le virus du Covid est issu de ce laboratoire et a été volontairement répandu avec la complicité, voire même sous la responsabilité d’Yves Lévy,  tandis que son épouse sabotait la prise en charge de l’épidémie en France. On peut même voir des caricatures montrant Agnès Buzyn en train d'empoisonner un puits, comme dans la tradition antisémite séculaire ( ci-deesous) 


Mais au delà de ces cibles, on retrouve le site complotiste et antisémite Mondialisation.Ca publie ainsi un texte qui accuse les Israéliens de diffuser le virus.
De son côté Marine Le Pen a plusieurs fois relayé la rumeur d’une origine « mystérieuse et inconnue » du coronavirus.
Elle prolonge ainsi les thèse de son parti contre les acquis de la santé publique.

La tradition antisémite en action 
Cette propagande ne surgit pas du néant. Elle s’inscrit au contraire dans une tradition fort ancienne.  
Ceux qui jouent sur la hantise des grandes épidémies ont recours à tous les poncifs de l'antisémitisme historique, concernant particulièrement la peste. 
Ainsi lors l’épidémie de peste noire qui toucha l'Europe entre 1347 et 1350, les agitateurs antisémites l'attribuèrent à un acte satanique orchestré par les Juifs qui voulaient dominer le monde en empoisonnant l'air et l'eau.
Une vague de massacres s'ensuivit notamment dans les aires germaniques et catalanes : en 1348 en Catalogne, les violences antijuives se diffusent presque au même rythme que la peste : Hyères, Toulon, Perpignan, puis Barcelone (peste le 15 mai 1348, pogrom le 17 mai) et de là Tàrrega (peste le 30 juin, pogrom le 6 juillet)
Aucune communauté juive importante d'Allemagne ne fut épargnée par les massacres et  les pillages. A Berne et à Zurich, des Juifs furent jugés et exécutés.
2000 Juifs furent tués à Strasbourg lors du "massacre de la Saint Valentin" en février 1349, d'autres victimes furent nombreuses à Colmar, Worms, Francfort, Cologne et ailleurs.

Plus près de nous le spectre de la « peste juive » réapparut en 1920
Aux premiers jours du mois de décembre 1920, une  rumeur est diffusée dans Paris : une pandémie inconnue et mortelle, la maladie n° 9 ( nom de code pour la peste), dont seraient porteurs les immigrés juifs originaires d'Europe orientale, se propagerait à vive allure dans les quartiers populaires de la capitale.
Les pouvoirs publics, impuissants à endiguer l'épidémie, auraient déjà recensé plusieurs centaines de cas mais refuseraient d'en faire état. La presse s'empare de l'affaire, bientôt instrumentalisée par la droite nationale et antisémite.
La crainte de la prétendue "maladie n° 9 " donne lieu, au Sénat, à une séance houleuse et retentissante le 2 décembre 1920. De nombreux élus dénoncent le caractère " inassimilable " des " Juifs d'Orient ", accusés de répandre l'épidémie, avec la complicité de leurs coreligionnaires installés en France depuis plusieurs générations. Présentés comme réfractaires aux mœurs de la civilisation occidentale, assimilés à des rats grouillant dans Paris, les Juifs sont également accusés de propager le " microbe " du " bolchevisme défaitiste ". 
Les classiques de l’antisémitisme tels le faux nommé Protocole des Sages de Sion et Mein Kampf martèlent ce genre d’accusations.
Il ne s’agit pas seulement de propos hallucinés et sans effet pratique mais d’un encouragement à la violence antisémite.
Celle-ci s’est manifestée ces dernières années lors des attentats meurtriers des synagogues de Pittsburgh, de San Diego et de Halle en Allemagne. Or les auteurs de ces attentats ont commis leurs crimes  en s’appuyant sur les accusations complotistes portées contre les Juifs et leurs actions maléfiques. Ainsi Robert Bowers, le terroriste de Pittsburgh a donné comme raison de son passage à l'acte une accusation elle-aussi éternelle contre « les Juifs coupables de favoriser les migrants afin de détruire l'Amérique. »
 
 16 et  17 juillet 1942: «Vent printanier»
Ce fut le nom de code imaginé pour la plus vaste opération d'arrestations de Juifs pendant la Seconde guerre mondiale en France et pour laquelle le régime de Vichy avait mobilisé la police française.

D'autres rafles avaient précédé celle-ci, dont celle du 20 août 1941. 

Puis le 7 juin 1942, le port de l'étoile jaune entre en vigueur pour les Juifs de la zone occupée et ce dès l'âge de 6 ans. Il s'agissait ainsi pour les nazis de désigner et stigmatiser la population juive.





  
Les 16 et 17 juillet 1942, à Paris 12884 Juifs  furent arrêtés par la police française jusqu'à la fin de l’opération le 17 juillet à 13 h. Les fiches des « absents » lors de la rafle restent dans les commissariats et des équipes spéciales font des visites régulières pendant plusieurs semaines, comme l'indique l'historien Laurent Joly dans son livre " L' État contre les Juifs" ( voir ici notre entretien avec l'auteur)
  
Au total le nombre de raflé.e.s jusqu'au 20 juillet est de 13152.  Cette rafle se fait à la demande des nazis, avec l'accord du gouvernement de Pétain et Laval.


1129 hommes, 2916 femmes et 4115 enfants sont enfermés dans l’enceinte sportive du Vélodrome d’Hiver. Les conditions sont effroyables, comme en témoignent les rescapé.e.s

Dans ce qui fut un enfer et une antichambre de la mort, il faut rendre hommage aux personnes qui ont montré leur humanité et leur détermination dans l'enceinte du Vel d'Hiv. Il s’agit bien sûr des infirmières et assistantes sociales qui se sont engagées dans l’aide  aux internés, mais aussi des pompiers du capitaine Pierret.

 
Ils étaient une demi-douzaine de pompiers a peine; ils ont passé des heures à distribuer de l’eau et recueilli à eux seuls des centaines de messages qu’ils sont allés poster incognito le lendemain depuis des points différents de Paris pour ne pas éveiller les soupçons de l’administration. Pierret est aussi entré en résistance, fournissant les plans des installations militaires allemandes de Paris aux alliés.

Les raflés du Vel d'Hiv' prennent la route de l'extermination

A partir du Vel d'Hiv', les couples sans enfants et les célibataires (1989 hommes et 3003 femmes) sont internés au camp de Drancy.  
Du 19 au 22 juillet, les familles du Vél’ d’Hiv’ sont quant à elles transportées dans les camps de Pithiviers et Beaune-la-Rolande (Loiret) gérés par l’administration française. Adultes et adolescents sont alors déportés en premier, par 4 convois entre le 31 juillet et le 7 août 1942.

Le sort des enfants 

Brutalement séparés de leurs parents, environ 3000 enfants en bas-âge sont laissés sur place dans une affreuse détresse. Les parents ont été rapidement déportés vers Auschwitz, alors que les nazis n’ont pas encore donné leur réponse quant au sort des enfants. 
La période durant laquelle les enfants internés dans les camps de Pithiviers et Beaune-la-Rolande ont vécu séparés de leurs parents déjà déportés est décrite par les témoins comme un des moments les plus insupportables. Âgés de 2 à 15 ans, ceux-ci restent seuls durant plusieurs semaines. Désorientés par l’absence de leurs parents et vivant dans des baraques inadaptées à la présence d’enfants, ils vivent dans des conditions d’hygiène catastrophiques. Huit d'entre eux meurent durant cette période.
 
Le 13 août 1942, les services d’Eichmann décident que les enfants doivent également être déportés: ils sont alors transférés vers Drancy et, de là, embarqués dans les convois partant pour Auschwitz entre le 17 et 31 août 1942. Aucun d’entre eux n’est revenu.

La responsabilité écrasante du régime de Vichy dans les déportations des Juifs est restée longtemps un sujet tabou,
Enfin, c'est seulement en 1995 lors de la cérémonie commémorative de la rafle du Vel' d'Hiv en juillet que Jacques Chirac reconnut publiquement que les autorités françaises avaient accompli l’irréparable, en déclarant notamment : «Manquant à sa parole, elle (la France) livrait ses protégés à leurs bourreaux.»
Une partie de la droite a rejeté cette prise de position, soit ouvertement , soit en attaquant la « repentance » comme Sarkozy à plusieurs reprises, soit en défendant ouvertement Pétain comme Eric Zemmour, également candidat potentiel à la présidentielle de 1922
    
Dans nos combats contre contre tous les génocides et contre tous les racismes, la date du 16 et 17 juillet 1942 représente une date importante au cours de laquelle nous honorons la mémoire des victimes et renouvelons notre engagement à lutter contre toutes les formes de racisme,  d'antisémitisme et de négationnisme.

Lors de cette journée nous rappelons aussi les autres victimes de génocides plus récents ou  plus anciens afin que justice leur soit rendue et pour éviter de nouveaux crimes du même type.

En effet, l'impunité des auteurs de génocides et massacres représente un facteur évident de récidive et de perpétuation de ces actes criminels. C'est pourquoi, plus que jamais et en permanence,  la mémoire des génocides nourrit nos combats. 
 
Memorial 98
 
 
 
 
 

 

jeudi 14 mars 2019

Contre l'intimidation des relais de Poutine: soutien à Cécile Vaissié

Mise à jour du 14 juin 2019: Relaxe quasi totale et échec de l'opération d'intimidation.

Le verdict du procès de Cécile Vaissié et de son éditrice rejette la quasi totalité des allégations de ceux qui l'ont traînée devant les tribuneaux. Il ne retient qu'un seule passage sur les vingt mis en cause par les plaignants. L'auteure est condamnée à 500 euros d'amende avec sursis. Néanmoins Olivier Berruyer ( voir ci-dessous) obtient des dommages-intérêts et des frais de justice. C'est évidemment de trop mais l'opération visant à empêcher d'enquêter sur les complices de Poutine a échoué.
Memorial 98 

Mise à jour du 19 mars 2019:
Récit du procès par le journaliste Antoine Hasday pour Slate 

L'avocat de cinq des six plaignants, Me Assous, a osé comparer Cécile Vaissié au négationniste Robert Faurisson.
C'est particulièrement choquant de la part d'un avocat qui se présente comme un disciple de Me Jacques Vergès, lequel a défendu avec enthousiasme Klaus Barbie, chef de la Gestapo de Lyon et bourreau des enfants juifs d'Izieu
Lors de ce procès, Vergés a organisé avec Barbie une machination visant à salir le résistant Raymond Aubrac ( voir à la fin de l'article)


Mise à jour du 15 mars:  Bonne nouvelle 
Au soir du deuxième jour du procès, le procureur requiert la relaxe de Cécile Vaissié et de son éditrice. Résultat du délibéré le 31 mai prochain. Nous renouvelons notre soutien. 

Memorial 98 




Cécile Vaissié et son éditeur " Les petits matins"  s'ajoutent à la liste  de journalistes et d’universitaires qui travaillent sur la Russie contemporaine et se retrouvent pour cette raison devant les tribunaux. Leur procès débute ce 14 mars à Paris.
Leur crime ? Avoir mis en lumière les réseaux multiples soutenant la politique du maître du Kremlin. Dans ce cas il s'agit de la parution en mars 2016 du livre " Les réseaux du Kremlin en France"  

Ces réseaux sont particulièrement prompts à attaquer en justice. Il y a là une volonté d’intimider quiconque met au jour les liens entre ces soutiens pro­-Poutine et leur présentation orientée et mensongères   des informations concernant notamment la politique étrangère russe.

Notons, à droite et à l'extrême-droite, Thierry Mariani et Valérie Boyer, le RN/FN qui a été chercher une reconnaissance et des financements chez Poutine et a intégré en troisième position de sa liste aux européennes le lobbyiste quasi-officiel Mariani, mais aussi Nadine Morano ( qui a créé au Parlement européen un groupe de pression nommé " Pour un nouveau dialogue avec la Russie" ),  Luc Ferry, l'antisémite enragé Soral reçu à Moscou en juin 2016, Marion Maréchal qui a participé à des conférences du Kremlin  etc...



D’ailleurs Jordan Bardella, tête de liste du RN aux européennes est en train de préparer un grand rassemblement à Rome le 29 mars, avec un invité surprise : le parti de Poutine nommé Russie Unie. Le rassemblement sera conclu par  Matteo Salvini,  fan de longue date de Poutine qui tente de fédérer toute cette mouvance en vue des européennes.
 
Salvini à Moscou avec le portrait de Poutine


Aux  côtés des jeunes Russes, Français et Italiens, il y aura tout  le reste de lafachosphère européenne:  les Allemands de l’AFD, les Autrichiens du FpO dont le parti est partenaire de Russie unie , les Belges du Vlaams Belang, les Britanniques de Ukip responsables de la campagne raciste du Brexit et les Polonais du PiS qui sont au pouvoir actuellement à Varsovie et qui, sur le papier également, n’entretiennent aucune relation officielle avec le RN.


Des journalistes de Decodex, le groupe de fact-checking du Monde ont déjà été traînés en justice par les relais de Poutine , tout comme le journaliste Nicolas Hénin, spécialiste de la Syrie où il fut otage, poursuivi en diffamation par des proches de l’ambassade de Russie à Paris pour des passages de son livre La France russe. Enquête sur les réseaux Poutine (Fayard, 2016).
Parmi les plaignants contre Cécile Vaissié, on trouve Guéorgui Chépélev, dirigeant du « Conseil de coordination des compatriotes ( russes) » mis en place directement par l’ambassade de Russie à Paris, comme dans les autres pays où ces structures existent.
Il y a surtout dans cette affaire deux personnages qui ont fait et font encore beaucoup de ravages à gauche.
Il s'agit d'une part de Djordje Kuzmanovic ex-conseiller de Mélenchon et "orateur national" de la LFI. Il a été aussi ex-secrétaire national du Parti de gauche (PG) en charge des questions internationales et de défense. Il est maintenant mis à l'écart par Mélenchon mais se déclare toujours membre de la France Insoumise. La raison de son départ ne semble pas liée à son activité pro-Poutine
En effet Mélenchon lui-même a plusieurs fois apporté son soutien à Poutine, notamment à propos de la Syrie ou il considérait que " Poutine règle le problème" alors que l'armée russe  a semé la mort et la désolation.
Mélenchon a également calomnié les opposants russes notamment lors de l'assassinat de Boris Nemtsov. Il a réaffirmé cette position ces derniers jours dans sa tribune sur l’Europe en accusant Macron  de « russophobie »
L'autre plaignant est Olivier Berruyer, du site Les Crises, qui utilise une phraséologie de gauche afin de réaliser un travail de désinformation au profit quasi-exclusif du pouvoir russe, dont il approuve notamment l’intervention en Syrie. Il a ainsi nié les bombardements chimiques du régime à Khan Chikhoun le 4 avril 2017, qui ont tué 97 personnes.
Berruyer a été l'invité des journées d'été de la France insoumise 2017 pour une conférence sur le thème : «Faut-il “dégager” les médias ? Dénoncer leur système, combattre leurs effets, les contourner et créer». Cette conférence était animée par la fameuse Sophia Chikirou, alors directrice du Media et de la communication de Mélenchon, avec Aude Lancelin depuis devenue la nouvelle directrice du Média, Thomas Guénolé, candidat aux européennes sur la liste LFI et donc Olivier Berruyer.

Face à ces techniques d’intimidations destinées à verrouiller la critique, empêcher tout débat et toute recherche et à des menaces qui touchent également plusieurs journalistes et universitaires nous  exprimons notre entière solidarité à Cécile Vaissié et à son éditeur.


On notera que l'avocat commun de cinq des six plaignants, Me Jérémy Assous, est également l'avocat du média russe RT-France. Cet avocat se présente lui-même comme un disciple de Jacques Vergès  . C'est inquiétant car Vergès, d'abord identifié comme anti-impérialiste, poursuivit sa carrière en défendant les autocrates africains contre les ONG et également Klaus Barbie, chef de la Gestapo de Lyon. Il mit alors en œuvre une campagne de calomnies contre le résistant Raymond Aubrac


Memorial 98


mardi 10 janvier 2017

Mélenchon, l'âne, et le Front National .


A part le Front National, qui peut prétendre aujourd'hui que le parti d'extrême-droite a la moindre difficulté à mener des campagnes électorales ? 
La dite Marine Le Pen a déjà 6 millions d'euros assurés par le "prêt" de la Cotelec, la structure financière de Jean-Marie Le Pen. Un  prêt dans l'entre-soi du fascisme français, qui atteste du portefeuille bien garni de l'extrême-droite. 
En 2014, le parti avait obtenu 5 millions d'euros de fonds publics, et se permettait un budget de fonctionnement de 8 millions d'euros. 


De plus les enquêtes judiciaires menées depuis des années ont mis en lumière deux pratiques très répandues: d'une part, l'obligation pour les candidats de financer eux-même une partie de leur campagne en achetant au FN des kits de campagne. Le fasciste ambitieux doit donc avoir les moyens de son ambition et mettre la main à la poche. D'autre part, les emplois fictifs qui permettent de faire travailler directement pour le parti des salariés payés par l'argent public.
Certes le Front National a décidé qu'il lui fallait encore au moins 8 millions d'euros. C'est chose commune, dans la vie, que de vouloir plus de moyens, en politique comme dans la vie quotidienne. 
Et c'est chose encore plus commune que de vouloir beaucoup d'argent quand on en a déjà beaucoup. On ne saurait reprocher aux fascistes d'être comme tout le monde. 

Seulement, tout le monde n'a pas le culot de se déclarer pauvre et maltraité en disposant de millions d'euros de fonds propres. Tout le monde n'a pas le culot de prétendre être persécuté par le prétendu "système" en percevant par ailleurs des millions d'euros d'argent public. 
Les fascistes se reconnaissent à ce qu'ils osent tout. Et l'on commence à favoriser la diffusion des thèses fascistes, dès lors qu'on reprend comme point de départ de son raisonnement, l'argumentation même des fascistes. 


En demandant aux banques françaises de prêter de l'argent au FN et en dénonçant un refus dont il ne sait rien, refus qui serait "spécifique" au parti d'extrême-droite, c'est évidemment tout le discours complotiste fasciste qui est avalisé. Chacun , évidemment , sait bien ce que l'extrême-droite met derrière sa dénonciation des "banques" et de la "finance qui conspire contre elle". Chacun et, Jean-Luc Mélenchon en premier lieu, car nul ne peut ignorer l'un des codes antisémites les plus éculés de l'extrême-droite.

" Mais enfin, il y a les faits", diront certains. Quels faits ? Les quelques lettres de refus de prêts fournis par le FN il y a quelques mois ? Mais chaque client de banque sait bien qu'un refus de prêt ne témoigne en général pas d'un acharnement personnel. Ainsi certaines banques mises en cause ont-elle fait savoir qu'elles ne finançaient pas les partis politiques. D'autres ont pu avoir cent raisons de ne pas financer spécifiquement le Front National. Le FN , dans sa propagande, ne fournit évidemment pas ses dossiers de demande, ni les garanties qu'il propose. On peut également penser qu'une banque prudente hésitera à financer un parti et un micro-parti Jeanne, qui font actuellement l'objet de procédures judiciaires pour des délits liés à des malversations financières et à du détournement d'argent public. Lesquelles procédures pourraient aboutir et coûter cher au parti et à ses dirigeants. 

Aussi bien, affirmer qu'il y ait dans les quelques refus présentés par le FN une affaire politique est une affirmation gratuite de propagande. D'ailleurs il y a un élément factuel tout à fait concret et connu de tous qui devrait clore le débat: a-t-on jamais vu le FN ne pas faire campagne , et campagne somptueuse, et tout à fait semblable à celles d'autres partis ? Non. 


Comme on ne l'a jamais vu ne pas obtenir ses 500 signatures, y compris avec l'aide de partis de droite qui prétendent le combattre( voir ici). Ce qui était le prétexte précédent pour hurler au déni de démocratie, et au complot , pour obtenir une couverture médiatique assurée en début de campagne, et pour faire passer les vessies pour des lanternes, et les châtelains de Saint Cloud pour des roturiers persécutés. Malheureusement, cette mystification là a fait long feu, conséquence des succès électoraux du Front, justement, qui rendent très visible le fait qu'il disposera sur ses propres forces des signatures nécessaires. 


Faute de grives, on mange des merles, et la sornette du complot des banques en fait donc office. Elle a un second avantage, permettre de présenter les liens évidents et structurels entre les réseaux de Poutine et Marine Le Pen comme une "obligation", sans signification politique. Et une nouvelle fois, sur ce sujet, ce n'est pas de manière désintéressée que Mélenchon avale les couleuvres brunes et les recrache telles quelles. Sa ligne politique, en effet, ne présente sur la défense de Poutine, que peu de différences avec celle des Le Pen, on l'a vu encore récemment sur ses déclarations infâmes concernant la révolution syrienne, et son voeu d'une "coalition universelle avec la Russie," c'est à dire un regroupement militaire avec le boucher d'Alep.


Tout ceci serait juste pitoyable si chaque reprise des campagnes du FN n'élargissait pas son audience . Tout ceci serait juste pitoyable, si on ne touchait pas au cœur même du discours fasciste : se faire passer pour une victime quand on est un bourreau, éructer de front les mensonges les plus grotesques pour imposer une vision déformée et dangereuse de la réalité.


Car l'antiracisme conduit, logiquement à un seul souhait, qui malheureusement reste un vœu pieux : qu'effectivement le Front National, comme toutes les autres formations fascistes cesse de bénéficier de la manne de l'argent public d'une démocratie qu'il combat de toutes ses forces. Qu'il y ait des banques pour lui refuser même mille euros. Si seulement, mais si seulement il y avait un complot généralisé contre le Front National, et bien il aurait pour nom antifascisme.
Seulement voilà, il n'y en a pas. Le risque que Marine Le Pen devienne présidente n'a jamais été aussi élevé. Et chaque reprise de sa propagande par un autre parti conforte ce risque et de manière générale , diffuse dans tous les camps politique la vision du monde mensongère des fascistes.


Le Front National est un parti riche, puissant et influent. Que cette évidence là soit balayée dans ce que les partisans de Mélenchon appellent un « trait d'esprit » et un « coup de pied à l'âne » est à la fois inacceptable et désastreux.
Les ânes au moins, ont de la mémoire.

Nad Iam
MEMORIAL 98