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dimanche 19 avril 2020

Révolte du Ghetto de Varsovie: un combat héroïque au coeur des ténèbres.

                                              Dans le ghetto, pendant la révolte

Le 19 avril, date du début du soulèvement du ghetto de Varsovie en 1943, symbolise l'extermination des Juifs d'Europe par les nazis

Elle est commémorée cette année dans les conditions particulières de la pandémie du Covid19, comme les autres génocides, marqués chaque année en avril.
La pandémie donne d'ailleurs lieu à un déferlement de propagande antisémite et complotiste, reprenant les thèmes les plus archaïques et nauséabonds en la matière.  
La révolte d'avril 1943 se produisit dans les conditions terribles d'un ghetto déjà en partie vidé de ses habitants. 
En effet, depuis le 23  juillet 1942, jour après jour, cinq à six mille personnes sont emmenées par les nazis, du ghetto vers la "Umschlagplatz"  ou "place du transbordement" puis déportées vers le camp d'extermination de Treblinka. 

Le début du ghetto et l'œuvre immense d'Emmanuel Ringelblum
Le ghetto de Varsovie a été instauré le 12 octobre 1940, qui correspondait cette année-là à la grande fête juive de Yom Kippour.
Les nazis, dans leur rage antisémite, utilisaient souvent les dates des fêtes religieuses juives afin de procéder à des persécutions particulières ou de marquer leur "connaissance" du judaïsme.
Les nazis annoncèrent à la population juive qu'elle devait déménager dans ce "quartier juif" exigu qui fut ceint de barbelés. Le 16 novembre, on y transfère de force les Juifs, soit un tiers de la population de la ville, qui doivent se concentrer sur sur 2,4 % de sa superficie : 450 000 personnes sont alors coupées du reste du monde.
   
L"Aktion" comme l’appelaient les nazis, de déportation vers la mort, débuta le 22 juillet 1942. Cette date correspondait au jour de Tish'a Beav, qui commémore par le deuil et le jeûne la destruction du Temple juif de Jérusalem par l'armée romaine en l'an 70 de notre ère.

Chaque 22 juillet à Varsovie, une marche démarre du monument de l'"Umschlagplatz", lieu d'où partaient les convois de déportés puis parcourt l'ancien espace du ghetto, dont il ne subsiste strictement rien.
Elle se termine devant le centre culturel et de mémoire dédié à Emmanuel Ringelblum, héroïque historien du ghetto et animateur du réseau "Oneg Shabbat" qui en préserva la mémoire. 
Au moment où la Pologne est envahie par les Allemands en 1939,  Emmanuel Ringelblum a trente-neuf ans, c'est un spécialiste reconnu de l’histoire du peuple juif.
Il vit alors à Varsovie avec sa famille et a très vite compris le sort que les nazis réservent aux Juifs d’Europe. 
Il aurait pu quitter la Pologne avec sa famille mais sa femme et lui décident de rester pour témoigner «pour les générations futures». Leçon de courage, terrible choix, puisqu’en allant jusqu’au bout de sa mission d’historien, d’écrivain et de témoin, il meurt assassiné par les nazis dans la prison Pawiak en 1944 avec sa femme et son fils.
Ringelblum avait créé un groupe de travail culturel du nom d’« Oyneg Shabbos »  ( c'est à dire le plaisir du Shabbat).
Ce nom était en fait une couverture. L’objectif était de décrire précisément les terribles conditions de vie des Juifs dans le ghetto. Les activistes encouragèrent tous les habitants du ghetto à écrire eux-mêmes ce qu’ils vivaient au quotidien et à leur remettre leurs écrits. En janvier 1943, alors que sévissait la seconde grande rafle du ghetto, sentant «l’inéluctable fin», Emmanuel Ringelblum et les membres d’Oyneg Shabbos enfermèrent les milliers de documents et de témoignages recueillis pendant toutes ces années dans des bidons de lait en fer qu’ils cachèrent sous la terre, avec l’espoir qu’ils seraient retrouvés «un jour». Après la guerre, grâce à la ténacité de Rachel Auerbach, rescapée du ghetto, membre du groupe, une partie des archives fut retrouvée. Elles ont été classées au Patrimoine Mondial de l’Unesco. 
Un livre récemment paru du philosophe Georges Didi-Huberman commente les images contenues dans ces archives. 
 
Une révolte préparée

La déportation des Juifs de Varsovie s’inscrivait dans le cadre de la plus vaste "Aktion Reinhardt", organisée par les nazis en Pologne occupée; celle-ci inclut la construction des camps d'extermination de Belzec (mars 1942), Sobibor (mai 1942) et Treblinka (juillet 1942). 
Ce dernier camp joue un rôle particulier dans l'extermination des Juifs de Varsovie. 280 000 Juifs déportés de la capitale polonaise y seront assassinés. 

L'Aktion de Varsovie prit fin temporairement le 21 septembre suivant, à nouveau durant le jour de la plus importante fête juive, Yom Kippour.
Après cette grande déportation, le ghetto de Varsovie est réduit à un camp de travail où 36 000 Juifs survivent officiellement et où 20 à 25 000 clandestins se cachent. Son sursis tenait d’une part à la pénurie de main-d’œuvre gratuite dont l'administration nazie voulait disposer, et d'autre part à la nécessité d’une pause afin de recenser et d’expédier vers le Reich les biens volés dans le ghetto. 

Quelques jours après le début de la déportation de juillet, la résistance juive s’unifie dans un « Bloc antifasciste » et se dote d’une branche armée, l’Organisation juive de combat (OJC), fondée le 28 juillet 1942. Cette démarche débouchera plusieurs mois plus tard sur le soulèvement du ghetto
Les premières opérations de l'OJC sont dirigées contre les responsables de la "police juive" et autres collaborateurs.

En janvier 1943, une seconde Aktion visant à liquider le reste du ghetto est interrompue par les nazis eux-mêmes au bout de quatre jours, face à la résistance et au fait que la population se cache dans un réseau souterrain creusé durant des mois.
Heinrich Himmler, en déplacement à Varsovie, ordonne alors la destruction du ghetto et de ses habitants. Au même moment le ghetto de Cracovie est liquidé en Mars 1943.


Le 19 avril 1943, correspondant cette année là au début de la fête juive de Pessah,  les unités SS chargées de liquider le ghetto sont repoussées par les combattants. Ceux-ci ne disposent que de quelques revolvers et grenades. Quand le millier de soldats allemands pénètrent en force dans le ghetto, les résistants les attendent  barricadés dans leurs bunkers et leurs caves. Au nombre de 1000 environ, ils sont regroupés principalement dans l'Organisation des Combattants Juifs, (OJC, ZOB en polonais) commandée par le jeune Mordehaï Anilewicz, membre de l’organisation de jeunesse Hachomer Hatzaïr.
Dès l’invasion de la Pologne par les nazis, Anilewicz avait  rejoint avec des membres de son groupe l’est de la Pologne, pour aider à retarder l'avance allemande. Après l'invasion de ces régions orientales de la Pologne par les armées de Staline, à la suite du pacte germano-soviétique, les Soviétiques l'arrêtent et l'emprisonnent. Il est libéré peu de temps après, et retourne alors à  Varsovie


Face à l'insurrection, le commandant allemand est relevé de ses fonctions, le général SS Jürgen Stroop lui succède. Il est lui-même est pris de court par la rébellion des "sous-hommes" ainsi que les nazis qualifiaient les Juifs. Dès lors, les troupes SS vont incendier systématiquement les immeubles et propulser du gaz dans les souterrains afin d'en déloger les résistants. 
Ces derniers vont tenir pendant un mois, malgré leur très faible niveau d'armement et de nourriture. Plus de deux mille SS, soutenus par de l‘artillerie et des blindés, incendient le ghetto, maison après maison. Les Juifs sont asphyxiés, carbonisés, enterrés vivants dans les abris où ils sont retranchés. 
Six mille Juifs présents dans le ghetto trouvent la mort dans les combats ou se suicident. Sept mille sont fusillés sur place. Les autres sont déportés. Une poignée de miraculés échappe à la mort en s'enfuyant par les égouts.

Le 16 mai 1943, Stroop fait dynamiter la grande synagogue du ghetto. Il  annonce à Himmler : « Il n’existe plus de quartier juif à Varsovie. »

                                
Cette photo célèbre provient du rapport adressé par le général SS Stroop à Himmler  après l'écrasement de la révolte. Elle a donc été prise et diffusée dans le cadre de la propagande nazie.
Elle porte la mention " forcés hors de leurs caves" 

Le testament de Mordehaï Anilewicz

La rébellion se termine à la mi-mai. Mordehaï Anilewicz se suicide le 8 mai avec une partie de la direction de l'OJC ; il a 24 ans. 
 Le 23 avril 1943, il avait écrit dans une dernière lettre :
«Les Allemands ont fui par deux fois du ghetto. L'une de nos compagnies a résisté 40 minutes et une autre s'est battue pendant plus de six heures... Nos pertes en vies humaines sont faibles et ceci est également une réussite...
Grâce à notre radio, nous avons entendu une merveilleuse émission relatant notre lutte. Le fait que l'on parle de nous hors du ghetto nous donne du courage.
Soyez en paix, mes amis de l'extérieur ! Peut-être serons-nous témoins d'un miracle et nous reverrons-nous un jour. J'en doute ! J'en doute fort !
Le rêve de ma vie s'est réalisé. L'auto-défense du ghetto est une réalité. La résistance juive armée et la vengeance se matérialisent. Je suis témoin du merveilleux combat des héros juifs...»


Quelques jours plus tard, le 12 mai, Szmuel Zygielbojm, représentant du mouvement ouvrier juif Bund dans le gouvernement polonais en exil à Londres, se suicide dans cette ville.
Il proteste ainsi contre l’inaction des gouvernements alliés, dûment avertis de la situation en Europe de l'Est et notamment en Pologne.
Lui-même avait alerté publiquement sur l'extermination en cours.
Il laissa une lettre dont voici des extraits :
« Derrière les murs du ghetto se déroule à présent le dernier acte d’une tragédie sans précédent dans l’Histoire. La responsabilité du forfait consistant à exterminer la totalité de la population juive de Pologne retombe au premier chef sur les exécutants; mais, indirectement, elle rejaillit également sur l’humanité tout entière. Les nations et les gouvernements alliés n’ont entrepris jusqu’ici aucune action concrète pour arrêter le massacre. 
En acceptant d’assister passivement à l’extermination de millions d’êtres humains sans défense - les enfants, les femmes et les hommes martyrisés - ces pays sont devenus les complices des criminels.[...]. Mes camarades du ghetto de Varsovie ont succombé, l’arme au poing, dans un dernier élan héroïque. Il ne m’a pas été donné de mourir comme eux, ni avec eux. Mais ma vie leur appartient et j’appartiens à leur tombe commune. Par ma mort, je désire exprimer ma protestation la plus profonde contre la passivité avec laquelle le monde observe et permet l’extermination du peuple juif.

Je suis conscient de la valeur infime d’une vie humaine, surtout au moment présent. Mais comme je n’ai pas réussi à le réaliser de mon vivant, peut-être ma mort pourra-t-elle contribuer à arracher à l’indifférence ceux qui peuvent et doivent agir pour sauver de l’extermination — ne fût-ce qu’en ce moment ultime — cette poignée de juifs polonais qui survivent encore. Ma vie appartient au peuple juif de Pologne et c’est pourquoi je lui en fais don… »
 (Londres, mai 1943)

Nos pensées vont vers les victimes de cette extermination et vers ceux qui au cœur des ténèbres, entamèrent la préparation de leurs actes héroïques qui apparurent au grand jour dans les mois qui suivirent. 



Soixante-dix-sept après les déportations de Varsovie,
le nazisme est défait mais son héritage est plus que jamais à combattre
Ses héritiers  rêvent toujours de massacrer des Juifs comme le montrent les attentats récents dans les synagogues de
San Diego, Pittsburgh, Halle
En Pologne même, l’antisémitisme et le racisme sont fortement stimulés par le pouvoir de droite radicale du PiS. Celui-ci a franchi une nouvelle étape dans sa tentative visant à réécrire l’histoire du pays.
Il a promulgué en février 2018 une loi sur la "mémoire". Sous prétexte de mise en cause du terme "camp de la mort polonais", le texte menace de prison quiconque évoque la collaboration de Polonais avec le nazisme,
voire le massacre des Juifs de Jedwabne, perpétré par leurs voisins polonais. Les protestations se sont multipliées dans le monde entier mais à ce jour le pouvoir maintient l’arme révisionniste de cette loi. Le premier ministre israélien Netnayahou s’est en revanche compromis dans un accord avec le gouvernement polonais, contre l’avis des responsables du mémorial de Yad Vashem.    Ces dernières années, les menaces et intimidations contre les historiens de la Shoah ont été nombreuses. En février 2019 c’est à Paris qu’un colloque sur la Shoah en Pologne a été perturbé par des militants antisémites et nationalistes polonais.


Des propagandistes de la haine déversent des flots de propos complotistes et racistes, grâce à la complaisance des grandes plates-formes et à l'indulgence de juges qui les protègent en reculant devant l’application des lois limitant le négationnisme, comme dans le cas de Soral et Dieudonné
L'extrême-droite parrainée et soutenue par Trump et Poutine, pèse lourdement dans de nombreux pays d’Europe. 
En France, Allemagne , Autriche, Hongrie, Pologne, Italie, Grande-Bretagne, Estonie, les nostalgiques et racistes de tout poil sont à l'offensive et pour certains déjà installés au pouvoir . 

Nous en appelons plus que jamais au combat contre les idéologies et actes racistes et antisémites  quels que soient leur prétextes, ainsi que pour la mémoire des génocides et crimes contre l'humanité

MEMORIAL 98

lundi 22 juillet 2019

Septembre 1939: l'invasion de la Pologne annonce le début de la Shoah



                                          La muraille isolant le ghetto de Varsovie
 
Le 1er septembre marque l'anniversaire de l'invasion de la Pologne par les troupes nazies et du début de la seconde guerre mondiale.
Les troupes de Staline envahirent la Pologne orientale deux semaines plus tard le 17 septembre, dans le cadre du pacte germano-soviétique, dit Molotov-Ribbentrop, signé en août 1939, qui est maintenant réhabilité par Poutine.
Le 1er septembre 2019, lors du 80e anniversaire du début de l'invasion, le président allemand a présenté des excuses pour les six millions de victimes polonaises du nazisme, dont trois millions de Juifs. 
 
Le même jour, le parti d'extrême-droite AfD a connu un nouveau succès dans deux élections régionales. Or ce parti est maintenant dominé dans l'est de l'Allemagne par des dirigeants négationnistes comme Bjoern Hocke et Alexander Kalbitz (suspendu depuis pour avoir dissimulé son ancienne appartenance à un groupe néo-nazi). Mais la tentative d'alliance entre la droite et l'extrême-droite dans l'état de Thuringe a échoué face au scandale et à la mobilisation anti-fasciste.

L'invasion nazie de la Pologne a débuté par le bombardement des civils de la ville de Wielun, choisie par les nazis en raison de son importante population juive.
Elle a été surnommée Guernica polono-juive car l'ordre de la bombarder a été donné par le général Von Richthofen, ancien chef de la légion nazie Condor, dont les avions avaient rasé la ville basque de Guernica en 1937. 
Un an après le début de l'invasion, le ghetto de Varsovie a été instauré le 12 octobre 1940,  date qui correspondait cette année-là à la fête juive de Yom Kippour. Le 16 novembre suivant, on y transfèra de force les Juifs, soit un tiers de la population de la ville, concentrées sur 2,4 % de sa superficie : 450 000 personnes furent alors coupées du reste du monde.
 
Ni oubli ni pardon
 
Memorial 98 


Juillet 2109
A Varsovie, le 22 juillet marque le début de la  grande déportation des Juifs du ghetto en juillet 1942, six jours après la rafle du Vel d'Hiv' à Paris et quatre mois après la liquidation du ghetto de Cracovie .

Alors que le gouvernement polonais actuel multiplie les déclarations et actes à caractère antisémite,en s'attaquant notamment à l'histoire de la Shoah, cette date revêt une signification particulière.

Elle se produit au lendemain de l’agression par des fascistes d’une manifestation de défense des droits des LGBT à Bialystok dans la partie orientale de la Pologne. Il y a quelques semaines, c’est à Paris qu’un colloque sur la Shoah en Pologne a été perturbé par des militants antisémites et nationalistes polonais.


                           Le général SS Stroop sur l'Umschlagplatz en 1943

Chaque 22 juillet, une marche démarre du monument de l'"Umschlagplatz" lieu d'où partaient les convois de déportés, parcourt l'ancien espace du ghetto, dont il ne subsiste strictement rien et termine devant le centre culturel et de mémoire dédié à Emmanuel Ringelblum, héroïque historien du ghetto et animateur du réseau "Oneg Shabbat" qui en préserva la mémoire. 

Le ghetto de Varsovie a été instauré le 12 octobre 1940, qui correspondait cette année-là à la fête juive de Yom Kippour. Les nazis annoncèrent à la population juive qu'elle devait déménager dans ce "quartier juif" exigu qui fut ceint de barbelés.    


L"Aktion" de déportation vers la mort, comme l’appelaient les nazis, débuta le 22 juillet 1942.

Elle s’inscrivait dans le cadre de la plus vaste "Aktion Reinhardt", organisée par les nazis en Pologne occupée; celle-ci inclut la construction des camps d'extermination de Belzec (mars 1942) Sobibor (mai 1942) et Treblinka (juillet 1942). 

Ce dernier camp joue un rôle particulier dans l'extermination des Juifs de Varsovie. 280 000 Juifs déportés de la capitale polonaise y furent assassinés. 

L'Aktion de Varsovie prit fin temporairement le 21 septembre suivant, à nouveau durant le jour de la plus importante fête juive, Yom Kippour. Elle avait débuté le jour de Tish'a Beav, qui commémore par le deuil et le jeûne la destruction du Temple juif de Jérusalem par l'armée romaine en l'an 70 de notre ère.

Les nazis, dans leur rage antisémite, utilisaient souvent les dates des fêtes religieuses juives afin de procéder à des persécutions particulières ou de marquer leur "connaissance" du judaïsme.

Après cette grande déportation, le ghetto de Varsovie était réduit à  un camp de travail où 36 000 Juifs survivaient officiellement et où 20 à 25 000 clandestins se cachaient. Son sursis tenait d’une part à la pénurie de main-d’œuvre gratuite dont l'administration nazie voulait disposer, et d'autre part à la nécessité d’une pause afin de recenser et d’expédier vers le Reich les biens volés dans le ghetto. 

Quelques jours après le début de la déportation de juillet, la résistance juive s’unifie dans un « Bloc antifasciste » et se dote d’une branche armée, l’Organisation juive de combat (OJC), fondée le 28 juillet 1942. Cette démarche déboucha plusieurs mois plus tard sur la révolte du ghetto de Varsovie
Les premières opérations de l'OJC étaient dirigées contre les responsables de la "police juive" et autres collaborateurs.

En janvier 1943, une seconde Aktion visant à liquider le reste du ghetto est interrompue par les nazis eux-mêmes, face à la résistance et au fait que la population se cachait dans un réseau souterrain creusé durant des mois.
Himmler, en déplacement à Varsovie, ordonna alors la destruction du ghetto et de ses habitants. 

Le 19 avril 1943, les unités SS chargées de la mise en œuvre de cet ordre furent repoussées par des centaines de combattants ne disposant que de quelques revolvers et grenades.
C'est le début du soulèvement du Ghetto

Le commandant allemand est relevé de ses fonctions, le général SS Jürgen Stroop lui succède. Plus de 2000 SS, soutenus par de l‘artillerie et des blindés incendient maison après maison. Les Juifs sont asphyxiés, carbonisés, enterrés vivants dans les abris où ils sont retranchés. Le 16 mai 1943, Stroop fait dynamiter la grande synagogue. Il câble à Himmler : « Il n’existe plus de quartier juif à Varsovie. ». 

Le principal dirigeant de l’insurrection et de l’Organisation Juive de Combat (OJC), Mordehaï Anilewicz, se suicida le 8 mai, suivi quelques jours plus tard par Szmuel Zygielbojm, représentant du mouvement ouvrier juif Bund dans le gouvernement polonais en exil à Londres.

Nos pensées vont vers les victimes de cette extermination et vers ceux qui au cœur des ténèbres, entamèrent la préparation de leurs actes héroïques qui apparurent au grand jour dans les mois qui suivirent. 
Le nazisme fut défait mais son héritage reste plus que jamais  à combattre .
 Ses héritiers  rêvent toujours de massacrer des Juifs comme le montrent les attentats  dans les synagogues de San Diego, Pittsburgh et Halle
La pandémie du Covid donne lieu à un déluge de propagande complotiste et antisémite . Elle reprend les accusations les plus nauséabondes qui ont marqué l'Histoire des persécutions contre les Juifs.   
Des propagandistes de la haine déversent des flots de propos complotistes et racistes, grâce à la complaisance des grandes plates-formes et à l'indulgence de juges qui les protègent en reculant devant l’application des lois limitant le négationnisme, comme dans le cas de Soral et Dieudonné
L'extrême-droite parrainée et soutenue par Trump et Poutine, pèse lourdement dans de nombreux pays d’Europe, comme on peut le constater à l’occasion des élections européennes du mois de mai 2019. 
En France, Allemagne, Autriche, Hongrie, Pologne, Italie, Grande-Bretagne, Estonie, les nostalgiques et racistes de tout poil sont à l'offensive et pour certains déjà installés au pouvoir . 
Nous en appelons plus que jamais au combat contre les idéologies et actes racistes et antisémites  quels que soient leur prétextes, ainsi que pour la mémoire des génocides et crimes contre l'humanité (à voir ici et ici  )

MEMORIAL 98

mercredi 18 avril 2018

Révolte du ghetto de Varsovie: le nazisme défié.



Cette photo célèbre provient du rapport adressé par le général SS Stroop à Himmler  après l'écrasement de la révolte.  Elle a donc été prise dans le cadre de la propagande nazie.
Elle porte la mention " forcés hors de leurs caves" 



Le 19 avril, date du début du soulèvement du ghetto de Varsovie, symbolise l'extermination des Juifs d'Europe par les nazis.

Un soulèvement préparé.
 
La révolte d'avril 1943 se produit dans les conditions terribles d'un ghetto déjà en partie vidé de ses habitants. En effet, depuis le 23  juillet 1942, jour après jour, 5.000 à 6.000 personnes sont emmenées par les nazis, du ghetto vers la "Umschlagplatz"  ou "place du transbordement" puis de là transférées vers le camp d'extermination de Treblinka. 

Cette déportation s’inscrit dans le cadre de la plus vaste "Aktion Reinhardt", organisée par les nazis en Pologne occupée; celle-ci inclut la construction des camps d'extermination de Belzec (mars 1942), Sobibor (mai 1942) et Treblinka (juillet 1942). 
Ce dernier camp joue un rôle particulier dans l'extermination des Juifs de Varsovie, 280 000 Juifs déportés de la capitale polonaise y seront assassinés. 
L'Aktion de Varsovie prend fin temporairement le 21 septembre 1942, le jour de la plus importante fête juive, Yom Kippour. Les nazis, dans leur rage antisémite, utilisaient souvent les dates des fêtes religieuses juives afin de procéder à des persécutions particulières ou marquer leur "connaissance" du judaïsme.

Après cette grande déportation, le ghetto de Varsovie est réduit à  un camp de travail où 36 000 Juifs survivent officiellement et où 20 à 25 000 clandestins se cachent. Son sursis tient d’une part à la pénurie de main-d’œuvre gratuite dont l'administration nazie veut disposer et d'autre part à la nécessité d’une pause afin de recenser et d’expédier vers le Reich les biens volés dans le ghetto.


Les débuts de la résistance dans le ghetto

Quelques jours après le début de la déportation de juillet, la résistance juive dans le ghetto s’était unifiée dans un « Bloc antifasciste » et doté d’une branche armée, l’Organisation juive de combat (OJC), fondée le 28 juillet 1942. 
Les premières opérations de l'OJC sont dirigées contre les responsables de la "police juive" et autres collaborateurs.
En janvier 1943, une Aktion visant à liquider le reste du Ghetto est interrompue par les nazis eux-mêmes au bout de 4 jours, face à la résistance et au fait que la population se cache dans un réseau souterrain creusé durant des mois.

Himmler ordonne alors la destruction du ghetto et de ses habitants. Au même moment le ghetto de Cracovie est liquidé en Mars 1943.
http://www.memorial98.org/2017/03/le-ghetto-de-cracovie-mars-1943.html
                                    Dans le ghetto, pendant la révolte

Le 19 avril 1943, correspondant à la date de la fête juive de Pessah,  les unités SS chargées de liquider le ghetto sont repoussées par les combattants. Ceux-ci ne disposent que de quelques revolvers et grenades. Quand le millier de soldats allemands pénètrent en force dans le ghetto, les résistants les attendent  barricadés dans leurs bunkers et leurs caves. Au nombre de 1000 environ, ils sont regroupés principalement dans l'Organisation des Combattants Juifs, (OJC) commandée par le jeune Mordehaï Anilewicz.

Le commandant allemand est relevé de ses fonctions, le général SS Jürgen Stroop lui succède. Il est lui-même est pris de court par la rébellion des "sous-hommes" ainsi que les nazis qualifiaient les Juifs. Dès lors, les troupes SS vont incendier systématiquement les immeubles et propulser du gaz dans les souterrains afin d'en déloger les résistants. 
Ces derniers vont tenir pendant un mois, malgré leur très faible niveau d'armement et de nourriture. Plus de 2 000 SS, soutenus par de l‘artillerie et des blindés, incendient le ghetto, maison après maison. Les Juifs sont asphyxiés, carbonisés, enterrés vivants dans les abris où ils sont retranchés. 
6.000 Juifs présents dans le ghetto trouvent la mort dans les combats ou se suicident. 7.000 sont fusillés sur place. Les autres sont déportés. Une poignée de miraculés échappe à la mort en s'enfuyant par les égouts.  

Le 16 mai 1943, Stroop fait dynamiter la grande synagogue du ghetto. Il câble à Himmler : « Il n’existe plus de quartier juif à Varsovie. ». 

La rébellion se termine à la mi-mai.  Mordehaï Anilewicz, se suicide le 8 mai avec une partie de la direction de l'OJC, à l'âge de 24 ans.  Le 23 avril 1943, il avait écrit dans une dernière lettre :
«Les Allemands ont fui par deux fois du ghetto. L'une de nos compagnies a résisté 40 minutes et une autre s'est battue pendant plus de six heures... Nos pertes en vies humaines sont faibles et ceci est également une réussite...
Grâce à notre radio, nous avons entendu une merveilleuse émission relatant notre lutte. Le fait que l'on parle de nous hors du ghetto nous donne du courage.
Soyez en paix, mes amis de l'extérieur ! Peut-être serons-nous témoins d'un miracle et nous reverrons-nous un jour. J'en doute ! J'en doute fort !
Le rêve de ma vie s'est réalisé. L'auto-défense du ghetto est une réalité. La résistance juive armée et la vengeance se matérialisent. Je suis témoin du merveilleux combat des héros juifs...»

Quelques jours plus tard, le 12 mai, Szmuel Zygielbojm, représentant du mouvement ouvrier juif Bund dans le gouvernement polonais en exil à Londres, se suicide dans cette ville.
Il proteste ainsi contre l’inaction des gouvernements alliés, dûment avertis de la situation en Europe de l'Est et notamment en Pologne. Lui-même avait alerté publiquement sur l'extermination en cours.
Il laissa une lettre dont voici des extraits :
« Derrière les murs du ghetto se déroule à présent le dernier acte d’une tragédie sans précédent dans l’Histoire. La responsabilité du forfait consistant à exterminer la totalité de la population juive de Pologne retombe au premier chef sur les exécutants; mais, indirectement, elle rejaillit également sur l’humanité tout entière. Les nations et les gouvernements alliés n’ont entrepris jusqu’ici aucune action concrète pour arrêter le massacre. 
En acceptant d’assister passivement à l’extermination de millions d’êtres humains sans défense - les enfants, les femmes et les hommes martyrisés - ces pays sont devenus les complices des criminels.[...]. Mes camarades du ghetto de Varsovie ont succombé, l’arme au poing, dans un dernier élan héroïque. Il ne m’a pas été donné de mourir comme eux, ni avec eux. Mais ma vie leur appartient et j’appartiens à leur tombe commune. Par ma mort, je désire exprimer ma protestation la plus profonde contre la passivité avec laquelle le monde observe et permet l’extermination du peuple juif.

Je suis conscient de la valeur infime d’une vie humaine, surtout au moment présent. Mais comme je n’ai pas réussi à le réaliser de mon vivant, peut-être ma mort pourra-t-elle contribuer à arracher à l’indifférence ceux qui peuvent et doivent agir pour sauver de l’extermination — ne fût-ce qu’en ce moment ultime — cette poignée de juifs polonais qui survivent encore. Ma vie appartient au peuple juif de Pologne et c’est pourquoi je lui en fais don… »

(Londres, mai 1943)

Nos pensées vont vers les victimes de cette extermination et vers ceux qui au cœur des ténèbres, s’opposèrent au nazisme par leurs actes héroïques. 

L’anniversaire de la révolte du ghetto renforce notre détermination à combattre tous les racismes et tous les négationnismes.

MEMORIAL 98

L’année 2018 a marqué le 75e anniversaire de la résistance et de la révolte du ghetto et le 73e anniversaire de la libération des camps nazis.

En Pologne même, l’antisémitisme et le racisme sont fortement stimulés par le pouvoir de droite radicale du PiS. Celui-ci a franchi une nouvelle étape dans sa tentative visant à réécrire l’histoire du pays. 
Il a promulgué en février 2018 une loi sur la "mémoire". Sous prétexte de mise en cause du terme "camp de la mort polonais", le texte menace de prison quiconque évoque la collaboration de Polonais avec le nazisme, voire le massacre des Juifs de Jedwabne, perpétré par leurs voisins polonais. Les protestations se sont multipliées dans le monde entier mais à ce jour le pouvoir maintient l’arme révisionniste de cette loi. Ces dernières années, les menaces et intimidations contre les historiens de la Shoah ont été nombreuses. 

Cette escalade nationaliste est à l’origine d’une marche fasciste qui a lieu à Varsovie le 11 novembre 2017, dont le gouvernement s'est félicité.

A l’occasion de la fête de l’indépendance polonaise, des dizaines de milliers de personnes ont participé à une marche organisée par une structure nommée « Camp radical national » (ONR en polonais) Celle-ci se présente comme l’héritière d’une organisation fasciste du même nom des années (19)30. Cette dernière voulait alors « débarrasser la Pologne des ses Juifs », ouvrant ainsi la voie à la violence antisémite qui se déchaîna durant et après la guerre
Ils soutiennent que «l’arrivée de réfugiés syriens en Europe fait partie d’une conspiration menée par des financiers juifs, qui travaillent avec les communistes de l’Union européenne pour amener des musulmans en Europe et, avec, la charia et l’homosexualité."

Les fascistes polonais s’appuyaient sur les succès de leurs congénères.  En Allemagne avec la poussée électorale du parti AfD, anti-migrants, mais aussi largement imprégné d'antisémitisme et de négationnisme et en Autriche où le parti d'extrême-droite FpO a remporté une double victoire. Il s'agit de son score de 26% des suffrages, mais aussi de la reprise de ses thèmes racistes par le parti de droite conservateur avec lequel il va sans doute gouverner.
En Hongrie, en Italie, aux USA, l’extrême-droite nationaliste également à l’offensive, associe dans sa haine les Musulmans et les Juifs. 
 
19 avril 2019
 
 La commémoration de cette année  sera marquée par le souvenir de Simcha Rotem, dernier combattant du ghetto de Varsovie encore en vie, décédé le 22 décembre 2018 à l'âge de 94 ans. Il a été membre de l'organisation juive de combat ( OJC) qui a organisé la lutte contre les nazis.

                                      Simha Rotem ( avec la casquette)

Un autre souvenir tragique d'actualité est celui des onze personnes massacrées dans une synagogue de Pittsburgh le 27 octobre dernier par un héritier du nazisme 

Memorial 98






MEMORIAL 98